Le trouble du plaisir

- trouble constitutif ou trouble qui affecte il n'y a de trouble perceptible que pou un être tourné vers la clarté
- trouble
Plaisir : expérience d'un vivant qui s'éprouve positivement dans l'existence, sentiment d'un épanouissement.
Le trouble n'est il pas même ce qui nous fait plaisir ?

I. Les paradoxes du plaisir

A. Le trouble du plaisir c'est le paradoxe d'un concept vague et flou

Déterminer par l'indétermination
Dire que le plaisir est trouble est un jugement. On cherche à délimiter, définir. Le paradoxe est qu'ici on détermine le plaisir par l'indétermination, l'illimitation, le flou.

Le malaise face au plaisir
Socrate dans le Philèbe rencontre 4 problèmes face à la délimitation du plaisir :
- pas d'unité définitionnelle du plaisir : le plaisir est l'affection positive, l'épanouissement éprouvé par un vivant dans le sentiment de son existence → pas de réalité homogène (plaisir du pervers/ plaisir du sage).

- le plaisir est insaisissable en tant qu'affect : Philèbe place le plaisir sous le signe d'Aphrodite, Aphros qui signifie l'écume. L'écume est insaisissable. Le plaisir en effet est insaisissable car il se rattache à la sensation, instable. Le plaisir passe, naît, revient : notre être est dans le devenir.
Socrate dit à Calliclès que la vie que de plaisirs est une vie de pluvier : le plaisir n'est que de passage comme le pluvier qui ne connait que le transit intestinal. Le trouble du plaisir c'est l'évanescence (diminution puis disparition)
Kierkegaard dans Ou bien ou bien dit que Don Juan, homme de plaisir, est musique, car la musique est dans l'instant, elle n'existe que dans l'instant.

- l'illimité est indéfinissable : le plaisir relève bien de l'illimité car il est inséparable du désir de plaisir. Or le plus grand trouble, qui conduit au malheur, est le désir d'une jouissance infinie. Le plaisir est apparemment sans mesure, sans forme.
Objections possibles : il y aurait bien une définition puisque le plaisir varie dans une série homogène (+ ou – cela reste du plaisir) le plaisir est compris entre deux limites : trop intense = effondrement de la conscience, voire souffrance (coma éthylique) ; trop faible = plus perceptible. C'est le tragique de l'addiction.
Mais ces deux objections s'annulent.

- le plaisir est d'autant plus trouble qu'il n'apparait pas pur : plaisir trouble de se désasltérer

Le plaisir est flou et doublement étranger au domaine de la connaissance
- la sensation de plaisir ne nous apprend rien sur les propriétés objectives de ce qui me donne du plaisir. Le plaisir que j'ai à manger une orange ne m'apprend rien sur elle. Le plaisir ne m'apprend rien sur ma propre identité : un jour j'aime ceci, un autre cela.
- le plaisir n'est pas objet de connaissance : les médecins demandent au patient d'évaluer sa propre souffrance.

B. Le trouble du plaisir est une expérience trouble et troublante

Le plaisir est indépendant de moi et pourtant me réalise entièrement
Le plaisir est un mouvement malgré moi. Je suis mis en mouvement. Passivité. Le champ lexical du plaisir le montre : penchant au plaisir, inclination, ravis (il faut bien un ravisseur), captifs. Et pourtant je ne suis jamais autant moi même que dans le plaisir, il est l'expérience positive de soi à soi. Je suis ce que je dois être car je n'ai pas envie d'en sortir. On est jamais autant nous même que lorsque l'on est aliéné.C'est troublant.

2. Le nous plaisir sur-prenant nous-même
Le plaisir advient dans la rencontre d'une réalité du monde. Dans l'expérience du plaisir, la clarté de notre rapport au monde se brouille. C'est la surprise. Et la sur-prise, c'est plus qu'une prise, ce qui est sur-prenant c'est là où je suis plus que pris. Nous sommes dans une situation de non maitrise.
Dans le plaisir, je me sur-prends moi même, l'inattendu est en moi. Le plaisir est terriblement trouble car il nous révèle qu'il y a une profondeur en moi inconnue. Ce qui est autre n'est pas tout à fait autre, cette m'est agréable, m'agrée (il y a un accord entre moi et moi même).
Le plaisir ne peut intervenir que dans un espace de non clarté, de non évidence. Et pourtant c'est une expérience évidente.
Objection possible : il peut y avoir de plaisir sans relation à quoi que ce soit : je me sens bien.
Mais nous ne faisons jamais totalement abstraction du monde, il y a toujours rapport à, mais rapport à soi. Le plaisir est inséparable de la relation. Quand on se sent bien on s'étonne soi même de sa bonne santé. Là où tout nous est dû il n'y a aucun étonnement, aucun plaisir. C'est la société de consommation.

C. L'expérience du plaisir est trouble en ce qu'elle me révèle à moi même comme un être trouble

Le plaisir est hybride : entre sensation et sentiment
Descartes définit le plaisir comme chatouillement, c'est une excitation physique, une sensation. Mais ce plaisir est hybride pour Descartes, càd composé d'éléments de différente nature. Car il s'accompagne dans l'âme d'une passion joyeuse : c'est le sentiment.
On ne peut pas nier la dimension physiologique, et toute excitation physiologique en l'homme est inséparable des états de conscience.
Cette distinction est légitimée par le fait que l'on peut avoir une sensation et un sentiment qui ne sont pas en continuité. On peut souffrir avec joie : les chatouillements dans le flirt amoureux sont dérangeant lorsqu'on veut se concentrer.

La vie mixte de Platon dans Le Philèbe
Un être qui ne serait que corps ou que esprit ne connaitrait pas le plaisir. Le plaisir est trouble car il est référable au corps mais aussi à la conscience. Il n'est ni du corps ni de l'âme, il est de la « troisième substance » selon Descartes. C'est le corps qui est simultanément conscience, et la conscience qui est le corps. Il n'y a pas de clarté possible ici. Ou commence la conscience, ou finit le corps ?
Le trouble du plaisir s'éclaire de la complexité hybride du sujet du plaisir et de son rapport au monde. Ce trouble n'est pas négatif, il renvoie à une extraordinaire richesse de la vie subjective, une vie jamais absolument transparente à elle même. Socrate montre que le plaisir est inséparable de l'âme, qui seule peut échapper à l'emprise du pur présent ponctuel. En dépassant ce présent, l'affect peut ne pas être une simple altération du corps. Le plaisir ce n'est pas la pierre qui s'altère sans cesse sous l'effet du temps.

Le plaisir serait toujours ce qui est troublé. Mais n'est pas aussi un plaisir gâché quand le trouble est trop rpésent ? C'est peut être à partir de là que s'enracine le désir d'un vrai plaisinr, sans trouble.

II. Le plaisir est une expérience aisément troublé pour le meilleur, mais aussi pour le pire

A. Le trouble du plaisir ou le plaisir troublé par un surcroit de plaisir

Le plaisir homogène est l'ennui
Le plaisir n'est jamais homogène. Si c'était le cas, ce serait l'ennui. C'est bien pourquoi on reprocherait à Épicure, qui distingue les plaisirs et mouvement et en repos, que son plaisir n'est que l'ennui. Ennuie d'une vitalité atone. Le plaisir n'est pas ennemi du trouble mais ne demande qu'à être troublé, qu'à connaître des variations d'intensité. C'est le grand plaisir du jeu, on traverse des états de frayeur.

Le plaisir de désirer
Kant oppose le couple plaisir-douleur à l'ennui (plutôt que l'opposition traditionnelle plaisir/douleur). L'ennuie c'est le sentiment d'une existence mono-tone. Seul l'homme peut s’ennuyer, car l'ennui est inséparable du désir. L'ennui c'est le désir qui se greffe sur aucun objet, il n'y a pas la modulation affective du désir de qqch : accélération, déception, peine, surprise.

B. Toutefois, le plaisir trouble c'est aussi le plaisir gâché

Entre particularisme et universalisme
L'existence repose sur une pluralité de facultés, et donc pluralité d'intérêts ! Les plaisirs sont à distinguer en fonction de nos intérêts/facultés : il n'y a de plaisirs que là où l'intérêt est satisfait.
Nous sommes des êtres individués. Nous avons une particularité empirique, l'idiosyncrasie, doublée d'une grande passion humaine : l'amour propre, sentiment que nous sommes le meilleur et entendons l'être dans le regard d'autrui. Mes intérêts sont toujours égoïstement intéressés.
Mais en même temps que je suis particulier, je suis ouvert à l'universel en tant que je suis un être doué de raison, la raison ne demande que l’universel. Je suis absolument libre en tant que ma volonté rationnelle veut l’universel, càd ce qui est reconnaissable par tout homme indépendamment des intérêts personnels. Cet intérêt est un intérêts pour la liberté : je suis capable de me détacher de tout intérêt personnel. Donc en tant que je me détermine librement il n'y a pas de place pour le plaisir car il ne dépend pas que de moi, il relève de la sensibilité et affectivité. Alors que le devoir ne dépend que de moi, qu'il me plaise ou non, le devoir est le devoir. Quand j'agis par devoir j'agis par respect de ma liberté. Le respect est certes un sentiment, mais bien différent de l'amour propre : c'est l'estime de soi.

La particularité humaine gâche notre plaisir
S'efforcer d'agir par devoir est frustrant et humiliant. Mon plaisir est frustré, mon amour propre humilié. Je ne me la ramène pas, si je le fais c'est de l'amour propre. Antinomie du bonheur et de la vertu.
C'est une attaque aux morales hédonistes qui identifient vertu/bonheur. Kant montre que bonheur et vertu ne relève pas du même ordre de l'existence : bonheur = nature sensible, de l'environnement ; vertu = ne dépend que de nous.

Le plaisir est troublée, mais cela ajoute au trouble du plaisir
Le plaisir est toujours malgré lui, on ne choisi pas d'en éprouver. Mais nous pouvons toujours décider d'y consentir ou non : nous pouvons toujours interrompre un plaisir. Là est notre liberté.

C. Le trouble du plaisir clarifié par l'existence éthique

Le plaisir présente un nouveau paradoxe
Le plaisir n'est pas aussi trouble parce qu'il est une absolue évidence dans le présent.
Mais on peut dire exactement le contraire : le plaisir est un trouble et est très relatif. Mais dans ce cas là je prends un autre point de vue sur mon plaisir : je le relativise. Ecarte de temporalité entre ces deux points de vue. La conscience élargie le présent en éclairant le présent par mon passé. L'expérience présente est relativisée : le temporalité éthique c'est la cohérence de la durée.

Implication
L'expérience d'un plaisir s’accompagne toujours d'un jugement de la conscience, mais ce jugement peut être faux car conditionné par l'expérience sensible.

Trois ordres du plaisir
- les petits plaisirs
- les plaisirs dans la retenue, dans la mesure. Cela témoigne d'un véritable amour du plaisir.
- les plaisirs purs : de la connaissance, esthétique. Aucune souffrance de les accompagne. Discutable → mythe de la Cigale : les hommes qui ne voient que par leurs plaisirs purs en oublient leur réalié sensible.

Une vie heureuse
C'est une vie équilibrée. Elle trouve son équilibre par un indicateur : le bien-être, immanent de la vie elle même. Philèbe ne comprend pas le plaisir ! Il dit qu'Aphrodite est réductible à Aphros (écume). Mais Aphrodite c'est la déesse de la beauté et non du plaisir, elle est aussi l'unité au sein de la multiplicité, la limite dans l’illimité.

Mais si le plaisir est constitutionnellement trouble, le plaisir clarifié est-il encore plaisir ? Pas de contradiction car on parle pas de clarté mais de clarification. A force d'être clarifié oui, il cesserait d'être plaisir. Car le plaisir c'est peut etre aussi et toujours le plaisir pris au trouble. Nous aimons flirter les limites.

III. Le plaisir pris au trouble

A. Constat et reformulation du problème
Marivaux – La vie de Marianne : l'émoi amoureux est un mélange de trouble, plaisir, et peur.
Plaisir pris devant les films de Tarentino.
Mais le trouble n'exclue pas la clarté, et a bien pour condition la clarté !

B. Quel est ce plaisir pris au spectacle tragique ?

Rappel sur le chatouillement chatouillement : il est à la fois détestable, agaçant et agréable. Il n'y a de plaisir que dans ce qui peut dvenir un mal. Le plaisir se nourrit constitutivment de la possibilité de la douelur. Le plaisir c'est l'épreuve de notre vitalité.

Quel est le rapport avec le plaisir pris au spectacle thétral ?
Il s'oppose radicalement à l'existence réelle, il n'y a aps d'engagement immédiat, la troisième substance n'est pas immédiatement engagée. Au spectacle nous éprouvons des passions violentes car c'est une re-présentation, cette passion n'est que conscience, qu'âme, et cela ne prête pas à conséquence. Je n'oublie jamais pas situation de spectateur.

C. Ce jeu passionel a valeur de paradigme, il est une base cohérente de vision du monde
La iberté c'est cette situation de la conscience en retrait du monde, qui fait que qq part nous sommes tojours pectateurs de ce monde, spectateurs de nos passions passives. Je suis touché par ces passions les plus passives, je ne peux que les éprouber et ressentir une béatitude, sans jamais être tout à fait atteint.
Auguste dans Cinna de Corneilles, quand il découvre le complot de Cinna et Emilie : « je suis maitre de moi même comme de l'univers », je suis troublé certs, mais pas atteint au fond de moi même.

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