LA REFORME DES RETRAITES EN FRANCE

Introduction :

En cette période de crise, les français s’inquiètent de plus en plus pour leur avenir. Les dernières semaines ont été marquées par de nombreux mouvements de protestations contre le projet de réforme des retraites qui a été présenté par le gouvernement.
La principale raison de cette réforme est que le nombre d’actifs par retraité diminue du fait de l’allongement de la durée de vie, entrainant un déséquilibre financier des caisses de retraites. S’ajoutant à cela, la génération du « baby-boom » amène 280.000 nouveaux retraités par an depuis 2006.
Tous ces éléments montrent que le système de retraite actuel ne peut pas être sauvegardé sans être réformé.
Il faut savoir en effet que la France était en retard en matière de réforme des retraites. En effet de nombreux pays européens avaient déjà adopté un âge de départ bien plus élevée qu’en France, par exemple l’Allemagne qui dispose d’un âge légal de départ à la retraite de 65 ans (67 ans pour les assurés nés après 1963) mais il est possible de partir à 63 ans en totalisant 35 années de cotisations.

Pour mieux comprendre cette réforme, nous allons voir dans un premier temps en quoi elle consiste, puis nous examinerons dans une seconde partie les différentes positions des parties en présence et l’évolution éventuelle de cette réforme.

I. En quoi consiste la réforme des retraites en France ?

Le système de retraite en France est principalement basé sur un système par répartitions, c’est à dire que les actifs payent la pension de la génération d’avant. Ce système diffère s’il s’agit de salariés du privé, de fonctionnaires ou bien de régimes spéciaux.

A) La réforme pour les salariés du privé

Les mesures prises dans cette réforme sont nombreuses. En premier lieu, il y a le passage de l’âge d’ouverture des droits de 60 à 62 ans. En effet, étant fixé à 60 ans depuis 1982, il passera à 62 ans d’ici à 2018 au rythme de quatre mois par génération. Autrement dit, personne (à part les bénéficiaires de dérogations) ne pourra prendre sa retraite avant cet âge là.
Il faut aussi prendre en compte l’augmentation de la durée de cotisation, passant de 40,5 ans à 41,5 ans d’ici à 2020, et l’âge d’annulation de la décote, qui on le rappelle est une diminution pénalisante de la retraite si le nombre de trimestre n’a pas été atteint, qui va progressivement passer de 65 à 67 ans au même rythme que l’âge d’ouverture des droits, entre 2016 et 2023.

B) La réforme pour les régimes spéciaux et les fonctionnaires

Mais avec les nombreux régimes de retraites différents, il a fallu aménager la réforme pour chaque catégorie de travailleurs afin d’une part de prendre en compte des situations particulières : par exemple ceux ayant commencé à travailler jeune et ayant cotisé au moins deux ans de plus que les autres pourront partir avant l’âge légal.
Il en va de même pour les métiers pénibles, où les salariés justifiant d’un taux d’incapacité de 20% à la suite d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle pourront continuer à partir à 60 ans. Les salariés et les agriculteurs ayant un taux d’incapacité compris entre 10% et 20% pourront saisir une commission chargée de déterminer le lien entre cette incapacité et un facteur de pénibilité de travail.
Les mères de familles sont, elles aussi concernées par des mesures aménagées : pour les mères d’au moins trois enfants nées avant 1956, la décote restera a 65 ans.

D’autres part pour adapter les mêmes principes d’allongement aux bénéficiaires de dérogations par rapport à la situation standard : pour les fonctionnaires en « catégorie active », c’est-à-dire dans un corps dont l’âge d’ouverture des droits est inférieur à 60 ans, cet âge sera décalé de 2 ans dans les mêmes conditions que dans le secteur privé. Les fonctionnaires qui peuvent aujourd’hui partir à 50 ans pourront partir, en 2018, à 52 ans ; ceux qui peuvent aujourd’hui quitter la Fonction publique à 55 ans partiront à 57 ans etc. L’âge d’annulation de la décote sera également décalé de 5 ans.
Pour les régimes spéciaux, c’est à dire les salariés de la SNCF, de la RATP et d’EDF, le relèvement de l’âge d’ouverture des droits débutera en 2017 pour tenir compte du calendrier de mise en œuvre de la réforme de 2008.

Pour les fonctionnaires, le taux de cotisation salariale a été revu à la hausse. En effet, aujourd’hui fixé à 7.85%, il sera mis au même niveau que celui du privé (10,55%) d’ici à 2020. Ils devront également disposer de tous leurs trimestres ou avoir atteint l’âge légal de départ pour profiter du minimum garanti de retraite qui lui reste inchangé (1.067 € contre 897 € pour les salariés du privé).
Les femmes fonctionnaires, mères d’au moins trois enfants, quand à elles ne pourront plus bénéficier d’un départ anticipé au bout de 15 ans de services.

II. Analyse de la posture des parties en présence

Cette réforme a suscité de fortes contestations syndicales et de l’opposition se traduisant par une dizaine de journées de manifestations dans les rues rassemblant près d’un million de manifestants.
D’un côté le gouvernement présentant sa réforme comme indispensable et seule possible et de l’autre, les syndicats et l’opposition ne voulant pas toucher à l’âge de départ à 60 ans mais acceptant paradoxalement l’allongement de la durée de travail.

A) Les syndicats et l’opposition Les syndicats et l’opposition eux, ne veulent pas toucher le symbole des 60 ans mais sont prêts paradoxalement à accepter une augmentation de la durée de cotisation ce qui revient quasiment au même.
Par ailleurs, les syndicats et l’opposition souhaiter que d’autres financements soient trouvés tels que des nouvelles taxes.
Ils mettaient aussi en avant que l’allongement du temps de travail allait accroitre le taux de chômeurs chez les plus de 50 ans qui est déjà élevé en France.
Enfin ils avançaient le fait que le caractère monolithique de la réforme ne prenait pas en compte les carrières pénibles et les disparités d’espérance de vie suivant les carrières.

B) Le gouvernement

Le gouvernement s’appuie sur l’analyse du Conseil d’Orientation des Retraites (COR) selon lequel le déficit de notre système de retraite s’élève en 2010 à près de 32 milliards d’euros. Cela signifie que aujourd’hui, près d’une retraite sur 10 n’est pas financée. Sans changement, le déficit est estimé à 70 milliards d’euros en 2030 et à près de 105 milliards d’euros en 2050.

Devant le déséquilibre financier des caisses de retraite, il y avait plusieurs variables d’ajustements : la durée de cotisation et l’âge légal de départ à la retraite, la baisse des pensions et la hausse des cotisations des entreprises et des salariés ou la création d’une nouvelle taxe sociale.
Le gouvernement a privilégié le paramètre âge en indiquant que c’était la seule solution viable, puis à la fin des débats, il a admis que d’autres aménagements seraient possibles ultérieurement en s’inspirant des modèles étrangers et notamment du fameux modèle suédois.
Remarquons que le gouvernement après avoir évoqué un alignement de la CSG sur celle des salariés n’a pas pour l’instant donné suite, sans doute en raison du poids électoral que représentent les retraités.

Conclusion :

Réformer le système des retraites était une nécessité au vu de la situation économique actuelle du système. Mais il faut savoir que l’équilibre financier est loin d’être garanti malgré cette réforme.
Le gouvernement a en effet annoncé son objectif d’équilibre pour 2018 mais pour y parvenir, il faudrait utiliser l’ensemble des actifs du Fond des retraites pour combler les déficits de l’assurance-vieillesse mais aussi espérer un recul du chômage à 7% en 2015 et à 4,5% (quasi-plein-emploi) après 2020.
Dans la loi portant sur la réforme des retraites, le sénat a introduit un amendement qui prévoit une « réflexion nationale » à partir de 2013 afin d’effectuer un changement de fond sur le système des retraites en France.
Parmi les éventuelles possibilités, il y a le fait de se rapprocher du système suédois qui est pour beaucoup un modèle synonyme de transparence et d’équité.
Le système suédois est un régime à cotisation virtuelle. Cela signifie que les cotisations des salariés s’accumulent en suivant un taux d’intérêt fictif reflétant le taux de croissance du salaire national moyen. Il y a deux régimes de cotisations : l’un par répartition (taux de cotisation 16%), et l’autre par capitalisation (taux de cotisation de 2,5%). Ensuite la pension est déterminée en fonction du compte accumulé (qui dépend notamment des placements choisis par l’assuré pour les comptes capitalisés) et de l’espérance de vie au moment où le salarié prend sa retraite.
Le système prévoit également une rente minimum, versée après 60 ans lorsque la pension initialement prévue est insuffisante.
Mais ce système n’est pas une solution miracle au problème des retraites, notamment si la croissance économique est moins forte que prévue, alors les comptes des actifs s’accumuleront moins vite mais il répond sans doute à la principale critique formulée par les manifestants de ne pas avoir la liberté de choisir son âge de départ à la retraite.

SOURCES :

* Vincent Collen. Retraites : les dix changements clefs, Les échos, 10 novembre 2010, n°20802, page 4. * Etienne Lefebvre. Financement, régimes complémentaires, rendez-vous de 2013 : les sujets qui ne sont pas réglés, Les échos, 10 novembre 2010, n°20802, page 4. * Pierre Plamondon, Le modèle suédois de régime à cotisation déterminée virtuel, février 2005, http://www.rrq.gouv.qc.ca/SiteCollectionDocuments/www.rrq.gouv.qc/Francais/publications/veille_internationale/Satellite%20vol%203%20No1.pdf * Le déficit de notre système de retraite, 15 avril 2010, http://www.retraites2010.fr/le-deficit-de-notre-systeme-de-retraite