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Conflit Entre Les Associés

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Submitted By marketingmama
Words 32895
Pages 132
Lundi le 26 septembre 2011

RANCOURT, RICHARD & RUEL Inc.

822 rue Ste-Hélène, Montréal, Québec

À l’attention de Mme Alice Ruel.

Objet de l’avis :
Le présent avis offrira une analyse juridique des différentes options possibles dans le cadre du conflit entre les associés de la société par actions Rancourt, Richard & Ruel Inc.

Numéro de dossier : 12345

Confirmation du mandat :

Tel qu’il a été mandaté lors de l’entrevue-client en date du 21 septembre 2011, le présent avis juridique est effectué en réponse aux questionnements que vous avez sur certains points de droit au dossier 12345.

Description du mandat :



L’exposé des faits et l’énumération des documents :

Suite à la consultation de documents fournis ainsi qu’aux informations recueillies lors de notre première rencontre, il sera question des faits résumant la présente situation au sein de l’entreprise. Premièrement, Mme Francyne Rancourt et Mme Richard sont associés depuis 9 ans dans un bureau de comptables situé à Montréal. Ce n’est qu’après quelques années de collaboration que Mme Rancourt souhaite ajouter une nouvelle associée à la compagnie puisque celle-ci prend de l’expansion. Mme Rancourt vous rencontre par l’entremise d’un ami de son mari et souhaite que vous vous joigniez à leur équipe en tant que nouvelle associée. Mme Richard n’est cependant pas très emballée par l’idée de s’associer avec une personne ayant si peu d’expérience, mais cède tout de même à la demande de Mme Rancourt. Les affaires de l’entreprise vont bon train jusqu’à ce que certaines difficultés financières viennent ébranler les relations de travail. En effet, depuis environ 8 mois, deux gros clients soit Transport Godfroy Inc. et Les Entreprises Bélany Inc. (qui sont des compagnies de spécialisant dans la fabrication de monte-charges) ont préférés consulter un autre bureau étant donné plusieurs absences injustifiées de leur comptable Mme Rancourt. Cette période difficile et stressante transparaît de plus en plus chez les associés et les relations interpersonnelles battent de l’aile. Mme Richard n’en peut plus de l’attitude colérique de Mme Rancourt et une grosse dispute survient entre elles. Au moment de cette dispute, Mme Richard formule une offre verbale consistant à remplacer Mme Rancourt à titre de présidente et d’effectuer le rachat de toutes ses actions sans délai pour une somme de 5000 $. Elle poursuit en disant que cette offre lui sera parvenue par écrit sous peu, et par le fait même exige que Mme Rancourt quitte la compagnie dans un délai maximal de 10 jours. Dans un état de choc, Mme Rancourt vous explique brièvement la situation une fois le départ de Mme Richard pour son dîner. Le fait de ne pas avoir été mise au courant des intentions de rachat de Mme Richard vous a beaucoup dérangé et vous vous êtes sentie quelque peu à l’écart au sein de l’entreprise. Vous considérez que malgré la plus grande expérience de travail de Mme Richard, celle-ci ne devrait pas vous dénigrer et vous exclure de ce genre de démarches. De plus, depuis cette dispute Mme Rancourt ne se présente plus au travail et les relations entre Mme Richard et vous mêmes sont très peu chaleureuses et jouent beaucoup sur votre humeur. Vous envisagez mal que les actions de Mme Rancourt soient rachetées par Mme Richard, ce qui impliquerait que cette fâcheuse relation de travail entre Mme Richard et vous-même dure encore longtemps. De plus, cette situation vous ajoute un stress puisque vous aviez planifié en catimini un projet d’adoption depuis quelques mois et aviez prévu prendre une année sabbatique à la venue du nouvel enfant. L’idée de racheter les actions de vos associés n’était pas une option que vous aviez dès lors envisagée, jusqu’à ce que votre père vous suggère de le faire. En effet, celui-ci serait prêt à vous avancer les fonds pour acquérir la totalité des actions de la compagnie. Puisque Mme Rancourt avait formellement refusé l’offre verbale de 5,000$ de Mme Richard, votre offre serait d’un total de 25,000$, soit 20,000$ pour racheter les actions de Mme Rancourt et 5,000$ pour celles de Mme Richard.

Points de droits / Examen des problèmes soulevés :
Les points de droit seront divisés en deux parties distinctes exposant des moyens afin d’atteindre une finalité désirée. Nous avons cru comprendre lors de l’entretien avec vous que deux possibilités pourraient être favorables dans votre situation. Premièrement, il sera question des recours possibles afin de s’opposer à l’offre d’achat de Mme Richard et de son désir de mettre à la porte votre associée Mme Rancourt et poursuivre avec vous jusqu’à preuve du contraire. Dans une seconde analyse, il sera question d’une autre possibilité qui semble être envisageable depuis une discussion avec votre père, soit celle du rachat total des actions de la société pour un montant de 25 000 $.

1. Points de droits applicables afin de revenir à la situation initiale de la société

Premièrement, une façon de permettre que la société garde les mêmes actionnaires et ne subisse aucun changement au niveau du partage des actions serait d’empêcher les procédures qu’essaie de faire valoir Mme Richard. Cette dernière a fait une offre verbale d’acheter la totalité des actions de Mme Rancourt pour une valeur de 5 000$ en plus d’exiger que cette dernière quitte la société dans un délai de 10 jours. Il est donc question d’attaquer la validité de la mise en demeure faite à l’égard de Mme Rancourt pour que celle-ci soit irrecevable et préserve le statu quo de la société.

A) Attaquer la validité de la mise en demeure

Les principaux outils qui serviront à soulever les différentes lacunes dans la mise en demeure de Mme Richard se retrouvent dans la loi sur les compagnies, la loi sur les sociétés par actions du Québec, le Code civil du Québec et plus particulièrement la convention des actionnaires qui touche précisément le cas présent. Des articles de chacun de ces documents juridiques vous seront donc exposés et brièvement expliqués afin que vous puissiez en comprendre la portée.

i) Dispositions dans la loi sur les compagnies :
Un administrateur ne peut se faire destituer de son poste que par la simple volonté de son associé. Il serait illogique de forcer quelqu’un à se retirer selon son propre gré, sans consulter les autres associés et de façon purement personnelle et volontaire. En effet, la loi sur les compagnies explique ce concept à l’article 123.77 al.1 prévoyant la procédure légale à suivre dans de telles circonstances :
123.77. Sauf disposition contraire des statuts, les actionnaires peuvent, par résolution, destituer un administrateur lors d'une assemblée générale extraordinaire convoquée à cette fin. Mme Richard n’a donc jamais convoqué une assemblée générale à cette fin et a précipité les choses en envoyant directement une mise en demeure à Mme Rancourt sans autres formalités.

De plus, l’article 123.79 de la loi sur les compagnies ajoute à ce principe que l’associé/administrateur qui est sujet à destitution doit être informé du lieu, de la date et de l’heure de l’assemblée afin de pouvoir le planifier et ne pas être pris par surprise par cette destitution. Encore une fois, Mme Rancourt a manqué à ce devoir en négligent totalement cette formalité et ses spécifications.
Vous pourriez donc grâce à ces dispositions contester la validité des démarches prises par Mme Richard puisqu’elles ne concordent pas avec la volonté du législateur et que vous en subissez un préjudice.

ii) Disposition dans la loi sur les sociétés par actions du Québec

Si l’on regarde maintenant les dispositions de la loi sur les sociétés par actions du Québec, certains articles sont pertinents dans la démarche de contester la validité de la mise en demeure. En effet, si dans un premier temps l’on regarde l’alinéa 1 de l’article 142, il est expliqué que le mandat d’un administrateur ne rend fin que par son inhabilité, sa démission ou sa révocation. Ici, Mme Rancourt n’est pas considérée inhabile, elle n’a pas non plus démissionné, il reste donc la seule possibilité de révocation. Cependant, si l’on regarde l’article 111 (15) de la L.S.A.Q, la révocation d’un administrateur ne peut être fait qu’avec un nombre de votes favorables à la révocation supérieur au nombre de votes défavorables. Le paragraphe 5 de l’article 111 se lit comme suit : « un administrateur ne peut être révoqué et le nombre d’administrateurs ne peut être réduit que si le nombre de votes en faveur de la révocation ou en faveur de la réduction dépasse le nombre de votes exprimés contre cette révocation ou cette réduction, multiplié par le nombre fixe d’administrateurs prévu par les statuts. » De plus, selon l’art 179 de la même loi, chaque actionnaire aurait un vote par actions ce qui aurait limité les chances de succès de Mme Richard. Ici, aucune assemblée générale n’ayant eu lieu, aucun membre n’a pu exprimer son droit de vote en faveur ou non de la décision de Mme Rancourt. Selon l’article 150 de la L.S.A.Q., lors de cette assemblée Mme Rancourt aurait dû avoir le droit de prendre la parole et expliquer son opposition à une telle révocation, chose qu’elle n’a pas eu la chance de faire.

iii) Disposition dans le Code civil du Québec

iv) Convention des actionnaires

La convention des actionnaires a une importance primordiale dans ce dossier puisqu’elle édicte les engagements spécifiques que les actionnaires ont pris entre eux. Chacun a signé cette convention, s’engageant à respecter son contenu et à chérir le but de la société qui est d’unir leurs efforts pour promouvoir les intérêts de la compagnie. L’article 3 de cette convention stipule que le quorum des assemblés des actionnaires devra toujours être composé de ses trois membres au minimum. Ici, aucune assemblée d’actionnaires n’a cependant été convoquée malgré sa nécessité. De plus, on y stipule également que « Toute résolution, quelle qu’elle soit, passée à une assemblée des administrateurs ou des actionnaires exigeront le vote majoritaire des administrateurs ou des actionnaires afin d’être validement passées, incluant une résolution pour accepter une offre d’achat ou pour vendre un immeuble, lesquelles résolutions seront obligatoires. » Il s’avère donc que puisqu’aucune assemblée n’a été faite et que par le fait même aucun vote majoritaire n’a été rendu, la validité des procédures effectuées par Mme Richard est plus que discutable. On parle également dans cet article qu’une résolution pour accepter une offre d’achat doit être obligatoirement rendue par la personne qui souhaite acheter. Mme Richard a simplement formulé une offre d’achat verbale qu’elle a ensuite transposée sur papier sans jamais l’introduire dans un avis de résolution lors d’une assemblée. L’article 7 de la convention d’actionnaires est une disposition clé dans le cadre du dossier. En effet, cet article vient clarifier l’aspect de « décision importante » au sein de l’entreprise. On y explique que chaque actionnaire aura le pouvoir conféré par leur poste au sein de la société, donc que Francyne Rancourt agit à titre de présidente, Carle Richard à titre de vice-présidente et vous-même à titre de secrétaire-trésorière. Ce n’est cependant pas pour autant que la présidente ou vice-présidente aurait plus de pouvoir lorsqu’il est question de décisions importantes touchant l’ensemble de la société. Pour des décisions touchant l’administration de la compagnie, le consentement majoritaire des actionnaires est alors exigé. La destitution de la présidente de la compagnie en plus d’une offre d’achat entre actionnaires représente sans contradiction des décisions des grandes importances au sein de cette société par actions. On explique également dans cet article qu’il ne s’agit pas de décisions administratives prises dans le cours normal des activités de la société. L’offre d’achat de Mme Richard et le départ de Mme Rancourt sont des évènements décisifs et changeraient complètement la dynamique de la société. On ne peut donc conclure qu’il s’agit de décision administrative quotidienne et sans grands impacts.

* Pour retourner à la situation « initiale » : * Attaquer la mise en demeure : * Bonne procédure à suivre pour destituer/révoquer un administrateur : LC 123.77, LC 123.79, LSAQ 111 (5), LSAQ 142, LSAQ 144, LSAQ 150, LSAQ 179, CCQ 336, CCQ 348, CCQ 349, CCQ 351, CCQ 352 + art 3 convention des actionnaires + art 7 convention

* Bonne procédure à suivre pour transférer des actions : LSAQ 81, LSAQ 84, LSAQ 398 et ss * Redressement en cas d’abus de pouvoir ou d’iniquité (par le tribunal) : LSAQ 450 et ss

* Pour acheter les actions de Mme Rancourt et de Mme Richard : * Comment se « débarrasser » des autres administrateurs : * Par destitution/révocation : LC 123.76, LC 123.77, LC 123.79, LSAQ 111 (5), LSAQ 142, LSAQ 144, LSAQ 179, CCQ 336, CCQ 339, CCQ 348, CCQ 349, CCQ 351, CCQ 352 * Par démission (eux-même): LC 123.76, LSAQ 142 * Attendre la fin de leur mandat : LSAQ 110, CCQ 339 * Comment acquérir leurs actions : * Transfert d’action (acheter des actions d’un autre actionnaire) : LSAQ 81, LSAQ 84 * Rachat d’actions (par la société) : LSAQ 372 et ss * Acquisition forcée d’actions : LSAQ 398 et ss * Modification des statuts : LSAQ 151

Autres articles (pour information personnelle ou qui seront peut-être pertinents plus tard…): * partie 1A de la loi sur les compagnies : * LC 123.166 : conflit statuts vs règlements

* lsaq: * LSAQ 2 : définitions * LSAQ 6 : statuts, conflit statut vs règlement * LSAQ 113 : règlement intérieur * LSAQ 119 : obligations, devoirs administrateurs * LSAQ 221 à 223 : expulsion d’un actionnaire (je ne l’ai pas mis car je crois que ça ne s’applique pas puisque ici il s’agit d’administrateurs) * LSAQ 460 : cas d’inobservation * LSAQ 715, 716, 728 : la lsaq s’applique (compagnie devient société par action le 14 fév 2011) ainsi que la partie 1A (jusqu’en 2016)

* ccq : * CCQ 310 : fonctionnement/administration régis par… conflit entre… * CCQ 321 : obligations des administrateurs * CCQ 322 : devoirs des administrateurs

Jurisprudence :

Bibliographie:

Heeg c. Hitech Piping (HTP) Ltd. Référence Azimut : AZ-50574328

Fafard c. Investissement Desjardins
Entre
Normand Fafard, requérant, et
Investissement Desjardins, Corporation placements Banque
Royale, Denis Larochelle, Guy Carrier, Nick Ganos et Georges
Baril, intimés, et
Sophie Fafard, Jean Fafard, Pierre Fafard, Ferrier Fafard,
François Fafard, Gilles Fafard, Sylvie Fafard, Guy Fafard,
Denis Arpin, André Loranger et Serge Brodeur, actionnaires - mis en cause, et
Arcon Canada Inc., société - mis en cause
[1997] J.Q. no 1292
No 500-05-027130-960
Cour supérieure du Québec
District de Montréal
La juge Grenier le 14 avril 1997
(9 pages)
Avocats:
Bernard Moreau (Braman Barbacki Moreau), pour le requérant.
Gary D.D. Morrison (Heenan Blaikie), pour les intimées Investissement Desjardins Inc. et La Corporation Placements Banque Royale.

MOTIFS DU JUGEMENT

1 LA JUGE GRENIER:— Le requérant, Normand Fafard, est l'un des actionnaires de la mise en cause, Arcon Canada Inc.
2 En date du 22 octobre 1996, agissant conjointement, les actionnaires intimés, Denis Larochelle, Guy Carrier, Nick Ganos et Georges Baril, signifiaient au requérant et aux autres mis en cause un document intitulé "PRÉAVIS" selon lequel ils les avisaient de leur intention de vendre collectivement aux deux autres intimés, la Corporation Banque Royale et Investissements Desjardins, la totalité des actions qu'ils détiennent dans Arcon.
3 Le requérant a intenté une requête en jugement déclaratoire afin de faire déclarer que le PRÉAVIS du 22 octobre 1996 contrevient à l'article 11 de la Convention d'actionnaires du 22 décembre 1987. Il demande également au tribunal de déclarer que toute vente suivant les conditions du PRÉAVIS serait nulle et de nul effet.
4 Le requérant soutient que l'offre contrevient à l'article 11 de la Convention d'actionnaires et qu'elle n'est pas conforme à la lettre et à l'esprit de cette convention.
5 Les intimés plaident que la convention d'actionnaires n'a pas pour but de bloquer les prises de contrôle mais qu'elle vise uniquement à conférer aux actionnaires un droit de premier refus, droit qui, en l'espèce, a été exercé par le requérant conditionnellement l'adjudication en faveur de la égalité du préavis.
6 Il s'agit donc de déterminer si les actionnaires peuvent agir collectivement lorsqu'ils désirent vendre la totalité ou une partie le leurs actions ordinaires.
7 L'article 11 de la convention d'actionnaires est au coeur du litige. Il se lit comme suit : * "ARTICLE 11 - DROIT DE PREMIER REFUS * 11.1 Dans l'éventualité où l'une des parties aux présentes (le "Vendeur") désire vendre, transférer ou aliéner la totalité ou une partie des actions ordinaires du capital social de la Société détenues ou contrôlées par elle (la totalité ou cette portion des actions étant parfois ci-après appelée tes "Actions Cédées"), le Vendeur doit donner un préavis écrit (le "Préavis") de ce fait aux autres parties au moins 45 jours avant la date de la vente projetée, du transfert ou de l'aliénation proposée. * Le Préavis doit énoncer le nom et l'adresse de l'acheteur proposé pour les Actions Cédées, le prix d'achat par action ou toute autre contrepartie devant être reçue par action, l'équivalence monétaire de cette contrepartie et la façon dont elle a été établie, la monnaie de paiement de ce prix ou de cette contrepartie et tous les autres termes et conditions se rapportant à la vente, au transfert ou à l'aliénation proposée. * Les autres parties ont alors un droit de premier refus pour se porter acquéreur des Actions Cédées, au prorata du nombre d'actions ordinaires détenues par chacune. Ce droit de premier refus peut être exercé par avis écrit donné au Vendeur au cours de la période de 45 jours commençant à la date à laquelle le Vendeur a donné le Préavis aux autres parties. Si le Vendeur est un membre de la famille Fafard ou une société contrôlée par un membre de la famille Fafard, les autres membres de la famille Fafard qui sont parties à la présente convention auront, dans un premier temps, au prorata du nombre d'actions ordinaires détenues par chacun, un droit de premier refus exclusif relativement aux Actions Cédées. Les dispositions des paragraphes 11.2, 11.3 et 11.4 s'appliqueront donc d'abord dans le cadre de ce droit de premier refus exclusif. Si toutes les Actions Cédées ne sont pas achetées dans le cadre de ce droit de premier refus exclusif les autres parties à la présente convention pourront s'en porter acquéreur suivant les mêmes dispositions avant que le Vendeur ne puisse en disposer autrement conformément aux dispositions du paragraphe 11.5 * 11.2 Advenant que l'une ou l'autre des parties à qui le Préavis est adressé n'exerce pas, dans le délai prévu au paragraphe 11.1, son droit d'acheter toutes les actions ordinaires qu'elle aurait eu le droit d'acheter les actions ordinaires qu'elle n'aura pas achetées pourront alors être achetées par les autres parties, si celles-ci ont exercé leur droit initial en totalité, à la condition, cependant, que ces dernières exercent ce deuxième droit dans les 10 jours de la date de la livraison d'un avis qui leur aura été donné de l'expiration du droit de celles qui ne l'auront pas exercé ou qui ne l'auront exercé que partiellement et ainsi de suite jusqu'à ce que toutes les actions ordinaires offertes aient été achetées. * 11.3 Le droit de premier refus à l'égard des Actions Cédées doit être exercé ait même prix par action, dans la même monnaie et selon les mêmes termes et conditions que ceux envisagés pour la vente, le transfert ou l'aliénation proposée. * Si la contrepartie mentionnée dans le Préavis est payable autrement qu'en argent et qu'elle ne puisse être raisonnablement payée par les autres parties, celles-ci sent tenues de payer au lieu de cette contrepartie, une somme d'argent égale à la juste valeur marchande de cette contrepartie telle que fixée par le Vendeur et les parties ayant exercé le droit de premier refus ou, à défaut d'entente, par un évaluateur indépendant dont l'expertise dans le domaine de l'évaluation est reconnue et qui est nommé conjointement par le Vendeur et les parties ayant exercé le droit de premier refus. * 11.4 Si le droit de premier refus est exercé conformément au présent article 11, les parties ayant exercé le droit de premier refus achèteront du Vendeur et le Vendeur leur vendra, les Actions Cédées. À moins d'entente contraire entre les parties aux présentes, l'achat et la vente des Actions Cédées seront complétées dans les 60 jours suivant la date du dernier avis donné au Vendeur par les parties exerçant le droit de premier refus conformément aux paragraphes 11.1 ou 11.2. * Au moment de la Clôture, le Vendeur et les parties ayant exercé le droit de premier refus signeront et se livreront mutuellement les différents documents requis pour compléter la vente des Actions Cédées y compris, sans limiter la portée de ce qui précède, la cession et la livraison des certificats d'actions et le paiement du prix de vente. De plus, le Vendeur devra voir à ce que ces représentants, s'il en est, démissionnent comme administrateurs et dirigeants de la Société. * 11.5 Si le droit de premier refus n'a pas été exercé en totalité à l'intérieur du délai prescrit, le Vendeur pourra disposer des actions Cédées; il est toutefois entendu que pareille disposition ne peut se faire que durant la période de 90 jours qui commence à l'expiration de la période au cours de laquelle le droit de premier refus aurait pu être exercé et uniquement en faveur de l'acheteur ou autre cessionnaire divulgué dans le Préavis et au prix d'achat par action et selon les termes et conditions énoncés dans le Préavis. * Advenant un tel transfert, et c'est une condition essentielle à celui-ci à moins que les parties n'en conviennent alors autrement, l'acheteur ou le cessionnaire des Actions Cédées confirmera aux autres parties son consentement irrévocable à être lié par les dispositions de la présente convention et si les Actions Cédées représentent la totalité des actions ordinaires détenues par le Vendeur succédera au Vendeur dans tous ses droits, avantages, obligations et responsabilités en vertu des présentes et sera réputé se substituer au Vendeur aussi complètement que s'il était nommé dans chaque disposition de la présente convention et les Actions Cédées demeureront assujetties aux dispositions de la présente convention entre les mains de cet acheteur ou cessionnaire. * 11.6 Advenant le cas où des dirigeants-actionnaires de la Société et de ses filiales reçoivent une offre d'achat irrévocable d'un tiers de bonne foi portant sur la totalité ou sur une partie des actions ordinaires de la Société alors détenues ou contrôlées par eux qui aurait pour effet de réduire à moins de 50% des actions ordinaires de la Société alors émises et en circulation le nombre de ces actions détenues par l'ensemble des dirigeants-actionnaires de la Société et de ses filiales, SID pourra, outre la possibilité de se prévaloir du droit de premier refus qui lui est conféré conformément aux dispositions dit présent article 11, exiger dans le délai imparti de 45 jours visé au paragraphe 11.1, que ces dirigeants-actionnaires ne puissent accepter cette offre à moins que SID n'ait alors l'opportunité de vendre toutes ses actions ordinaires du capital social de la Société à l'offrant au même prix que celui offert aux dirigeants-actionnaires et selon les mêmes termes et conditions, les dispositions dit présent paragraphe 11.6 devant également bénéficier à tout autre actionnaire minoritaire de la Société partie à la présent convention. * 11.7 Advenant le cas où Normand Fafard et/ou Gestion Normand Fafard Inc. reçoivent une offre d'achat irrévocable d'un tiers de bonne foi portant sur la totalité ou une partie des actions ordinaires de la Société alors détenues ou contrôlées par eux, SID pourra, outre la possibilité de se prévaloir du droit de premier refus qui lui est conféré conformément aux dispositions du présent article 11, exiger dans le délai imparti de 45 jours visé au paragraphe 11.1, que Normand Fafard et/ou Gestion Normand Fafard Inc ne puissent accepter cette offre à moins que SDI n'ait alors l'opportunité de vendre à l'offrant, au même prix que celui offert à Normand Fafard et/ou Gestion Normand Fafard Inc. et selon les mêmes termes et conditions, un pourcentage de ses actions ordinaires égal au pourcentage des actions ordinaires que Normand Fafard et/ou Gestion Normand Fafard Inc acceptent de vendre par rapport aux actions ordinaires qu'ils détiennent. Les dispositions dit présent paragraphe 11.7 doivent également bénéficier à toute autre partie à la présente convention. * 11.8 Advenant le décès d'un actionnaire de la Société (y compris le décès d'une personne qui aurait déposé des actions ordinaires de la Société dans un régime enregistré d'épargne retraite) ou d'un actionnaire détenant le contrôle d'une société elle-même actionnaire de la Société, cet actionnaire ou cette société sera réputé avoir décidé de vendre la totalité des actions ordinaires du capital social de la Société détenues ou contrôlées par lui ainsi que réputé avoir donné à cet effet le Préavis mentionné à l'article 11.1 des présentes. Les dispositions de l'article 11 des présentes s'appliquent compte tenue les adaptations nécessaires, à semblable offre de vente sous réserve des modifications suivantes : * - le prix de vente des actions ordinaires offertes en vente sera égal à la plus élevée des sommes suivantes, savoir (i) la valeur aux livres de ces actions selon les états financiers vérifiés sur une base consolidée pour le dernier exercice financier complet de la Société (on devra pour les fins du calcul de ce prix ajouter la somme de 1 000 000$ à la valeur aux livres de toutes les actions du capital social de la Société émises et en circulation) ou (ii) la somme que représente 6,5 fois la moyenne arithmétique pour les 2 derniers exercices financiers complets de la Société, de ses bénéfices nets, après impôts mais avant postes extraordinaires, divisée par le nombre d'actions ordinaires émises et en circulation de la Société, multiplié par le nombre d'actions ordinaires détenues par l'actionnaire décédé; * - la vente des actions doit être complétée dans les 30 jours de la date de réception des preuves appropriées attestant que les actions vendues sont libres de toute redevance fiscale; * - le prix d'achat doit être payé comptant au moment de la clôture de la transaction; * - si toutes les actions offertes en vente ne sont pas achetées dans le cadre du droit de premier refus, les héritiers, représentants légaux ou légataires particuliers dit défunt devront devenir partie à la présente convention, à défaut de quoi ils ne sauraient être considérés et immatriculés comme actionnaires de la Société. * 11.9 La vente par SID à une autre institution financière d'une partie de ses actions ordinaires dit capital social de la Société, faite dans le cadre de la lettre d'offre que SID adressait à la Société en date du 16 décembre 1987, ne sera pas assujettie aux dispositions du présent article 11. * 11.10 Après exercice du droit de premier refus prévu au présent article 11, si SID vendait un nombre d'actions égal ou supérieur à 20% dit nombre total d'actions ordinaires du capital social de la Société, elle pourra transférer à l'acquéreur de ses actions tous les droits qu'elle détient en vertu de la présente convention, à la condition de ne pas vendre ces actions à un concurrent de la Société."
8 L'article 10 consacre l'inaliénabilité des actions "sauf de manière spécifiquement prévue dans la convention". L'article réglemente la manière de disposer des actions. Une partie qui veut vendre ses actions doit les offrir aux autres actionnaires dans le respect de la proportionnalité.
9 Rien dans l'article 11 ou dans quelqu'autre disposition de la convention d'actionnaires n'empêche la mise en vente collective. Bien que les parties à la convention aient choisi de parler au singulier, ils ont également inclus une disposition interprétative, l'article 27, qui se lit comme suit : * "ARTICLE 27. INTERPRÉTATION * Le préambule fait partie intégrante de la présente convention; tout mot écrit au singulier comprend le pluriel et vice versa; tout mot écrit au masculin comprend aussi le féminin; tout mot désignant des personnes comprend également des sociétés, associations et corporations.
(...)"
10 En appliquant cette règle d'interprétation à l'article 11, il faut conclure que plusieurs parties peuvent vendre ensemble leurs actions même si une telle vente entraîne une prise de contrôle. L'article 11 est libellé de façon telle qu'on y a prévu tous les scénarios possibles dans le cadre d'une vente d'actions. Si les parties avaient voulu ainsi bloquer une prise de contrôle, elles l'auraient dit expressément.
11 PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL : REJETTE la requête en jugement déclaratoire du requérant; Avec dépens.
LA JUGE GRENIER

Bubis c. Gottlieb
Entre
Percy Bubis, requérant, et
William Gottlieb, Eleanor Gottlieb et Viacan Customs Brokers
Inc., intimés
[1995] J.Q. no 1636
No 500-05-006531-931
Cour supérieure du Québec
District de Montréal
Le juge Filiatreault le 13 juillet 1995
(8 pages)
Avocats:
Allan Adel, pour le requérant.
Leon J. Greenberg, pour les intimés.

MOTIFS DU JUGEMENT

1 LE JUGE FILIATREAULT:— Percy Bubis, le requérant, est actionnaire minoritaire dans la compagnie Courtiers en douanes Viacan (Viacan).
2 Il se plaint d'être victime d'oppression en tant qu'actionnaire minoritaire dans cette compagnie à cause des agissements de William Gottlieb. Il soutient que ce dernier a acquis irrégulièrement des actions dans la compagnie Viacan et qu'il en a aussi été nommé irrégulièrement directeur,
3 Comme remède, Percy Bubis demande au Tribunal de déclarer nulle, illégale et irrégulière la nomination de William Gottlieb au poste de directeur de Viacan et de transférer, au demandeur Percy Bubis ainsi qu'à Eleanor Gottlieb, 50% des actions acquises par William Gottlieb dans la compagnie Viacan. Dans un premier temps, il se dit victime d'oppression.
4 Percy Bubis, William Gottlieb et Dame Gottlieb ont témoigné. Après avoir entendu l'ensemble des témoins, tant pour la demande que pour la défense, le Tribunal considère que Percy Bubis a fait défaut de prouver qu'il y avait oppression à son égard dans l'administration de la compagnie Viacan. * Un comportement oppressif doit être allégué et prouvé pour qu'une requête soit accueillie en vertu de l'article 241 L.S.A.1 * Selon le juge Legault, l'article 241 n'a pas pour but de régler des chicanes entre actionnaires.2
5 Dans un deuxième temps, le demandeur Percy Bubis reproche à William Gottlieb d'avoir acquis, à l'encontre de l'entente initiale (P-1), des actions dans Viacan; agissant ainsi irrégulièrement et générant chez-lui un état d'infériorité.
6 Depuis le début, le requérant Percy Bubis a toujours eu 25% des actions de la compagnie Viacan. Dans cette compagnie, la répartition des actions et des postes était initialement comme suit: | Percy Bubis, président: | 100 actions | | | Joseph Litman, vice-président: | 100 actions | | | Anthony Kirsch, secrétaire: | 100 actions | | | Eleanor Gottlieb, trésorière: | 100 actions | |
7 Joseph Litman était le représentant nommé de 85630 Canada Limited et Anthony Kirsch était le représentant de 85631 Canada Limited.
8 Le 30 mars 1992, Joseph Litman et 85630 Canada Limited vendent leurs 100 actions à Viacan.
9 De plus, la "partie de première part", Percy Bubis, apportait sa connaissance et son expérience dans les opérations de "courtier en douanes"; la "partie de seconde part", à savoir 85630 Canada Limited, 85631 Canada Limited et Eleanor Gottlieb, déposait dans Viacan, pour le financer, un apport respectif de 70 000$.
10 Le bureau de direction et officiers était composé de quatre directeurs. Sans le consentement unanime de ces derniers, on devait en rester à ce nombre de directeurs.
11 La "partie de première part", Percy Bubis, pouvait être directeur ou nommer une personne à ce poste.
12 La "partie de seconde part", les trois autres personnes ci-haut nommées, étaient en position d'être nommées aux trois autres postes de directeurs ou avaient le pouvoir de nommer trois autres personnes à leur place. Le quorum était formé de trois directeurs.
13 Il était convenu, au tout début, que les officiers de la corporation Viacan seraient: * Percy Bubis, président
Joseph Litman, vice-président
Anthony Kirsch, secrétaire
Eleanor Gottlieb, trésorière
14 L'article 8 de l'entente passée entre les en date du 5 décembre 1983 et produit comme pièce P-1 se lit comme suit: * "PROHIBITION TO TRANSFER * Except as expressly provided in this Agreement, the shareholders shall not sell, transfer, assign or otherwise dispose of their shareholdings in the corporation, nor in any way mortgage, hypothecate, pledge or alienate or charge any of their shares in the capital stock of the corporation, without the consent in writing of all of the other shareholders of the Corporation. * The certificates of shares in the corporation shall bear the following legion: 0 "The transfer of the shares represented by this Certificate is subject to the provisions of the Charter of the Corporation and to a Shareholders Agreement, and may only be dealt with in accordance with the provisions of the Charter and the Agreement. Copies of the Charter and of the Agreement may be obtained from the Secretary of the corporation. * Nothing in this provision shall prevent the transfer of any shares in the corporation from Eleanor Gottlieb to William Gottlieb, from 85630 canada Limited to Joseph Litman or from 85631 canada Limited to Anthony Kirsh, or from any one of the above persons or corporations to the other, or the entering into an agreement between any such persons envisaging such a transfer."
15 On peut constater qu'initialement le requérant Percy Bubis était minoritaire et détenait 100 actions sur 400 actions émises et ce, sans aucune mise de fonds. Sa compétence comme courtier en douanes y paliait.
16 Il détenait le poste de gérant et administrateur de Viacan.
17 Le requérant reproche indûment à William Gottlieb d'avoir acquis les actions d'Anthony Kirsch.
18 La prohibition de transfert prévue à l'article 8 de la pièce P-1 contient cependant une exception dans le dernier paragraphe de l'article 8, à savoir qu'il n'y a rien qui empêche le transfert d'actions de Viacan à partir de Eleanor Gottlieb à William Gottlieb, de 85630 Canada Limited à Joseph Litman et de 85631 Canada Limited à Anthony Kirsch et en dernier, rien n'empêche les transactions d'actions de Viacan: * "... from any one of the above persons or corporations to the other, or the entering into an agreement between any such persons envisaging such a transfer."
19 À cause de cette exception, le transfert d'actions survenu entre 85631 Canada Limited et Anthony Kirsch à William Gottlieb, le 5 décembre 1992, est parfaitement régulier.
20 Il est également à souligner que dans son, désir d'acquérir 50 actions des 100 actions que détient William Gottlieb, Percy Bubis n'a fait aucune offre et consignation.
21 Il est aussi à noter que le demandeur a acquis ses 100 actions initiales pour la somme de 100$ et son savoir-faire; tandis que les trois autres actionnaires, "parties of the second part", ont dû déposer chacun une somme de 70 000$ afin d'apporter un financement à Viacan.
22 Percy Bubis a failli dans l'apport de preuves concernant l'oppression dont il prétend être victime et plus particulièrement dans l'exercice de ses droits de directeur et de gérant de la compagnie Viacan. Il est même allé jusqu'à dire qu'il pouvait avoir confiance en William Gottlieb.
23 Pour avoir gain de cause, Percy Bubis doit prouver qu'il y a réellement une oppression de la "partie de seconde part" contre lui. Il en a la fardeau de la preuve. De plus, cette oppression doit être grave, sérieuse et réelle. Cette oppression ne doit pas constituer un simple désaccord entre coactionnaires. L'oppression doit être claire et sérieuse.
24 La preuve révèle qu'il n'y a aucun dialogue entre Percy Bubis et William Gottlieb. Cette difficulté semble aplanie par Eleanor Gottlieb. Elle travaille la fois pour Viacan et Kirsch. Elle s'occupe de collection et de crédit. Elle ouvre les marges de crédit après avoir consulté MM. Bubis et Gottlieb. Elle sert de trait d'union entre les deux. Personne ne s'en plaint. Même silencieuses, les relations sont effectives entre Percy Bubis et William Gottlieb. L'article 241 n'est pas utilisé pour rétablir les bonnes relations entre coactionnaires qui ne se parlent pas.
25 Le transfert des actions de Viacan acquises par William Gottlieb, a été fait conformément à l'entente P-1, article 8. Ce transfert d'actions est conforme à l'entente initiale (P-1) et donne ouverture au poste de directeur chez Viacan.
26 POUR TOUTES CES RAISONS, LE TRIBUNAL: REJETTE l'action du requérant Percy Bubis; AVEC DÉPENS.
LE JUGE FILIATREAULT

Larabie c. 3917592 Canada inc.
ROCH LARABIE, requérant
c.
3917592 CANADA INC. et JACQUES BEAUREGARD, intimés et LOUIS LECLAIR, mis en cause
[2004] J.Q. no 11574
J.E. 2005-129
Nos : 550-05-012009-026, 550-05-011984-021
Cour supérieure du Québec
District de Hull
L'honorable Pierre Isabelle, J.C.S.
Entendu : 9 juin 2004.
Rendu : 3 novembre 2004.
(245 paragr.)
Avocats :
Richard Leblanc, procureur du demandeur.
Pierre Bourget, procureur du défendeur.

JUGEMENT

1 Roch Larabie demande l'émission d'une ordonnance en vertu de l'article 241 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (L.R.C. (1985) ch. C-44) et en injonction afin d'être déclaré propriétaire de 30 % des actions du capital-actions de la société 3917592 Canada inc. et pour obtenir le rachat de ces actions, évaluées à 150 000 $, par le seul actionnaire de la société, Jacques Beauregard.
2 Le requérant plaide être victime d'oppression de la part des intimés 3917592 Canada inc. et Jacques Beauregard, en raison de leur refus de lui émettre les certificats d'actions faisant l'objet d'une entente intervenue entre le requérant et le co-intimé Jacques Beauregard. Il leur reproche également son congédiement injustifié et leur mauvaise foi.
3 Le requérant voit également de l'oppression dans le choix exercé par Jacques Beauregard, de considérer son investissement de 300 000,00 $ dans la société, à titre de dû à l'actionnaire et de ne pas le capitaliser aux états financiers, ce qui rend l'entreprise déficitaire, le privant ainsi de la valeur marchande réelle de ses actions.
4 Roch Larabie intente également un recours en dommages pour congédiement injustifié dans le dossier 550-05-012001-026. Il réclame de Jacques Beauregard et de 3917592 Canada inc., 500 000,00 $ pour la perte de salaire, 250 000,00 $ en dommages et intérêts et 100 000,00 $ en dommages exemplaires. Le requérant prétend bénéficier d'un contrat de travail à durée déterminée.
5 Les deux recours sont entendus ensembles1 et le Tribunal en dispose dans le présent jugement.
6 Les intimés plaident d'abord que le requérant n'a pas l'intérêt voulu pour exercer un recours en oppression puisqu'il n'est pas un plaignant au sens de l'article 238 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Le requérant n'est que le bénéficiaire d'une promesse de vente, laquelle est conditionnelle à l'apport dans la société de son expertise et la réalisation d'objectifs de vente promis.
7 Les intimés plaident que le choix de Jacques Beauregard de traiter son investissement de 300 000,00 $ dans la société comme un dû à l'actionnaire et de ne pas le capitaliser aux états financiers n'opprime pas Roch Larabie, car ce choix est légitime et n'est pas justifié par un objectif d'oppression.
8 De plus, les intimés demandent le rejet du recours en oppression en raison de l'absence de préjudice subi par le requérant puisque les états financiers de l'entreprise démontrent un déficit et que la valeur des actions est donc négative.
9 Les intimés contestent également les prétentions du requérant quant à son congédiement injustifié. Ils prétendent que Roch Larabie est incompétent pour gérer la société et que ses décisions sont abusives et prises sans respect des droits de l'actionnaire Jacques Beauregard et sans considération pour les montants investis dans la société par celui-ci.
10 Les intimés reprochent à Roch Larabie d'avoir faussement représenté à Jacques Beauregard son expérience en gestion d'entreprise, laquelle a mené à la signature de l'entente prévoyant la cession au requérant de 30 % des actions de la société.
11 Enfin, on prétend que Roch Larabie est lié à la compagnie par un contrat de service intervenu le 17 avril 2002 entre la société 3917592 Canada inc. et Les entreprises et installations R.L. et qu'à ce titre, il peut être mis un terme au contrat sans indemnité de départ.
Questions en litige :
12 Ainsi, afin de disposer du présent litige, le Tribunal doit répondre aux questions suivantes :
13 Roch Larabie est-il un plaignant au sens de l'article 238 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions?
14 Si oui, a-t-il été opprimé par la conduite ou les décisions de 3917592 Canada inc. ou de Jacques Beauregard?
15 S'il y a eu oppression, quelle est la sanction appropriée?
16 Quelle est la nature du contrat de travail intervenu entre les parties?
17 Le congédiement de Roch Larabie est-il justifié?
18 Si non, quels sont les dommages subits?
La preuve :
19 Jacques Beauregard est couvreur de toiture pendant près de 36 ans pour une société d'Ottawa.
20 En 2000, il gagne un important montant à la loterie et prend sa retraite.
21 Jacques Beauregard a deux fils, Stéphane et Sylvain, lesquels sont installateurs de gouttières pour une entreprise de l'Ontario. Chantal Guilbeault, la conjointe de Stéphane, travaille également dans le domaine de la vente et de l'installation de gouttières.
22 Jacques Beauregard décide d'investir une partie de ses gains de loterie dans une entreprise de vente et d'installation de gouttières, afin d'assurer des emplois à long terme à ses fils et à Chantal Guilbeault.
23 En mai 2001, il met donc sur pied une entreprise faisant affaires sous le nom de "Gouttières Millénium". Il achète des camions et des remorques à ses deux fils et fournit les équipements et le matériel nécessaires pour la fabrication et l'installation de gouttières. Les bureaux de la société se situent au sous-sol de la résidence de Jacques Beauregard et son garage sert d'entrepôt. Les débuts sont modestes mais l'entreprise progresse pendant l'été 2001.
24 Le 3 juillet 2001, Jacques Beauregard, avec l'aide du comptable Louis Leclair, incorpore la société 3917592 Canada inc. en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par action. Les statuts d'incorporation démontrent que Jacques Beauregard est le seul actionnaire et administrateur de la société. Il ne cache pas son intention de céder toutes ses actions dans la société à ses fils lorsqu'il le jugera opportun.
25 La société exerce ses activités dans la province d'Ontario et n'a pas de permis pour vendre et installer des gouttières au Québec, en raison des nombreuses exigences gouvernementales.
26 Dès le début, Jacques Beauregard investit dans la société 130 000,00 $ pour l'achat de matériel et d'équipements. Il gère l'entreprise, surveille les chantiers de construction et livre personnellement le matériel à ses installateurs. La société emploie alors deux vendeurs et bénéficie des services de deux équipes d'installateurs composées chacune de trois travailleurs. Elle possède l'équipement nécessaire pour satisfaire à la demande et le matériel requis est acheté à chaque semaine.
27 L'automne 2001 amène un ralentissement des affaires dans ce domaine saisonnier.
28 Roch Larabie possède une expérience de près de 15 ans dans la vente et l'installation de gouttières. Il travaille pendant de nombreuses années à titre de sous-traitant pour diverses sociétés. Depuis cinq ou six ans, il vend de porte à porte les produits proposés par les "Gouttières Régionales" d'Ottawa. Il est rémunéré à commission et reçoit entre 15 % et 25 % de ses ventes. Sa déclaration d'impôt pour l'année 2000 démontre un revenu annuel brut de 93 147,79 $ et un revenu net, après dépenses, de 37 114,40 $. En 2001, il déclare un revenu brut de 95 431,59 $ et un revenu net après dépenses de 30 822,49 $.
29 Roch Larabie n'a pas d'expérience en gestion d'entreprise et de personnel. Il n'a pas de connaissance particulière en marketing ni en informatique.
30 Le requérant et Chantal Guilbeault se connaissent depuis quelques années puisque les deux sont compétiteurs dans le domaine de la vente des gouttières à Ottawa. Selon le requérant, Chantal Guilbeault communique avec lui en mars 2002 pour lui offrir de travailler pour "Milliénium". Il prétend que celle-ci l'appelle à plusieurs reprises, malgré ses refus répétitifs de considérer cette proposition. Cette prétention est contredite par Chantal Guilbeault, laquelle prétend plutôt que c'est Roch Larabie qui l'appelle pour solliciter un entretien avec Jacques Beauregard.
31 Selon la version du requérant, c'est en raison de l'insistance de Chantal Guilbeault qu'il consent à discuter d'un emploi avec Jacques Beauregard. La première rencontre a lieu au début de mars 2002. À cette occasion Jacques Beauregard se montre très intéressé à obtenir les services du requérant. Il lui demande de laisser son emploi chez "Gouttières Régionales" pour se joindre à "Millénium".
32 Selon Roch Larabie, les parties discutent alors de ses conditions d'emploi. Il demande un salaire de base, des actions dans la société et une option d'achat pour en acquérir d'autres éventuellement. Il constate que l'entreprise n'est pas structurée et nécessite une période de ré-organisation, ce qu'il propose de faire. Les parties se quittent en promettant de se reparler.
33 À la mi-mars 2002, une deuxième rencontre a lieu à la résidence de Jacques Beauregard en présence de son épouse et de Chantal Guilbeault. Selon le témoin, Jacques Beauregard l'informe que la société 3917592 Canada inc. n'a pas de dettes et a une valeur de 300 000,00 $, montant d'argent personnellement investi par lui dans la société.
34 Roch Larabie propose de faire profiter la société de sa longue expérience dans le domaine de la vente des gouttières. Il promet également de structurer adéquatement la société, d'engager des installateurs et des vendeurs supplémentaires recrutés auprès de l'entreprise pour laquelle il travaille. Il exprime le désir de changer l'image commerciale de "Millénium", de superviser les employés et de gérer l'entreprise au jour le jour.
35 Jacques Beauregard accepte la proposition de Roch Larabie. Il lui demande de consacrer les premières semaines de travail à la réorganisation de la société, puis de vendre des gouttières de porte à porte comme il le fait présentement avec succès. Les objectifs de vente suggérés par Roch Larabie varient entre 500 000,00 $ et 1 000 000,00 $ par année.
36 Lors de cette seconde rencontre, Roch Larabie exprime ses exigences monétaires. Il veut un salaire de 2 000,00 $ par semaine ainsi que 30 % des actions du capital-actions de la société 3917592 Canada inc. Enfin, il désire bénéficier d'une option d'achat pour acquérir d'autres actions dans les années à venir.
37 Roch Larabie ne demande pas à voir le bilan d'ouverture de la société ni les états financiers de celle-ci. Il comprend des représentations de Jacques Beauregard, que la société à une valeur marchande de 300 000,00 $, montant investi par celui-ci dans son entreprise. Le requérant conclut par le fait même, que son exigence de détenir 30 % du capital-actions de la société lui procure un avantage immédiat de 90 000,00 $. Roch Larabie est d'opinion que sa participation dans l'entreprise assurera son avenir financier.
38 Les parties mettent un terme à la rencontre sans qu'il n'y ait d'accord quant aux propositions formulées par Roch Larabie.
39 En prévision d'une troisième rencontre avec Jacques Beauregard, Roch Larabie demande au notaire Jean Lafrenière de préparer un document reflétant ses exigences d'acquérir des actions du capital-actions de la société 3917592 Canada inc.
40 Le notaire prépare un écrit intitulé "entente". Ce document contient le texte suivant : * Il est convenu entre les parties que Jacques Beauregard s'engage à céder à Roch Larabie trente pour cent (30 %) des actions ordinaires et votantes de la compagnie 3917592 Canada inc., la considération étant l'expertise qu'apportera à la compagnie la venue de Roch Larabie. * Il est convenu qu'il y aura entre les actionnaires de la Compagnie une convention laquelle stipulera, entre autres, qu'en tout temps il n'y aura que deux (2) administrateurs pour ladite corporation dont l'un sera Roch Larabie. * Il est convenu que Roch Larabie bénéficiera d'une option d'acheter un autre quinze pour cent (15 %) des actions de la compagnie à un prix à être déterminé entre les parties (ledit prix ne devant jamais excéder la valeur aux livres desdites actions), et ce pour un terme de cinq (5) ans de la date des présentes.
41 À la suggestion de Jacques Beauregard, la troisième rencontre a lieu au bureau du comptable de l'entreprise, Louis Leclair. Après discussions et négociations, le document préparé par le notaire est signé le 21 mars 2002 par Roch Larabie et Jacques Beauregard. Chantal Guilbeault agit à titre de témoin et Louis Leclair atteste de la signature des parties.
42 Selon Roch Larabie, Louis Leclair est mandaté par les parties pour préparer une convention entre actionnaires. Le comptable demande un délai variant entre 3 à 6 mois pour compléter le document.
43 Lors de cette rencontre, Jacques Beauregard accepte de payer un salaire de 2 000,00 $ par semaine à Roch Larabie pour la période de restructuration de l'entreprise. Après ce délai, le requérant devra vendre des gouttières et réaliser ses objectifs de vente estimés à près d'un million de dollars par année.
44 Jacques Beauregard a une version bien différente de celle de Roch Larabie sur les circonstances menant à son embauche et à la signature de l'entente du 21 mars 2002.
45 L'intimé raconte que dès le début de l'année 2002, Chantal Guilbeault l'informe que Roch Larabie, un vendeur de gouttières à l'emploi de la société "Gouttières Régionales" d'Ottawa, l'appelle pour lui offrir ses services. Il désire rencontrer le propriétaire de "Millénium" afin de lui faire une proposition. Jacques Beauregard informe Chantal Guilbeault qu'il n'est pas intéressé à discuter avec Roch Larabie. Il gère son entreprise familiale et est satisfait de sa progression. Il n'entrevoit pas de croissance rapide des affaires et ne cherche pas à concurrencer les gros joueurs du domaine de la vente de gouttières, dont "Gouttières Régionales" d'Ottawa.
46 En mars 2002, Roch Larabie communique à nouveau avec Chantal Guilbeault. Il désire toujours s'entretenir avec Jacques Beauregard. Informé de cet appel, Jacques Beauregard maintient sa position.
47 Le 15 mars 2002, Roch Larabie croise Jacques Beauregard au hasard. Le requérant insiste tellement pour lui parler qu'un rendez-vous est fixé au lendemain soir, à la résidence de l'intimé.
48 Selon Jacques Beauregard, Roch Larabie se présente à son domicile le 16 mars 2002 à l'heure convenue. La rencontre est d'une durée d'environ trois quarts d'heure. Le requérant expose son expérience de travail dans le domaine de la vente et de l'installation de gouttières. Il offre de travailler pour la société "Millénium" et se dit prêt à abandonner son emploi actuel pour faire progresser la jeune entreprise de Jacques Beauregard.
49 Le témoin explique à Roch Larabie que la société est formée dans le but de fournir du travail à ses fils et à Chantal Guilbeault. Il désire un jour leur céder la direction de l'entreprise ainsi que toutes les actions du capital-actions de celle-ci.
50 Roch Larabie insiste sur ses qualités de vendeur et fait miroiter à Jacques Beauregard sa capacité de vendre pour près d'un million de dollars de gouttières par année. De plus, il prétend pouvoir réorganiser et restructurer l'entreprise afin qu'elle soit concurrentielle. Il propose de gérer la société et d'obtenir la licence nécessaire pour que "Millénium" fasse affaires dans la province de Québec.
51 Selon Jacques Beauregard, les parties se quittent sans discuter de la situation financière de la société, ni de son chiffre d'affaires, ni du montant investi par son seul actionnaire. Par contre, à la fin de la rencontre, Jacques Beauregard convient de réfléchir à la proposition de Roch Larabie et de l'informer de ses intentions.
52 Durant les jours suivants Roch Larabie communique à nouveau avec Chantal Guilbeault pour connaître la réponse de Jacques Beauregard.
53 À la demande de Jacques Beauregard, une deuxième rencontre a lieu entre les parties le 19 mars 2002. L'épouse de l'intimé et son frère sont alors présents.
54 Lors de cette rencontre, Roch Larabie exhibe à Jacques Beauregard le document préparé par le notaire Lafrenière. Après en avoir pris connaissance, l'intimé le met de côté. Il n'est pas prêt à discuter de la vente ou de la cession d'actions de son entreprise avec le requérant.
55 Par contre, il écoute attentivement les représentations de Roch Larabie. Celui-ci vend entre 1 000 000,00 $ et 1 200 000,00 $ de gouttières par année. Il estime que pour le reste de l'année 2002, il pourra vendre 800 000,00 $ de produits.
56 Roch Larabie parle à nouveau de sa capacité d'intéresser trois équipes d'installateurs et de vendeurs de chez "Gouttières Régionales" à se joindre à "Millénium".
57 Le requérant propose à nouveau la restructuration de la société et insiste sur sa capacité à gérer les affaires de "Millénium".
58 Jacques Beauregard convient de parler de cette proposition à ses enfants et de recommuniquer avec le requérant. La preuve démontre que Jacques Beauregard prend sa décision sans en informer ses fils.
59 Le 21 mars 2002, Jacques Beauregard a rendez-vous avec son comptable Louis Leclair pour discuter d'un autre sujet.
60 Roch Larabie, qui communique régulièrement par téléphone avec Chantal Guilbeault, est alors invité à se présenter chez Louis Leclair pour continuer les négociations.
61 Lors de cette rencontre, Jacques Beauregard explique à Louis Leclair, lequel ignore tout des discussions entre les parties, que Roch Larabie veut se joindre à la société. L'entente préparée par le notaire est alors remise au comptable. Louis Leclair est surpris de la rapidité avec laquelle Jacques Beauregard désire céder à Roch Larabie des actions dans le capital-actions de la société nouvellement formée.
62 Louis Leclair exprime l'opinion qu'on ne promet pas de céder des actions à un étranger sans que celui-ci ne fasse ses preuves et apporte à l'entreprise ce qu'il promet de réaliser. Jacques Beauregard est d'accord. Il informe Roch Larabie que 30 % des actions lui seront cédées si, dans les 3 à 6 mois du début de son emploi, il structure la société et vend des gouttières pour le montant estimé lors des discussions.
63 Selon Jacques Beauregard, il cèdera au requérant des actions du capital-actions de 3917592 Canada inc. à la condition que ses deux objectifs soient rencontrés. Les documents de transfert des actions et la convention entre actionnaires seront alors rédigés. Les parties signent l'entente préparée par le notaire, puisque Jacques Beauregard et Louis Leclair l'interprètent comme une promesse de céder 30 % des actions ordinaires et votantes de la société à Roch Larabie, conditionnellement à ce que celui-ci apporte à la société son expertise. Pour Jacques Beauregard et son comptable, cette expertise repose sur les capacités de Roch Larabie de bien gérer l'entreprise, de la réorganiser et de vendre des produits de gouttières selon l'objectif qu'il s'est lui-même fixé.
64 Jacques Beauregard accepte de payer 2 000,00 $ par semaine à Roch Larabie pour le temps nécessaire à la restructuration de la société. Après cette période, Roch Larabie doit vendre des gouttières pour compenser ce que Jacques Beauregard considère être des avances sur commissions.
65 Les chèques de paye du 27 mars, du 3, 10, 17 avril et 9 mai 2002 sont faits à l'ordre de Roch Larabie. Puis à sa demande, les chèques du 24 avril et du 2 mai sont faits à l'ordre de "Entreprises et installations R.L.". Roch Larabie désire ainsi éviter les déductions à la source sur les montants payés. Il se considère dès lors comme un sous-traitant de l'entreprise.
66 Chantal Guilbeault corrobore en grande partie le témoignage de Jacques Beauregard. Elle connaît Roch Larabie depuis plusieurs années parce que tous les deux vendent des gouttières pour des entreprises concurrentes dans la région d'Ottawa. Par contre, leur relation est loin d'être amicale puisque Roch Larabie est un vendeur agressif et utilise la méthode forte pour écarter de son territoire les concurrents. C'est pour cette raison que Chantal Guilbeault, n'aurait jamais communiquée avec Roch Larabie pour lui offrir un emploi.
67 Elle est donc surprise lorsque Roch Larabie communique avec elle chez "Millénium" pour lui offrir de travailler pour cette société. Elle en parle à Jacques Beauregard, lequel n'est pas intéressé à rencontrer Roch Larabie. Lorsque le requérant communique à nouveau avec elle par téléphone, il est informé de la réponse donnée par Jacques Beauregard.
68 Roch Larabie se montre insistant au téléphone et informe Chantal Guilbeault qu'il s'apprête à quitter son emploi chez "Gouttières Régionales" pour laquelle il vend annuellement pour 1 200 000,00 $ de gouttières. Chantal Guilbeault transmet à Jacques Beauregard ces informations financières. Ils sont donc en mesure d'évaluer le revenu annuel brut du requérant à 100 000,00 $, en fonction des commissions payées dans ce domaine sur les ventes effectuées.
69 Selon Chantal Guilbeault, la première rencontre a lieu le 16 mars 2002 chez Jacques Beauregard. Elle est présente et écoute Roch Larabie raconter ce qu'elle sait déjà, c'est-à-dire qu'en vertu des ventes effectuées son revenu annuel brut est de 100 000,00 $ par année. Il est bon vendeur et peut donc augmenter considérablement le chiffre d'affaires de "Millénium".
70 À la fin de la rencontre, Jacques Beauregard informe Roch Larabie de son intention de réfléchir à sa proposition.
71 Dans les jours suivant, Roch Larabie ne cesse d'appeler Chantal Guilbeault. Il est donc convenu de le rencontrer chez Louis Leclair le 21 mars 2002.
72 Selon Chantal Guilbeault, c'est lors de cette rencontre que le document préparé par le notaire Lafrenière est exhibé à Jacques Beauregard et à Louis Leclair. Le comptable émet alors l'opinion que le document n'engage en rien Jacques Beauregard puisque l'entente est conditionnelle à la réalisation par Roch Larabie de la restructuration de l'entreprise et de l'atteinte de ses objectifs de vente. Le document est donc signé sans méfiance.
73 Louis Leclair témoigne des propos tenus par les parties lors de la rencontre à son bureau en mars 2002. C'est à cette occasion qu'il apprend pour la première fois, l'intérêt manifesté par Jacques Beauregard d'engager Roch Larabie et d'éventuellement lui céder des actions dans son entreprise. Lors de cette rencontre, on lui exhibe le document préparé par le notaire Lafrenière. Il conseille alors à son client de signer le document, puisque celui-ci reflète l'intention de Jacques Beauregard de céder éventuellement des actions à Roch Larabie après une période d'essai évaluée entre 3 et 6 mois. Louis Leclair est d'opinion qu'un transfert immédiat des actions sans condition est prématuré et désavantage Jacques Beauregard.
74 Lors de cette rencontre, les parties conviennent également de la rédaction d'une convention entre actionnaires laquelle ne sera préparée et signée qu'après la période de probation accordée à Roch Larabie.
75 Le 21 mars 2002, Roch Larabie ne pose aucune question à Louis Leclair au sujet de la situation financière de la société. Il ne demande pas l'émission de certificat d'actions ni l'inscription de son nouveau statut au registre des actionnaires. D'ailleurs, s'il avait questionné Louis Leclair à ce sujet, il aurait alors appris que le bilan d'ouverture de la société n'était toujours pas préparé et que personne ne possédait le livre de compagnie de la société. Aucun certificat d'actions n'avait encore été émis au nom de Jacques Beauregard, ce qui démontre l'état embryonnaire de la mise sur pied de la société.
76 Le 22 mars 2002, Roch Larabie démissionne comme vendeur chez les "Gouttières Régionales" et se présente ensuite au bureau de "Millénium". Sylvain Beauregard est alors informé par son père que Roch Larabie se joint à l'entreprise à titre de vendeur. Jacques Beauregard présente le requérant à ses employés en les informant que celui-ci verra à la restructuration de la société et agira comme son bras droit. Aucune mention de son titre d'administrateur ou d'actionnaire de la compagnie n'est faite. Sylvain Beauregard est déçu de la décision de son père de confier ce poste à un étranger.
77 La première décision prise par Roch Larabie est de modifier la publicité de "Millénium" et de fournir à la société un nouveau logo. Les camions et les remorques de la société sont lettrés avec un nouveau "look" moderne et accrocheur. Il fait également imprimer de nouveaux dépliants devant servir de moyens de publicité.
78 Puis, Roch Larabie se rend chez "Les experts de la remorque de l'Outaouais" et achète deux remorques lesquelles devront être manufacturées sur mesure. L'une a une valeur de 14 000,00 $ et l'autre de 16 000,00 $. Ces remorques doivent servir à la venue de nouvelles équipes d'installateurs de gouttières chez "Millénium".
79 Roch Larabie achète également un nouveau camion de marque Ford F-150, ainsi que deux appareils pour fabriquer les gouttières d'une valeur de 13 000,00 $ chacun. Après avoir fait l'inventaire du matériel disponible, il achète pour 22 000,00 $ de rouleaux d'aluminium servant à la confection de gouttières.
80 Roch Larabie s'attaque également au recrutement d'installateurs et de vendeurs. Selon lui, il recrute les installateurs suivants : Stéphane Amyot, Stéphane Galipeau et Patrick Dubeau. Il engage également à titre de vendeur Doug Spencer. Il forme ces personnes et dirige le personnel.
81 Le requérant divise la région d'Ottawa en territoires et les attribue à ses équipes de vendeurs et d'installateurs.
82 Selon Roch Larabie, il suggère à Jacques Beauregard d'acheter un local commercial pour exploiter la société. C'est ainsi que le 29 avril 2002, 3917592 Canada inc. se porte acquéreur des anciens entrepôts de "Gouttières Leblond", laquelle a fait faillite quelque temps auparavant.
83 Roch Larabie achète un nouveau système téléphonique pour l'entreprise auprès d'une société dont il connaît le propriétaire. Il fait également l'acquisition d'un nouveau logiciel de gestion d'entreprise et il engage une réceptionniste. Il demande également à sa conjointe, Kathleen Swanson, de procéder à l'entrée des données-comptables à l'ordinateur.
84 Roch Larabie prétend être actionnaire de 3917592 Canada inc. Il fait donc des démarches auprès de l'institution bancaire de l'entreprise pour être autorisé à signer conjointement les chèques avec Jacques Beauregard. Il fait imprimer des chèques nécessitant deux signatures.
85 Puisque que Roch Larabie désire voir la société faire affaires dans la province de Québec, il demande à Mélanie Hakim, la fille de la conjointe de Louis Leclair, laquelle travaille à son bureau, de préparer les documents nécessaires à l'obtention d'une licence de la Régie du bâtiment du Québec. Il l'informe qu'il est actionnaire de la société. Le 29 avril 2002, une déclaration modificative des personnes morales est déposée au Registre des entreprises par Mélanie Hakim. Ce document indique que Roch Larabie est actionnaire de la société au même titre d'ailleurs que celui que s'attribue Mélanie Hakim. Louis Leclair ignore tout de l'existence de ces documents et n'en découvre la teneur qu'après le congédiement de Roch Larabie.
86 C'est d'ailleurs pour cette raison que, le 2 juin 2003, Louis Leclair complète une déclaration modificative afin d'enlever les noms de Roch Larabie et de Mélanie Hakim à titre d'actionnaires de 3917592 Canada inc.
87 Jacques Beauregard constate rapidement que le style de gestion de Roch Larabie lui déplait. D'abord ses employés, ses fils et Chantal Guilbeault se plaignent du comportement peu respectueux de Roch Larabie. De nombreuses engueulades surviennent entre le requérant et les fils de Jacques Beauregard. Roch Larabie n'hésite pas à lever le ton lorsqu'il demande aux travailleurs d'effectuer certaines tâches. Le requérant dirige l'entreprise sans se préoccuper de l'opinion de qui que ce soit, ce qui rend l'atmosphère de travail tendue.
88 Jacques Beauregard constate également que Roch Larabie dépense des montants importants pour l'achat de matériel roulant et d'équipements sans jamais être consulté. Jacques Beauregard se plaint de toujours être placé devant un fait accompli.
89 C'est ainsi que Jacques Beauregard apprend l'achat non pas de deux mais bien de trois remorques de "L'expert de la remorque", après que Roch Larabie les eût commandés. De plus, ces trois remorques ont une valeur de 18 000,00 $ chacune. Jacques Beauregard n'a pu annuler la vente puisque ces remorques ont été manufacturées spécialement pour les besoins de l'entreprise spécialisée dans la vente de gouttières.
90 La décision d'acheter deux appareils pour confectionner les gouttières, au coût de 12 000,00 $ chacun, est également prise sans consultation avec Jacques Beauregard.
91 Jacques Beauregard avise Roch Larabie à plusieurs reprises de cesser d'investir des montants importants dans des dépenses inutiles sans son approbation. "Millénium" ne dispose à l'époque que de deux équipes d'installateurs, lesquelles possèdent chacune un camion, une remorque et un appareil pour confectionner les gouttières. Les autres achats effectués par Roch Larabie sont en prévision de la venue chez "Millénium" de d'autres équipes d'installateurs ce qui ne se fera jamais.
92 Jacques Beauregard avertit Roch Larabie de cesser de dépenser l'argent de la société sans son accord. Malgré ces avertissements, Roch Larabie dépense en quelques semaines 130 000,00 dont 22 000,00 $ de produits d'aluminium servant à confectionner les gouttières, alors que les besoins de "Millénium" sont d'environ 5 000,00 $ par semaine.
93 Jacques Beauregard reproche également à Roch Larabie d'avoir engagé la société "Guitel" pour procéder au changement du système téléphonique de l'entreprise, alors qu'il avait déjà consenti un contrat à la société "Bell". Jacques Beauregard est d'ailleurs étonné de constater que le nouveau système téléphonique installé selon les directives données par Roch Larabie ne lui permet pas de faire des appels interurbains de son bureau.
94 Jacques Beauregard n'est pas consulté par Roch Larabie lorsqu'il décide de modifier le lettrage des camions et des remorques. Tout est fait au goût du requérant sans consultation. De plus, ce n'est que par hasard que Jacques Beauregard apprend de son institution bancaire la demande de Roch Larabie d'exiger une double signature au compte de banque de la société et l'impression des chèques reflétant ses intentions.
95 Jacques Beauregard contredit également le témoignage de Roch Larabie sur les démarches entreprises pour acheter l'entrepôt de la faillite de "Gouttières Leblond". Il affirme chercher depuis près d'un an un entrepôt situé à Ottawa pour abriter la société "Millénium". Il juge sa résidence familiale inadéquate pour continuer à desservir sa clientèle ontarienne.
96 Depuis plusieurs mois, Jacques Beauregard fait donc la tournée des parcs industriels avec son frère pour trouver un emplacement approprié pour exploiter son entreprise. C'est lui qui trouve l'emplacement et non Roch Larabie à qui il demande, par contre, de visiter l'immeuble avant son achat.
97 Jacques Beauregard ignore également les démarches de Roch Larabie pour obtenir la licence nécessaire pour l'exercice des activités de "Millénium" au Québec. Il ignore les déclarations faites à Mélanie Hakim à l'effet qu'il est actionnaire de la société.
98 Jacques Beauregard affirme d'ailleurs que Roch Larabie n'a pas engagé de nouveaux installateurs ni des vendeurs. Ceux qu'ils nomment à l'audience étaient déjà à l'emploi de "Millénium" ou ne sont pas restés au service de la société en raison du comportement de Roch Larabie.
99 Dès l'arrivée de Roch Larabie chez "Millénium", certains employés avisent Jacques Beauregard qu'ils ne travailleront pas sous la gouverne du requérant. Claude Dumas, vendeur de gouttières d'expérience, refuse de se rapporter à Roch Larabie. Il désire traiter directement avec Jacques Beauregard, et non avec son bras droit qu'il considère agressif et non respectueux. Le témoin raconte d'ailleurs avoir été victime de menaces de voies de fait de la part de Roch Larabie lorsque celui-ci travaillait pour "Gouttières Régionales" quelques années auparavant.
100 L'arrivée de Roch Larabie chez "Millénium" engendre également un conflit entre le requérant et les fils de Jacques Beauregard. Sylvain Beauregard est témoin de propos tenus par Roch Larabie à des tiers à l'effet d'avoir investi 400 000,00 $ dans l'entreprise dont il est le patron. Sylvain Beauregard est témoin de l'arrogance de Roch Larabie et du ton utilisé à l'endroit des employés pour les diriger. D'ailleurs, à plus d'une reprise, des employés s'adressent à Sylvain Beauregard pour se plaindre du comportement de Roch Larabie.
101 La relation entre Stéphane Beauregard et Roch Larabie est également très tendue. Stéphane Beauregard perçoit un rapprochement entre sa conjointe Chantal Guilbeault et Roch Larabie. La tension entre les deux hommes est palpable à un point tel que Jacques Beauregard intervient et demande à Chantal Guilbeault de quitter l'entreprise pendant quelques semaines afin de lui permettre de régler la situation.
102 Jacques Beauregard prend alors la décision de congédier Roch Larabie. Il constate que ses fils, Chantal Guilbeault, ses autres employés et lui-même ne peuvent travailler en harmonie avec Roch Larabie. Le style de gestion de celui-ci n'est pas approprié à l'entreprise familiale mise sur pied par Jacques Beauregard. Le fait de n'être jamais consulté par Roch Larabie lors de décisions importantes impliquant la santé financière de l'entreprise est inacceptable. Le 7 mai 2002, Jacques Beauregard demande à Louis Leclair de rédiger une lettre de congédiement.
103 Cette lettre contient le texte suivant : * "Nous vous avisons par la présence(sic) que vos services auprès de Gouttières Millenium ne seront plus requit(sic) à partir de vendredi 10 mai 2002. Nous avons décidé de résilier l'entente de 21 mars 2002; et qu'il n'y aura pas de convention de mise en place pour vous lier à l'entreprise. * Cette décision est occasionné(sic) par le fait que nous(sic) n'avez pas apportez(sic) l'expertise que nous avions anticipé(sic). Au contraire votre courte période de participation n'a contribué rien de constructif; et n'a occasionné que du stress et des malaises auprès de l'entreprise et ces(sic) participants. * À partir de 10 mai, vous aller(sic) avoir a(sic) récupérer tout(sic) vos effets et seulement vos effets personnels ainsi que votre camion situé sur les lieux de l'entreprise. En contrepartie vous allez bien vouloir remettre les clés des locaux, les clés du camion que l'entreprise vous à(sic) confié et toutes autres propriété(sic) de l'entreprise en votre possession. * Dans ce contexte d'une situation déplorable, nous vous prions d'agréer nos meilleurs sentiments."
104 À la demande de son père, Sylvain Beauregard remet cette lettre en main propre à Roch Larabie le 9 mai 2002. Avant de quitter l'immeuble, le requérant s'approprie certaines données comptables de la société lesquelles ont depuis été remises à Jacques Beauregard.
La situation financière de la société 3917592 Canada inc.
105 En 2001-2002, Louis Leclair apporte à la société intimée l'appui comptable requis. Il prépare donc à la demande de Jacques Beauregard, le bilan d'ouverture de la société en date du 1er juillet 2001, l'état des produits et charges intérimaires pour la période du 1er juillet 2001 au 9 mai 2002 ainsi qu'un bilan intrimaireau 9 mai 2002.
106 Enfin, il prépare les états financiers intérimaires de la société pour l'exercice financier se terminant le 21 mars 2002.
107 Tous ces documents sont remis à Jacques Beauregard en juin 2002, soit après le congédiement de Roch Larabie. Celui-ci n'en reçoit aucun puisqu'il n'est pas actionnaire de 3917592 Canada inc.
108 Le bilan d'ouverture au 1er juillet 2001 indique que l'avoir de l'actionnaire est de 15 000,00 $. Pour plus d'explications, le document réfère le lecteur à la note numéro 4. Celle-ci mentionne que la société est autorisée à émettre un nombre illimité d'actions dans une seule catégorie d'actions. En date du document, 150 actions ordinaires ont été émises et payées pour un montant de 15 000,00 $.
109 Le document intitulé "État des produits et des charges intérimaires pour la période du 1er juillet 2001 au 9 mai 2002" indique une perte nette après impôt de 73 538,00 $. Le bilan intérimaire au 9 mai 2002 réfère à nouveau le lecteur à l'avoir de l'actionnaire. Le bénéfice non réparti du déficit d'opération de 73 538,00 $ fait alors partie de cette section du bilan intérimaire. Le total de l'avoir de l'actionnaire est donc de moins 58 538,00 $.
110 Le passif à court terme de l'entreprise indique un dû à l'actionnaire de 253 566,00 $. La note 3 à laquelle réfère le document indique l'inexistence d'une convention prévoyant les modalités de remboursement de la dette et le paiement des intérêts.
111 Les états financiers intérimaires et l'avis au lecteur pour l'exercice se terminant le 21 mars 2002 indiquent un dû à l'actionnaire de 161 576,00 $. Le total de l'avoir de l'actionnaire est de moins 25 617,00 $ et le déficit opérationnel de la société est de moins 40 617,00 $.
112 Alain Brassard est comptable général agréer. C'est lui qui prépare les états financiers de la société 3917592 Canada inc. en date du 30 juin 2002 et les états financiers au 30 juin 2003. Il témoigne que ces documents sont préparés à la demande de l'institution bancaire de la société 3917592 Canada inc. et que la préparation de ceux-ci nécessitent un avis au lecteur.
113 Dans l'accomplissement de son travail, Alain Brassard constate l'existence d'erreurs dans les états financiers intérimaires antérieurs. Il apporte donc les ajustements requis par la situation.
114 C'est pour cette raison que les états financiers au 30 juin 2002, indique un déficit d'exploitation de 133 721,00 $ à la fin de l'exercice financier. La société a un découvert bancaire de 93 122,00 $ et un emprunt bancaire de 75 000,00 $. On remarque également une augmentation du dû à l'actionnaire lequel est maintenant de 256 199,00 $.
115 Enfin, au 30 juin 2002, le bilan inclut la valeur du bâtiment commercial acheté par la société et reflète l'hypothèque immobilière de premier rang consenti sur celui-ci.
116 Les états financiers au 30 juin 2003 indiquent un déficit à la fin de l'exercice de 303 532,00 $. La perte nette pour la période est de 169 811,00 $.
117 Le découvert bancaire est alors de 283 557,00 $ et le dû à l'actionnaire augmente de 56 597,00 $. L'avoir déficitaire de l'actionnaire totalise donc 288 532,00 $. Jacques Beauregard a donc investi dans la société 3917592 Canada inc., 312 796,00 $ depuis le 1er juillet 2001.
118 Les argents investis par Jacques Beauregard dans l'entreprise sont considérés par Louis Leclair et par Alain Brassard comme un dû à l'actionnaire et ne sont pas capitalisés.
119 Louis Leclair explique que ce choix reflète celui de Jacques Beauregard, seul investisseur dans la société. Si la somme de l'investissement est capitalisée aux états financiers, l'actionnaire ne peut en demander le remboursement. Le choix de considérer ces argents à titre de dû à l'actionnaire est selon Louis Leclair le seul choix logique dans le contexte de la présente affaire. Jacques Beauregard prête à la société une partie importante des argents gagnés à la loterie et désire être remboursé par elle éventuellement. Ces montants ne peuvent donc pas être capitalisé sinon Jacques Beauregard risque de les perdre.
120 Alain Brassard est de la même opinion. Il est fréquent qu'un actionnaire qui investit dans une société désire reprendre son argent. Il ne voit aucun avantage pour Jacques Beauregard de considérer l'investissement sous forme de capitalisation. Ce choix, exercé en fonction des règles comptables applicables, peut défavoriser un actionnaire minoritaire puisque les résultats des états financiers et la santé financière de la société en sont modifiés. Par contre, le choix de l'actionnaire investisseur doit être respecté sinon les états financiers ne sont pas représentatifs de la situation réelle de l'entreprise.
121 L'expert comptable Alain Brassard constate qu'en vertu des données incluses aux états financiers, la valeur marchande des actions du capital-actions de 3917592 Canada inc. est actuellement à zéro puisque cette société est insolvable depuis sa fondation. La santé financière de la société n'est pas très bonne et à moins d'une reprise des affaires la valeur marchande des actions n'augmentera pas dans un avenir rapproché.
122 Pour démontrer que la décision de Jacques Beauregard l'opprime, Roch Larabie fait témoigner Michel Lessard, un expert comptable en fiscalité. Pour les fins de son témoignage, il prépare un tableau comparatif des bilans de 3917592 Canada inc., au 21 mars 2002, au 9 mai 2002, au 30 juin 2002 et au 30 juin 2003. Ces tableaux permettent au Tribunal de constater l'impact des décisions de Jacques Beauregard sur les états financiers de la société.
123 Lorsque les sommes investies dans la société par Jacques Beauregard sont capitalisées, l'avoir de l'actionnaire est majoré de ces montants et la dette réduite de la même somme.
124 Selon l'expert, la capitalisation est un choix judicieux pour intéresser des investisseurs dans l'entreprise car cette opération augmente la valeur marchande des actions.
125 Par contre, l'expert est d'opinion que le choix de prêter de l'argent à une société ou de la capitaliser est un choix personnel, lequel doit être respecté par le comptable de la société. La situation réelle de la société ne doit pas être faussée par les états financiers et si l'actionnaire ne désire pas renoncer au remboursement des argents investis, le comptable n'a d'autre choix que de les inclure à titre de dû à un actionnaire.
126 Bien entendu, lorsque l'investisseur renonce au remboursement de sa dette, cette situation est avantageuse pour l'actionnaire minoritaire.
127 Si les montants investis dans la société par Jacques Beauregard sont capitalisés, la situation financière de l'entreprise sera positive. Considérant le choix actuel de Jacques Beauregard, l'entreprise est déficitaire et la valeur de ses actions est à néant.
Le droit
128 Le recours en oppression est prévu à l'article 241 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Cet article précise ce qui suit : * 241. (1) Tout plaignant peut demander au Tribunal de rendre les ordonnances visées au présent article. * (2) Le Tribunal saisi d'une demande visée au paragraphe (1) peut, par ordonnance, redresser la situation provoquée par la société ou l'une des personnes morales de son groupe qui, à son avis, abuse des droits des détenteurs de valeurs mobilières, créanciers, administrateurs ou dirigeants, ou, se montre injuste à leur égard en leur portant préjudice ou en ne tenant pas compte de leurs intérêts. * a) soit en raison de son comportement; * b) soit par la façon dont elle conduit ses activités commerciales ou ses affaires internes; * c) soit par la façon dont ses administrateurs exercent ou ont exercé leurs pouvoirs.
129 Dans l'arrêt Lortie-Gagnon c. Entreprises M. Canada Abitibi inc.2, la Cour d'appel précise les conditions d'application de l'article 241 L.C.S.A. Elles sont décrites ainsi : * "La demande au tribunal doit venir d'un plaignant; * La situation doit avoir été provoquée par la société ou par la façon dont un administrateur exerce ses pouvoirs; * La société doit abuser des droits des détenteurs de valeurs mobilières, créanciers, administrateurs ou dirigeants; * Cet abus doit se réaliser par l'une ou l'autre des façons prévues aux sous-paragraphes a), b) et c);"
130 L'article 2 L.C.S.A. défini une valeur mobilière en ces termes : * "Action de toute catégorie ou série ou titre de créance sur une société, y compris le certificat en attestant l'existence."
131 Les pouvoirs du Tribunal siégeant en cette matière sont importants. Ils prévoient entre autre la possibilité d'émettre des valeurs mobilières (241(3d) L.C.S.A.) ou de rendre des ordonnances obligeant la société ou toute autre personne à racheter les valeurs mobilières d'un détenteur (241 (3f) L.C.S.A.). Ce sont là, d'ailleurs, deux des conclusions recherchées par le requérant dans la présente affaire. Le Tribunal bénéficie donc de la possibilité d'accorder au plaignant, le remède recherché en autant que celui-ci soit proportionnel à la conduite reprochée3.
132 L'auteur Me Paul Martel4 défini l'oppression de la façon suivante : * "La façon dont ses administrateurs exercent ou ont exercé leurs pouvoirs, a provoqué une situation qui a l'un ou l'autre des trois effets suivants envers un détenteur de valeurs mobilières, un créancier, un administrateurs ou un dirigeant : abuser de ses droits (oppression), porter injustement atteinte à ses intérêts (unfair préjudice), ou ne pas en tenir compte injustement (unfair disregard)"
133 L'auteur écrit : * "Le recours de l'article 241 est ouvert non seulement dans les cas d'abus des droits du plaignant, ce qui implique des éléments de dureté et de manque de probité et traduit l'expression anglaise "oppression", mais aussi, et c'est là que la loi fédérale a innové par rapport au droit anglais, dans les cas où, même en l'absence d'illégalité ou de fraude, il est porté atteinte à ces droits ou qu'il n'en est pas tenu compte. La version anglaise de la Loi utilise l'expression "unfairly", c'est-à-dire "injustement" ou "inéquitablement", pour décrire ces deux autres catégories de circonstances... Pour déterminer s'il y a ou non un "préjudice injuste", à réparer, le Tribunal doit s'efforcer de respecter un équilibre entre, d'une part la protection des intérêts du plaignant et, de l'autre, la liberté d'action des dirigeants de l'entreprise, et la latitude qu'ils ont de poser dans son intérêt des gestes qui affectent le plaignant ou ne tiennent pas compte de ses intérêts... Mais il faut également tenir compte d'un facteur dégagé de la jurisprudence... c'est-à-dire les "droits, attentes et obligations" entre individus qui ne doivent pas être submergés par la structure corporative. L'équité demande en effet que pèsent dans la balance les "attentes sous-jacentes" (underlying exceptations) des parties dans les petites entreprises. Ces attentes font partie des "intérêts" du plaignant qu'il faut sauvegarder. L'article 241 vise en effet à sauvegarder les "intérêts" du plaignant, et non pas uniquement et strictement ses droits."
134 Pour conclure à l'oppression d'un plaignant, il n'est pas nécessaire de constater la source de l'abus ou du traitement injustifié. Ce qui importe c'est le résultat et non l'intention malveillante d'en arriver audit résultat.
135 Selon une certaine jurisprudence, le Tribunal doit accorder au recours en oppression une interprétation large et libérale5.
136 Lors de l'analyse d'un tel recours, le Tribunal doit également ternir compte des attentes raisonnables du plaignant et des intimés6.
137 Enfin le congédiement injustifié d'un administrateur actionnaire et employé d'une société peut constituer de l'oppression dans certaines circonstances. Dans l'arrêt Baril v. Industries Flexart Ltée7, le Tribunal a jugé que le recours de l'article 241 L.C.S.A. peut être joint à un recours civil pour congédiement illégal.
138 Dans l'arrêt Bec v. Dumais8, le juge conclut à la conduite abusive de l'actionnaire majoritaire, lequel refuse d'émettre au plaignant 35 % des actions convenues dans son contrat d'engagement.
139 Dans l'arrêt 3416968 Canada Inc. et AmiPeleg v. Le Capitol de Québec Inc.9, la Cour d'appel précise que le recours en oppression ne doit être maintenu que si le requérant subit un préjudice découlant des gestes ou décisions des intimés. Dans cette affaire, les états financiers démontrant un déficit annuel, la Cour d'appel conclut que l'actionnaire minoritaire ne peut se plaindre d'oppression puisqu'il ne subit aucun préjudice financier.
Roch Larabie est-il un plaignant au sens de l'article 238 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions?
140 Avant d'analyser le bien-fondée de la présente requête, le Tribunal doit vérifier si le requérant est un "plaignant" au sens de l'article 238 L.C.S.A.
141 En effet, seul les personnes définies à cet article de la Loi, sont habilitées à intenter un recours en oppression.
142 L'article 238 L.C.S.A décrit le plaignant de la façon suivante : ""action" Action intentée en vertu de la présente loi. "plaignant" * a) Le détenteur inscrit ou le véritable propriétaire, ancien ou actuel, de valeurs mobilières d'une société ou de personnes morales du même groupe; * b) tout administrateur ou dirigeant, ancien ou actuel, d'une société ou de personnes morales du même groupe; * c) le directeur; * d) toute autre personne qui, d'après un tribunal, a qualité pour présenter les demandes visées à la présente partie."
143 L'option d'achat définie à l'article 2 L.C.S.A. est exclue de la définition de valeur mobilière. La sous-section de cet article précise ce qui suit : * "Option d'achat : L'option négociable par tradition ou transfert qui permet d'exiger la livraison d'un nombre précis de valeurs mobilières à un prix et dans un délai déterminés. Est exclu de la présente définition l'option ou le droit d'acquérir des valeurs mobilières de la société qui l'a accordé."
144 Dans l'arrêt Guénette v. Nurun Inc.10, le juge Pierre Tessier conclut que le recours en oppression n'est pas ouvert au détenteur d'une option d'achat d'actions lorsque celle-ci n'est pas eercée. Le bénéficiaire d'une telle option n'étant pas alors un plaignant au sens de la loi.
145 Pour en arriver à cette conclusion, le juge analyse les composante juridiques d'une option d'achat, d'une promesse unilatérale de contracter (1388 à 1397 C.c.Q.), de l'obligation conditionnelle (1497 à 1507 C.c.Q.) et de l'obligation à terme suspensif (1508 à 1517 C.c.Q.).
146 Ces distinctions sont importantes pour conclure aux droits des parties.
147 Dans la présente affaire, Roch Larabie prétend être détenteur d'une promesse de vente de 30 % du capital-actions de la société intimée laquelle est conditionnelle à son apport dans la société de son expertise. Selon lui, cette condition s'est réalisé lorsque la société intimée 3917592 Canada inc. l'a embauché à titre de gestionnaire.
148 Les intimés, pour leur part, prétendent que les conditions contenues à la promesse de vente consentie à Roch Larabie ne se sont jamais réalisées, puisque le requérant ne possédait aucune expertise dans le domaine de la gestion d'entreprise et de personnel et, de plus, il a été incapable de réaliser ses objectifs de vente.
149 Une promesse d'achat ou de vente peut être qualifiée d'unilatérale ou de bilatérale.
150 La distinction entre les deux sortes de promesse de vente, soit la promesse bilatérale par laquelle une partie s'engage à vendre un bien et l'autre s'engage à l'acheter et, la promesse unilatérale par laquelle une seule des parties s'engage à vendre ou à acheter un bien, a été analysée par Me Jacques Deslauriers11.
151 Celui-ci s'exprime ainsi sur la question : * "En pratique, il est facile de confondre une promesse unilatérale ou option, et une offre de vendre ou d'acheter. La promesse est un avant contrat, dont on verra les effets un peu plus loin. L'offre, au contraire, constitue un simple fait juridique."12
152 Et il ajoute : * "En conséquence, la promesse bilatérale ne crée aucun des effets de la vente : elle ne transfert par la propriété du bien, elle ne crée aucun droit réel permettant son inscription au registre foncier ou au registre des droits personnels et des droits réels mobiliers (art. 1397, al. 1 C.c.Q.)."13
153 Quant aux droits dévolus aux parties, Me Deslauriers ajoute : * "En présence d'un promettant récalcitrant, qui refuse ou néglige de conclure l'acte de vente et de délivrer le bien, le bénéficiaire dispose de la demande en passation de titre."
154 L'article 1497 C.c.Q. précise que les obligations contractées par les parties peuvent être conditionnelles lorsqu'on les fait dépendre d'un événement futur et incertain. Il est donc possible pour des co-contractants de négocier une condition suspensive aux obligations contractées.
155 Celui qui prétend avoir légalement droit à des actions peut intenter un recours en oppression puisque le refus de donner suite à une promesse de vente ou d'achat d'actions peut constituer en soi une oppression pour le créancier de l'obligation14.
156 D'ailleurs, Me Paul Martel15 précise qu'une personne ayant subi un préjudice aux mains d'une société serait à priori admissible à intenter le présent recours16.
157 Ainsi, le requérant en tant que bénéficiaire d'une promesse de vente d'actions peut intenter le recours pour oppression et demander au Tribunal de remédier aux effets de l'abus, si le refus des intimés de lui reconnaître le statut d'actionnaire fait partie de l'oppression elle-même.
158 Mais si le requérant ne peut prouver par prépondérance de preuve qu'il a droit aux actions revendiquées, le Tribunal devra alors conclure au rejet de son recours faute d'intérêt.
159 Le contrat intervenu entre les parties le 21 mars 2002 et dont le texte est reproduit au présent jugement ne nécessite pas d'interprétation. Il s'agit en effet d'une promesse de vente d'actions du capital-actions de la société intimée laquelle est conditionnelle à l'apport par le requérant de son expertise.
160 L'analyse de cette entente permet au Tribunal de constater que les parties ont contracté une promesse bilatérale au sens de l'article 1396 C.c.Q. Par contre, cette promesse ne crée aucun des effets de la vente. C'est pour cette raison que Roch Larabie demande au Tribunal de le déclarer propriétaire des actions de la société intimée. Il demande donc la passation de titre des actions promises.
161 Roch Larabie plaide qu'il a l'intérêt voulu pour exercer le présent recours puisqu'il apporte à la société ce qu'il a promis.
162 Pour sa part, Jacques Beauregard prétend que Roch Larabie n'a pas satisfait à ces conditions.
163 Roch Larabie se prétend actionnaire de la société dès la signature de l'entente intervenue entre les parties. Selon lui, c'est pour cette raison qu'il déclare à certains employés son statut d'administrateur de la société et que Jacques Beauregard le présente à tous comme son bras droit.
164 Il explique d'ailleurs les décisions financières prises au nom de la société par son nouveau statut d'actionnaire. C'est pour cette raison qu'il achète du matériel roulant et des matériaux afin que l'entreprise puisse progresser.
165 Roch Larabie considère également que les informations données à Mélanie Hakim, pour la rédaction des documents nécessaires à l'obtention d'une licence d'entrepreneur au Québec, corrobore son titre d'actionnaire. Les informations contenues à ces documents reflètent la nouvelle réalité. Il est actionnaire et administrateur de la société.
166 C'est également en vertu de cette croyance que Roch Larabie demande à l'institution bancaire de la société d'honorer uniquement des chèques sur lesquels apparaissent deux signatures. Il demande donc l'impression de nouveaux chèques nécessitant une double signature.
167 Roch Larabie prétend que dès les premières rencontres avec Jacques Beauregard, il manifeste son intention de devenir actionnaire de la société. Il s'agit là, pour lui, de la considération principale à l'entente rédigée à sa demande par le notaire Lafrenière.
168 Il justifie ce choix, en partie, par l'information obtenue de Jacques Beauregard que la société n'a pas de dettes en raison de son investissement de 300 000,00 $. Roch Larabie conclut donc rapidement que 30 % du capital-actions de cette société, lui vaut un avantage financier de 90 000,00 $.
169 Roch Larabie voit dans certains de ses agissements l'apport dans la société de son expertise. Le changement d'image de la société engendré par le lettrage des équipements roulants de l'entreprise avec un nouveau logo, le déménagement du siège social de "Millénium" dans un immeuble à Ottawa, l'embauche de personnel additionnel et l'achat de roulottes et d'appareils à confectionner des gouttières en prévision de l'arrivée de nouveaux installateurs sont des preuves de sa compétence dans la gestion de l'entreprise.
170 La formation du personnel et le partage en territoires des secteurs confiés aux vendeurs et aux installateurs constituent également une preuve de bonne gestion.
171 Par contre, Roch Larabie ne contredit pas le témoignage de Jacques Beauregard lorsque celui-ci affirme être tenu à l'écart des décisions prises par lui. Même les décisions qui impliquent des dépenses importantes pour la société ne sont pas l'objet de discussions entre lui et Jacques Beauregard. Il ne nie pas avoir été avisé par Jacques Beauregard de cesser de dépenser sans sa permission.
172 Pendant son témoignage, Roch Larabie fait également abstraction des relations tendues avec les autres employés de "Millénium" et surtout avec les fils de Jacques Beauregard. Il minimise les incidents avec ceux-ci et les attribue à la jalousie de Sylvain Beauregard.
173 Roch Larabie ne semble pas être préoccupé par la santé financière de l'entreprise. S'il l'avait été, aurait-il dépensé plus de 130 000,00 $ sans en discuter avec l'actionnaire majoritaire de l'entreprise? Il est surprenant que des dépenses aussi importantes soient faites sans que Roch Larabie ne vérifie la suffisance des fonds au compte de banque de la société. L'absence de discussion concernant la santé financière de l'entreprise avec Jacques Beauregard ou avec Louis Leclair permet plutôt de conclure que Roch Larabie savait qu'il ne détenait pas d'actions dans le capital-actions de la société 3917592 Canada inc dès la signature de l'entente.
174 Le document rédigé par le notaire Lafrenière est effectivement une promesse de vente conditionnelle à l'apport par Roch Larabie de sa capacité de gérer adéquatement l'entreprise et à sa capacité d'accroître le chiffre d'affaires de la société en vendant des produits pour des montants avoisinant le million de dollars par année.
175 Or, à l'audience, Roch Larabie admet n'avoir aucune expérience dans le domaine de la gestion d'entreprise et du personnel. Selon la preuve, il ne possède pas les qualités requises, ni les connaissances pertinentes pour restructurer la société "Millénium". Il ne possède pas le doigté nécessaire pour diriger les employés et est incapable de solutionner les conflits engendrés par sa présence au sein de cette entreprise familiale.
176 Son refus délibéré de consulter Jacques Beauregard à l'occasion de décisions importantes impliquant la santé financière de l'entreprise démontrent le peu de respect qu'il voue à son associé.
177 Le témoignage de Louis Leclair corrobore celui de Jacques Beauregard quant aux intentions de ce dernier, lors de la signature de l'entente intervenue entre les parties. Des actions seront cédées à Roch Larabie lorsque celui-ci aura démontré sa capacité de bien structurer la société et aura vendu les produits offerts par "Millénium" selon ses objectifs de vente.
178 C'est en raison de ces exigences que les parties discutent au bureau de Louis Leclair d'un délai variant entre 3 à 6 mois pour apprécier le travail proposé par Roch Larabie. Ce délai permettra alors à Jacques Beauregard d'évaluer la performance du requérant et de lui céder des actions dans la société, si le résultat est concluant.
179 Jacques Beauregard n'a d'ailleurs jamais considéré Roch Larabie comme actionnaire de la société. Lorsqu'il le présente à ses employés, il le qualifie de son bras droit et non d'actionnaire. Lorsqu'il informe ses fils de la venue dans l'entreprise de Roch Larabie, il ne leur dit pas que celui-ci est actionnaire.
180 Tous les gestes importants posés par Roch Larabie et qui impliquent son statut d'actionnaire sont faits à l'insu de Jacques Beauregard. Les déclarations faites à Mélanie Hakim, à l'institution bancaire de la société ou à des tiers, le sont toujours hors la présence et hors la connaissance de Jacques Beauregard.
181 L'historique de la mise sur pied de la société Millénium démontre que Jacques Beauregard désire céder le contrôle de la société à ses fils dans un avenir incertain. Il a investi près de 300 000,00 $ dans cette entreprise et il désire être remboursé de ses sommes lorsque la santé financière de la société le permettra. Ainsi, la promesse de céder 30 % des actions du capital-actions de "Millénium" à Roch Larabie ne peut se faire sans l'apport d'une contrepartie véritable et valable.
182 La lecture du document préparé par le notaire Lafrenière reflète les intentions des parties de soumettre le transfert des actions promises à la réalisation de certaines conditions. Ces conditions ne s'étant pas réalisées, les intimés n'avaient aucune obligation de transférer les actions promises à Roch Larabie.
183 La prépondérance de preuves démontre que Roch Larabie ne peut prétendre à la passation de titre des certificats d'actions promis puisqu'il n'a pas satisfait à ses obligations.
184 Roch Larabie n'est pas un actionnaire de la société intimée et il ne peut être qualifié de plaignant au sens de la L.C.S.A. Il ne peut donc pas prétendre être victime d'oppression.
185 La requête en oppression doit donc être rejetée.
Roch Larabie a-t-il été opprimé par la conduite ou les décisions de 3917592 Canada inc. ou de Jacques Beauregard?
186 Bien que le Tribunal rejette le présent recours pour les motifs déjà invoqués, il apparaît opportun de débattre de l'oppression découlant de la conduite des intimés.
187 Le choix exercé par Jacques Beauregard de considérer son investissement aux états financiers de la société comme un dû à l'actionnaire n'est pas opprimant en soi. Selon le témoignage des experts, ce choix est logique pour un actionnaire qui détient 100 % des actions du capital-actions d'une société et qui désire éventuellement être remboursé des montants avancés. De plus, les règles comptables exigent le respect aux états financiers du choix de l'actionnaire.
188 Jacques Beauregard a toujours voulu distinguer son capital financier personnel avec celui de la société. C'est pour cette raison qu'il demande à Louis Leclair d'incorporer une société.
189 Lorsque Jacques Beauregard prête 300 000,00 $ à l'entreprise dans les six premiers mois de sa formation, il n'a pas l'intention de perdre cet argent. Il désire être remboursé lorsque la santé financière de la société le permettra et n'a donc aucun avantage à capitaliser ces montants aux états financiers.
190 Bien entendu, ce choix affecte le résultat des états financiers. Par contre, il reflète celui du seul bailleur de fonds et actionnaire de la société. Ce choix lui est dicté par les circonstances entourant la formation de la société et non par l'embauche de Roch Larabie. "Millénium" est une entreprise familiale mise sur pied par Jacques Beauregard, dans le but d'avantager ses fils et non de défavoriser des actionnaires éventuels.
191 D'ailleurs, Jacques Beauregard n'a jamais manifesté le désir d'intéresser d'autres investisseurs dans la société. N'eut été des représentations de Roch Larabie, seul ses fils auraient eu droit aux actions du capital-action de la société.
192 Bien entendu, si le bilan d'ouverture de la société, les bilans intérimaires et les états financiers avaient été préparés avant le congédiement de Roch Larabie, l'argument de l'oppression n'aurait pu être invoqué en raison du choix légitime de Jacques Beauregard. Par contre, le retard dans la rédaction de ces documents ne permet pas à lui seul, de conclure à une décision abusive et opprimante.
193 Le fardeau de démontrer l'oppression repose sur les épaules de Roch Larabie, lequel ne s'en est pas déchargé. Les intimés n'ont pas abusé de leurs droits ni porté injustement atteinte aux intérêts et aux attentes de Roch Larabie. Le respect de l'équilibre entre la protection des intérêts du requérant et la liberté d'action du dirigeant de l'entreprise milite en faveur du rejet de la présente demande.
194 De plus, avant d'accueillir le présent recours, le Tribunal doit considérer le préjudice financier réel subit par le requérant. Or, les états financiers de l'entreprise n'en démontrent aucun. La valeur marchande des actions de la société intimée est à zéro et l'octroi d'actions à Roch Larabie ne lui aurait procuré aucun avantage financier.
195 L'évaluation faite par le requérant de la valeur des actions de la société n'est pas conforme à la réalité, ni aux états financiers. Roch Larabie, dans son analyse ne considère que l'investissement de Jacques Beauregard sans s'attarder au chapitre des dépenses de la société, lesquelles permettent de constater la précarité de la situation financière de la société intimée.
196 La conduite du dirigeant de la société et sa décision ne peut être qualifiée d'opprimante pour le requérant et le présent recours aurait été également rejeté pour ces motifs.
Le congédiement :
197 Le requérant est à l'emploi de 3917592 Canada inc. du 21 mars 2002 jusqu'à son congédiement survenu le 9 mai 2002.
198 Roch Larabie prétend qu'il est lié à la société 3917592 Canada inc. par un contrat de louage de services tel que mentionné aux paragraphes 14, 20 et 21 de sa demande introductive d'instance. Il plaide que cette entente est d'une durée de 5 ans soit la même période que celle consentie pour l'exercice de l'option d'achat d'actions contenue au contrat du 21 mars 2002.
199 Roch Larabie réclame donc des intimés des dommages évalués à 850 000,00 $, dont 500 000,00 $ à titre de perte de salaire, 250 000,00 $ pour troubles, tracas, inconvénients et dommages à sa réputation et frais professionnels engagés pour la reconnaissance de ses droits et 100 000,00 $ en dommages exemplaires pour les agissements et les comportements abusifs des intimés.
200 Les intimés plaident que l'entente les liant au requérant doit être qualifié de contrat d'entreprise ou de services (art. 2098 C.c.Q) et qu'ils peuvent donc y mettre fin en tout temps sans indemnité en vertu des dispositions de l'article 2125 C.c.Q.
201 Subsidiairement, ils plaident que si l'entente intervenue entre les parties est qualifiée de contrat de travail au sens de l'article 2085 C.c.Q., celui-ci est à durée indéterminée et l'employeur peut y mettre fin sans préavis pour un motif sérieux. Le comportement, l'attitude, l'incompétence de Roch Larabie et ses décisions financières prises sans consultation avec l'actionnaire majoritaire sont des motifs valables de congédiement.
Le droit :
202 Depuis l'entrée en vigueur du Code civile du Québec, le législateur apporte une distinction au vocabulaire utilisé pour définir les relations contractuelles entre employeur et employé. Ainsi lorsqu'un employeur engage un employé, la relation contractuelle sera qualifier de "contrat de travail" (2085 C.c.Q). Si par contre le travail est effectué par un travailleur autonome ou indépendant, le contrat sera alors qualifié de contrat d'entreprise ou de service en vertu de l'article 2098 C.c.Q.
203 Dans sa procédure introductive d'instance, Roch Larabie défini son contrat d'emploi de "contrat de louage de services". Ces termes ne sont plus utilisés depuis l'entré en vigueur du nouveau Code civil du Québec. Par contre, il faut conclure de sa plaidoirie qu'il demande au Tribunal de qualifier l'entente le liant aux intimés de contrat de travail à durée déterminée.
204 L'article 2085 C.c.Q17 défini le contrat de travail de la façon suivante : * Le contrat de travail est celui par lequel une personne, le salarié, s'oblige, pour un temps limité et moyennant rémunération, à effectuer un travail sous la direction ou le contrôle d'une autre personne, l'employeur.
205 Le contrat de travail est à durée déterminée ou indéterminée (art. 2086 C.c.Q). Le contrat à durée déterminée lie les parties jusqu'à son échéance18. La preuve de l'existence d'un contrat de service repose sur les épaules de celui qui l'allègue.
206 Le contrat d'entreprise ou de services se distingue du contrat de travail par l'autonomie accordée à l'employé pour exercer ses tâches. Ce genre de contrat couvre le domaine du travail pour autrui lorsqu'il est effectué par des travailleurs autonomes ou indépendants. L'entrepreneur ou le prestataire de services a alors le choix des moyens d'exécution du contrat et des outils. Il n'existe alors entre lui et le client aucun lien de subordination quant à son exécution. (2099 C.c.Q.)
207 L'article 2125 C.c.Q. prévoit la résiliation unilatérale du contrat par le client. Par contre, le client est alors tenu de payer à l'entrepreneur ou au prestataire de service, les frais et dépenses encourues ainsi que tout autre préjudice subi. (2129 C.c.Q.)
208 Enfin pour être qualifier de contrat de travail à durée déterminée, l'entente intervenue entre les parties doit être expresse et contenir suffisamment d'information pour permettre au Tribunal de conclure à l'intention des parties d'être liés par un tel contrat19.
209 La jurisprudence20 a établi les principes juridiques en cause lorsque l'employeur désire mettre fin à un contrat de travail. En voici, le résumé : * 1) l'employeur peut unilatéralement mettre fin au contrat de travail pour une cause raisonnable, sans qu'il lui soit nécessaire de donner un préavis à son employé; * 2) en cas de litige, l'employeur doit convaincre le juge de l'existence de cette cause raisonnable; * 3) en l'absence d'une cause raisonnable de congédiement, l'employeur peut aussi unilatéralement mettre un terme au contrat, mais à la condition cette fois de donner à son employé un avis de congé d'une durée raisonnable (délai - congé).
210 Tel que le rappel les auteurs Audet, Bonhomme, Gascon21, la définition la plus connue d'un motif raisonnable est celle du juge Tôth dans l'arrêt Chisholm v. Bossé, Charbonneau inc.22. Le juge écrit : * Qu'est-ce qu'un motif raisonnable justifiant le congédiement d'un employé sans avis? On considère généralement comme motif raisonnable une violation par l'employé d'une condition essentielle de son contrat de travail ou une conduite répréhensible dans ou à l'occasion de son travail. Il n'est pas possible de dresser un inventaire exhaustif des diverses causes de congédiement, celles-ci devant être considérées à la lumière de divers facteurs tels que l'importance du poste occupé, les degrés des fautes commises, la nature de l'emploi, etc. On retient comme motif de congédiement l'insubordination ou l'indiscipline grave, la négligence ou la paresse au travail, l'incompétence, la malhonnêteté, certains conflits d'intérêts, l'alcoolisme et l'usage de drogues, l'absentéisme, le manque au devoir de respect et autres semblables.
La preuve :
211 Dans la présente affaire, la preuve démontre que les parties concluent deux ententes distinctes, l'une écrite et l'autre verbale. La première concerne l'acquisition des actions du capital-actions de la société par Roch Larabie et un droit d'option pour une durée de 5 ans.
212 La deuxième entente concerne les conditions de travail négocié entre Jacques Beauregard et Roch Larabie. Cette entente constitue le contrat de travail liant les parties. Jacques Beauregard engage Roch Larabie à titre d'employé et le lien de subordination est présent. Roch Larabie ne discute pas avec Jacques Beauregard d'un contrat d'entreprise ou de service avec une société qu'il aurait mis sur pied. La considération principale du contrat de travail est la présence de Roch Larabie au sein de l'entreprise et l'apport de son expertise personnelle. C'est d'ailleurs pour cette raison que tous les chèques de payes émis par la société antérieurement au 24 avril 2002 sont faits à l'ordre de Roch Larabie.
213 Ce n'est qu'à compter du 24 avril 2002 et à la demande de Roch Larabie que les chèques sont alors faits à l'ordre de "Entreprises et installation R.L.". Le Tribunal ni voit là qu'un véhicule permettant au requérant de retirer certains bénéfices en vertu des lois fiscales mais non de l'octroi d'un contrat d'entreprise ou de service conclut avec la société de Roch Larabie.
214 La preuve prépondérante démontre qu'il existe entre les intimés et le requérant un lien de subordination suffisamment important pour rejeter la prétention des intimés qu'ils sont liés au requérant en vertu d'un contrat d'entreprise ou de service et qu'ils peuvent y mettre fin en tout temps sans indemnité.
215 Le Tribunal ne peut non plus accepter la prétention du requérant à l'effet qu'il est lié aux intimés en vertu d'un contrat de travail à durer déterminer.
216 En effet, il existe une distinction importante entre l'entente concernant l'acquisition des actions de la société et le droit d'option et le contrat de travail verbal intervenu entre les parties. La durée de ce contrat de travail verbal ne peut se présumer. Lors des négociations intervenues entre les parties, celles-ci n'ont jamais discuté de la durée de ce contrat. Jacques Beauregard demande à Roch Larabie de restructurer la société pendant quelques semaines et de vendre des produits de gouttières pour "Millénium" sans fixer un terme à l'entente.
217 La prétention de Roch Larabie que le contrat est à durée déterminée puisque l'option d'achat d'actions du capital-actions de la société est d'une durée de 5 ans, n'est pas conforme à la preuve prépondérante. Le droit d'option d'achat n'est pas une condition du contrat de travail intervenu entre les parties. Le statut d'actionnaire se différencie de celui d'employé et les deux ententes doivent être traitées séparément. La période accordée pour l'exercice de l'option d'achat ne peut s'interpréter comme tant la volonté des parties d'être liées par un contrat de travail d'une durée de 5 ans.
218 Ainsi le Tribunal conclut que le contrat de travail intervenu entre les parties est à durée indéterminée.
Les dommages :
219 L'article 2094 C.c.Q. prévoit qu'une partie peut, pour un motif sérieux, résilier unilatéralement et sans préavis le contrat de travail.
220 Les dommages découlant d'un congédiement sont compensés par l'octroi d'un délai de congé raisonnable, lequel doit tenir compte de différents facteurs dont la nature de l'emploi, les circonstances dans lesquelles il s'exerce et la durée de la prestation de travail. (2191 C.c.Q.).
221 Dans l'affaire Standard Broadcasting Corp. v. Stewart23, le juge Beaudoin écrit : * Le délai congé a essentiellement une vocation indemnitaire et a pour but de permettre à l'employeur de résilier le contrat et de trouver une autre personne pour le poste devenu vacant, et pour l'employé de lui permettre d'avoir un temps raisonnable pour se retrouver un emploi sans encourir de pertes économiques.
222 L'employé peut également prétendre à des dommages en raison du congédiement accompagné d'un comportement vexatoire, malicieux, empreint de mauvaise foi ou simplement d'une conduite abusive de l'employeur24.
223 La façon dont le congédiement a lieu, peut constituer un abus de droits rendant l'employeur passible de dommages-intérêts compensant le préjudice moral (l'angoisse, le stress, l'anxiété, l'humiliation, l'atteinte à la réputation).
224 Les dommages punitifs peuvent également être envisagés en raison du comportement abusif de l'employeur.
225 Après son congédiement, Roch Larabie souffre de dépression pendant environ deux mois. Il est incapable de se chercher un nouveau travail pendant cette période de temps sauf qu'il communique avec son ancien employeur "Gouttières Régionales" pour tenter de reprendre son travail de vendeur mais n'y parvient pas.
226 Lorsqu'il est suffisamment rétabli, Roch Larabie accepte un emploi pour la société "Toitures Raymond". Malheureusement, son inexpérience dans le domaine des revêtements de toiture lui est fatale. Il quitte après trois semaines de travail.
227 Enfin en 2002, il travaille pendant trois jours pour "Les entreprises Mirik", mais abandonne pour des raisons similaires à celles invoquées lors de son départ chez "Toitures Raymond".
228 La preuve démontre qu'en 2002, le revenu annuel brut du requérant est de 51 344,35 $ incluant un encaissement de ses REER de 9 000,00 $.
229 Le requérant reçoit également 6 554,75 $ d'une société qu'il incorpore pour l'installation de portes et fenêtres.
230 Roch Larabie se plaint également que le congédiement dont il a été victime a entaché sa réputation. Certains fournisseurs et employeurs refusent de lui parler sans par contre pouvoir préciser les raisons pour lesquelles ce comportement est adopté. Le requérant les attribue à la décision de Jacques Beauregard.
231 Roch Larabie a un train de vie élevé. Son congédiement lui occasionne des difficultés financières. En 2004, il vend sa résidence familiale pour la somme de 395 000,00 $. Cet immeuble a été construit en 2001 et le requérant l'évalue à 785 000,00 $. Après son congédiement, le requérant vend son bateau et ne peut faire ses paiements de location de ses deux motoneiges. Sa conjointe vend son véhicule et le couple cesse de voyager.
232 En 2003, le revenu annuel brut du requérant est de 34 774,00 $. La preuve est muette quant à ses revenus pour l'année 2004.
Les motifs du congédiement :
233 L'employeur met fin au contrat de travail consenti à Roch Larabie pour différentes raisons dont celles contenues à la lettre de congédiement du 7 mai 2001. À l'audience, Jacques Beauregard a pu exposer au Tribunal l'amplitude des reproches adressés à Roch Larabie.
234 Dès l'arrivée de Roch Larabie chez "Millénium", Jacques Beauregard constate rapidement que celui-ci ne possède aucune expérience utile lui permettant de structurer son entreprise de vente de gouttières. Il n'a aucune habilité pour gérer et diriger le personnel déjà en place et des conflits sont vites apparus au sein de l'entreprise familiale entre les fils de Jacques Beauregard, les vendeurs, les installateurs et Roch Larabie.
235 Jaques Beauregard déplore les décisions financières prises unilatéralement par Roch Larabie sans consultation. Le fait de ne pas être informé par le requérant des achats des remorques, des appareils à confectionner les gouttières et des matériaux sont inacceptables pour Jacques Beauregard. Bien qu'il avise Roch Larabie a quelques reprises de ne pas engager la responsabilité financière de la société sans le consulter, celui-ci continu de mettre en péril la santé financière de la société. La transgression de cette directive constitue de l'insubordination et de l'indiscipline grave justifiant le congédiement de Roch Larabie sans préavis.
236 De plus, l'exigence du requérant d'une double signature au compte de banque de la société sans en discuter au préalable avec Jacques Beauregard constitue une conduite répréhensible militant en faveur de son congédiement. Cette décision doit s'interpréter comme un geste déloyal envers son employeur et celui qui prétend être son associé, Jacques Beauregard.
237 L'ensemble du comportement de Roch Larabie, sa conduite, ses gestes et surtout de ses décisions à titre de directeur général de "Millénium" justifient la décision de l'employeur de le congédier sans prévis.
238 Tel que l'enseigne les auteurs Audet, Bonhomme et Gascon25 : * "bien que certaines fautes de l'employé, lorsqu'elles sont analysées individuellement, ne suffisent pas à justifier son congédiement, il est reconnu en jurisprudence que l'ensemble de ces fautes peut mener à un congédiement pour causes justes et suffisantes."
239 Le Tribunal est également d'opinion que le montant des dommages réclamés par le requérant est exagéré. En effet, seul un délai congé d'une durée raisonnable compte tenu de toutes les circonstances de la présente affaire aurait pu être accordé au requérant. Le court laps de temps pendant lequel, Roch Larabie a été à l'emploi de l'intimé aurait été un élément important dans l'appréciation de la durée du délai congé.
240 De plus, les circonstances de la présente affaire ne démontrent pas une conduite abusive de Jacques Beauregard lors du congédiement de Roch Larabie. La preuve prépondérante ne démontre pas une conduite répréhensive de l'employeur justifiant l'octroi de dommages-intérêts ou de dommages punitifs. La teneur de la lettre de congédiement en témoigne ainsi que les circonstances entourant le congédiement de Roch Larabie.
241 Ainsi, le congédiement du requérant est justifié par des motifs sérieux et sa demande en justice pour congédiement est rejetée.
242 POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
243 REJETTE la requête en oppression et en injonction;
244 REJETTE l'action pour congédiement illégal et abusif;
245 LE TOUT avec dépens.

Laviolette c. Prud'homme
JEAN-FRANÇOIS LAVIOLETTE, demandeur
c.
FRANÇOIS PRUD'HOMME, BIFFUSION.COM INC., défendeurs
Et
BIFFUSION.COM INC., demanderesse et JEAN-FRANÇOIS LAVIOLETTE, AMÉLIE HOULE, BOOM COMMUNICATION
INC., défendeurs solidaires
[2008] J.Q. no 10826
2008 QCCS 5108
J.E. 2008-2210
EYB 2008-149978
Nos : 500-11-029588-064, 500-17-035356-073
Cour supérieure du Québec
District de Montréal
L'honorable Robert Mongeon, J.C.S.
Entendu : 22, 23, 25 janvier 2008, 30 avril 2008.
Rendu : 4 novembre 2008.
(187 paragr.)
Corporatif — Compagnies — Recours — Contre la compagnie et les administrateurs — Oppression — Face à un différend apparemment banal, le comportement de Prud'homme, par lequel il a évincé Laviolette comme un simple employé, est suspect et hautement oppressif à l'endroit de ce dernier, associé actionnaire à 40 pour cent — La réclamation par la compagnie d'avances à Laviolette provoque une seconde inéquité puisque ces avances avaient été consenties parce que la compagnie ne pouvait verser de salaires réguliers — Recours accueilli — Loi canadienne sur les sociétés par actions, art. 241 et ss.
Rapports individuels de travail — Obligations de l'employé — Loyauté — Aucun véritable client de Biffusion.com, c'est-à-dire une personne ayant requis des services ou ayant accepté une offre de services de sa part, n'a été approché par Laviolette, sa collègue ou son nouvel employeur — Il ne suffit pas, pour qualifier une personne de "cliente" de lui adresser une offre de services non sollicitée qui demeure sans réponse ou sans acceptation formelle — Réclamation en maintien de l'ordonnance de sauvegarde et en dommages-intérêts rejetée — Code civil du Québec, art. 2088.
Recours en oppression et demande de dommages-intérêts par Laviolette contre Prud'homme et Biffusion.com (Biffusion) et demande par ceux-ci de remboursement d'avances, en dommages-intérêts et en injonction contre Laviolette, sa conjointe Houle et leur nouvel employeur, Boom Communication inc. (Boom) -- Fondateur et actionnaire unique de Biffusion, entreprise de création de sites web, Prud'homme a été rejoint par Houle à titre d'employée et par Laviolette, à qui il a vendu 40 pour cent de ses actions pour 56 000 $ -- Laviolette a reçu par la suite des avances plutôt qu'un salaire -- L'entreprise est devenue rentable -- Cependant, le couple formé par Laviolette et Houle a déplu à Prud'homme -- Un différend entre Prud'homme et Laviolette a surgi au sujet de la prise de décisions -- Une semaine plus tard, Prud'homme informait Laviolette que leur relation était brisée -- Perçue par Laviolette comme un congédiement, cette situation a donné lieu à son départ avec Houle, qui ont été engagés comme employés chez Boom -- DISPOSITIF : Recours en oppression accueilli; action de Biffusion accueillie en partie -- La notion d'oppression codifiée aux art. 241 et ss. Loi canadienne sur les sociétés par actions ne procède pas nécessairement de la responsabilité civile -- La question de savoir si Laviolette a démissionné ou a été congédié n'est pas déterminante -- Le comportement de Prud'homme face à un différend apparemment banal est suspect et hautement oppressif à l'endroit d'un associé actionnaire à 40 pour cent -- Le rachat des actions s'imposait, mais, en l'absence d'une convention d'actionnaires, il n'y avait aucun moyen pour Laviolette de forcer ce rachat -- La réclamation des avances provoque une seconde inéquité puisque ces avances avaient été consenties parce que Biffusion ne pouvait verser de salaires réguliers -- En matière de redressement, le Tribunal jouit d'un large pouvoir d'intervention -- Le rachat des actions de Laviolette par Prud'homme sera ordonné à un prix minimum de 56 000 $ plus un montant déterminé par expertise indépendante -- Les avances ne seront remboursables que sur le montant excédentaire -- Les seules réclamations de Biffusion accordées sont celles des coûts afférents aux véhicules utilisés par Laviolette après son départ -- Aucun véritable client de Biffusion n'a été approché par Laviolette, Houle ou Boom, qui n'ont donc causé aucune perte de profits à Biffusion -- Il n'est pas nécessaire, après un délai de plus de 24 mois, de maintenir en vigueur l'ordonnance provisoire à ceux-ci de respecter leurs obligations de loyauté.
Législation citée :
Code civil du Québec, art. 1619, art. 2088
Loi canadienne sur les sociétés par actions, L.R.C. (1985), c. C-44, art. 241, art. 241 et ss.
Avocats :
Me Jean-Philippe Asselin (Deveau Bourgeois), procureur de Laviolette, Houle, Boom dans les deux dossiers.
Me Marc-André Blain (Marchand Melançon Forget), procureur de Prud'Homme, Biffusion dans les deux dossiers.

JUGEMENT

INTRODUCTION
1 Le Tribunal est saisi de deux recours, un premier (500-11-029588-064) institué par Jean-François Laviolette (Laviolette) qui recherche un redressement sous forme de rachat de ses actions dans Biffusion.com inc. (Biffusion) suite à l'oppression que lui font subir la compagnie et son principal actionnaire François Prud'homme (Prud'homme). Le recours de Laviolette comprend aussi une demande de dommages-intérêts.
2 Pour les motifs ci-après exposés, le Tribunal est d'avis que Laviolette est effectivement victime d'oppression et son recours sera donc accueilli.
3 Le second recours (500-17-035356-073) est institué par Biffusion contre Laviolette, sa conjointe Amélie Houle (Houle) et leur nouvel employeur, Boom Communication inc. (Boom). Il s'agit d'une demande d'injonction visant à forcer Laviolette, Houle et Boom à respecter leurs obligations de loyauté et de non-utilisation de renseignements confidentiels appartenant à Biffusion. Cette demande est aussi assortie d'une demande de remboursement de certaines avances et en dommages-intérêts.
4 Pour les motifs qui suivent le Tribunal est d'avis que Biffusion n'a pas droit à l'injonction permanente demandée. Quant à la demande de remboursement des avances elle constitue, en fait et en droit un élément de l'oppression de Laviolette et sera traitée comme telle. Quant à sa demande de dommages-intérêts, il en est question plus spécifiquement ci-après.
5 Ces deux recours sont été entendus en même temps et sont basés sur la même trame factuelle. En fait, le recours de Biffusion.com inc. est plus de la nature d'une contestation et demande reconventionnelle du recours de Laviolette que d'un recours indépendant. C'est pourquoi le Tribunal analysera les deux dossiers comme s'il s'agissait d'un seul.
LES FAITS
a) La mise en situation
6 Laviolette et Prud'homme sont des amis. Ils se font confiance mutuelle. Ils deviendront des associés dans Biffusion et leur relation d'affaires durera de 2001 à 2006. Puis, suite à une mésentente somme toute assez mineure mais qui a pris des proportions considérables, Laviolette et Prud'homme s'affrontent aujourd'hui dans un débat judiciaire coûteux, qui aura raison de leur amitié, de leurs énergies et sans doute d'une bonne partie de leurs ressources financières. Le présent jugement mettra un terme à leur différend judiciaire mais ne pourra vraisemblablement pas réparer ce qui a été irrémédiablement brisé entre les deux.
7 Que s'est-il passé?
8 Tout d'abord, Prud'homme décide de fonder Biffusion au cours de l'année 2000.
9 Prud'homme innove alors dans le milieu de la création et le montage de sites web en créant une plate-forme qui permet au client de pouvoir accéder et modifier lui-même le site web créé par Biffusion. Cette plate-forme appelée "Suite Vox", aura semble-t-il un impact très positif sur la croissance de Biffusion.
10 Prud'homme est informaticien et gestionnaire. Il excelle dans la conception et la réalisation des systèmes et logiciels informatiques. C'est lui qui s'occupera du volet technique de l'entreprise. Lui seul, notamment, utilise la plate-forme "Suite Vox".
11 Laviolette est un vendeur-né. Il a beaucoup plus de qualités humaines que de connaissances techniques. Il a, préalablement à son association avec Prud'homme, travaillé dans le domaine de la vente, et lors du son association avec Prud'homme, il était en recherche d'emploi.
12 Laviolette se joindra à Biffusion au cours de l'année 2001. La relation avec Prud'homme est très bonne, à un point tel que ce dernier consent à lui céder 40 % de Biffusion pour la somme de 56 000 $. Laviolette croit alors devenir non pas seulement l'actionnaire de Biffusion mais aussi l'associé de Prud'homme. Leurs talents et expériences respectifs sont complémentaires. Chacun dans sa sphère d'activité apportera un élément essentiel à la croissance et au développement de Biffusion. Cependant, quoiqu'il en ait été question, aucune convention d'actionnaires n'est signée.
13 De 2001 à 2005, Prud'homme et Laviolette travaillent à monter l'entreprise. Ils y voient tous deux un potentiel financier important qui assurera leur avenir respectif.
14 Les opérations de Biffusion sont alors financées principalement par des avances (sous forme de prêts) importantes qui proviennent dans une large mesure de Prud'homme et, indirectement par l'apport de capital de 56 000 $ provenant de l'achat de 40 % des actions Biffusion par Laviolette. En effet, Laviolette n'achète pas ses actions du trésor de Biffusion mais de Prud'homme.
15 Fait important à noter : Prud'homme n'a pas investi de capital dans Biffusion. Il s'est approprié la totalité du capital-actions émis de Biffusion lors de sa fondation et les liquidités nécessaires à la recherche et au développement de la plate-forme "Suite Vox" ainsi qu'au paiement du salaire de Houle viendront sous forme de prêts. Ainsi, lorsque Biffusion commencera à générer des revenus, Prud'homme recevra des remboursements de prêts (non imposables) tandis que Laviolette recevra des revenus taxables ou encore des avances à un actionnaire. D'ailleurs, comme nous le verrons plus loin, le départ de Laviolette provoque une demande de Biffusion de rembourser le solde impayé de ces avances.
16 C'est le 17 septembre 2002 que Laviolette se porte acquéreur de 40 actions de catégorie "A" de Biffusion. Le prix de vente est versé à François Prud'homme en sa qualité de vendeur desdites actions (pièce P-2). Biffusion est partie à cette convention.
17 Tel qu'indiqué ci-haut, Biffusion n'a, au début, que peu de clients et peu de revenus. Prud'homme et Laviolette conviennent donc de travailler sans salaire afin de maximiser la progression de Biffusion.
18 Mais Biffusion est fortement endettée envers Prud'homme qui a avancé la quasi-totalité des sommes requises pour faire fonctionner l'entreprise, notamment envers le consultant externe qui travaille sur le logiciel de la plate-forme "Suite Vox".
19 Malgré cela, grâce au travail des deux associés, travail parfois non-rémunéré ou encore rémunéré bien en deçà de sa réelle valeur, entre 2001 et 2006, les ventes de Biffusion passent d'environ 50 000 $ annuellement à 400 000 $ annuellement. À la fin d'octobre 2006, toutes les dettes, incluant toutes les avances de fonds de Prud'homme ainsi que la totalité de la marge de crédit bancaire sont remboursées.
20 Des quatre ou cinq sites web conçus, réalisés et livrés à sa clientèle à la fin de 2001, Biffusion en a réalisé 148 à la fin de 2006 avec une quarantaine de sites en construction. Ces sites sont aussi hébergés sur le serveur de Biffusion et génèrent des revenus récurrents de près de 9 500 $ par mois en 2006 (de 435 $ par mois qu'ils étaient en 2001).
21 En 2001, Biffusion avait un carnet des soumissions transmises et en circulation auprès de clients potentiels dont la valeur était de moins de 15 000 $ alors qu'à la fin de 2006, la valeur des soumissions en circulation sont de l'ordre de 1 150 000 $1.
22 Ces chiffres démontrent sans équivoque que les actions de Biffusion n'ont certainement pas perdu leur valeur entre 2002 et 2006 et que les 56 000,00 $ investis par Laviolette en septembre 2002 valent au moins un montant égal et fort probablement substantiellement plus élevé lors de son départ en novembre 2006.
23 Voilà donc un bref aperçu de la croissance de Biffusion de 2001 à 2006, période durant laquelle Prud'homme et Laviolette travaillent ensemble, chacun dans son créneau de spécialité, à faire de Biffusion l'outil qui devrait leur faire gagner beaucoup d'argent et assurer leur sécurité financière pour les années à venir. Leur entente était alors que les deux associés retiraient de Biffusion un avantage financier équivalent, jusqu'à ce que la compagnie atteigne un certain seuil de rentabilité, au-delà duquel des profits devaient alors être répartis sur une base de 60 %/40 %.
24 Quant à Amélie Houle (Houle), elle se joint à Biffusion dès le début. Elle est employée à titre d'infographiste à compter du 23 avril 2001 peu de temps avant l'arrivée de Laviolette. Elle attribue la croissance de Biffusion dans une certaine mesure à l'arrivée de ce dernier, qui a su libérer Prud'homme de la responsabilité des ventes, ce qui lui a permis de poursuivre le développement de la plate-forme "Suite Vox".
25 Du témoignage combiné de Prud'homme et de Laviolette, le Tribunal note que Houle est un élément-clé de la progression de Biffusion de 2001 à 2006. Elle n'est qu'une employée salariée, sans responsabilités de gestion. Elle n'est pas, non plus, actionnaire. Néanmoins, elle démontre beaucoup de talents de création et de conception visuelle et graphique des sites web réalisés par Biffusion. Sans la qualité de son travail, les sites web réalisés ne se seraient pas aussi bien vendus et les résultats financiers de Biffusion n'auraient pas été les mêmes.
26 Autre détail digne de mention, c'est Prud'homme qui invite Laviolette à venir chez Biffusion. Les deux hommes sont alors des amis. Laviolette est même le parrain du deuxième enfant de Prud'homme.
27 La venue de Laviolette chez Biffusion comble chez ce dernier un désir de développer une entreprise qui lui apportera des revenus plus que simplement intéressants. C'est aussi le cas pour Prud'homme : les deux associés veulent devenir riches. Pour ce faire, ils travaillent d'arrache-pied, sans salaire. Prud'homme investit toutes ses ressources, hypothèque sa maison, etc. Laviolette fait de même. Les 56 000 $ qu'il investit dans le capital-actions représentent l'ensemble de ses ressources d'alors.
28 En posant un tel geste, Laviolette ne s'attend pas à être traité en simple employé. Il devient un associé de Prud'homme. Les profits de l'entreprise seront éventuellement partagés à raison de 60 % pour Prud'homme et 40 % pour Laviolette une fois que leur rémunération respective aura atteint 85 000 $ chacun. En attendant le jour où les résultats financiers de Biffusion le permettront, les deux associés se distribuent les profits sous forme de remboursements de prêts, d'avances à actionnaires et, dans une moindre mesure, sous forme de revenus imposables.
29 Que s'est-il passé pour que cette cohabitation professionnelle apparemment fort bien équilibrée entre un informaticien compétent, un bon vendeur et une infographiste de talent se termine par un échec brutal à la fin de 2006 et à l'institution de procédures judiciaires acerbes et fortement contestées de part et d'autre?
b) Les événements de 2005
30 L'année 2005 est fructueuse sur le plan financier. Sans rouler sur l'or, Prud'homme et Laviolette ont commencé à se verser des salaires2. Les chiffres de Biffusion sont de plus en plus encourageants et prometteurs.
31 Laviolette quitte alors sa conjointe. Il se retrouve célibataire.
32 À la fin octobre 2005, Laviolette et Houle décident de former un couple.
33 Sans que cette relation personnelle n'affecte leur performance ou n'ait d'impact sur la qualité de leur travail chez Biffusion, lorsque Prud'homme apprend la nouvelle, il est fort déçu et réagit très fortement. Il voit dans cette relation une violation de la confiance qu'il avait en Laviolette. Il a peur que cette relation n'affecte le rendement de ses deux employés. Il craint le conflit d'intérêt possible. Bref, il n'accepte pas la situation.
34 Selon Laviolette, une fois le choc de la nouvelle passé, les choses se calment et tout s'est mis à bien fonctionner. D'ailleurs, Biffusion connaîtra en 2006 une intéressante progression.
35 Amélie Houle dira que sa relation avec Laviolette n'a eu aucun impact négatif sur ses activités professionnelles mais que Prud'homme a effectivement fort mal réagi et a tenté de la décourager de poursuivre une telle relation. Elle ajoute qu'elle a "passé par-dessus" et que les choses se sont finalement calmées.
36 Prud'homme s'est toujours déclaré très satisfait du travail de Houle qu'il considère compétente et fiable. Mais son témoignage confirme son opposition à la relation qui s'est développée en 2005 entre ses deux "employés". Il sera fâché et blessé de ne pas avoir été mis au courant de cette relation par Laviolette. Il en sera, en fait informé par un tiers (son frère) ce qui ajoutera à sa frustration.
37 Il sera aussi préoccupé par le fait que selon lui, Laviolette a déjà eu plusieurs partenaires de vie et appréhende la situation éventuelle où lorsqu'un couple d'employés se défait, l'un des deux quitte forcément l'employeur. Cela le préoccupe.
38 Bref, il "se sent trahi". Il prétend que lui et Laviolette s'étaient mis d'accord de ne pas développer de relations personnelles avec "les employés", ... comme on dit ... "not to go fishing off the company's wharf"...
39 Selon Prud'homme, le fait que Laviolette lui ait caché sa relation jusqu'à ce que les deux conjoints décident de s'afficher au grand jour, constitue un bris de confiance.
40 Prud'homme explique, contrairement à l'opinion des deux autres, que cette relation a eu un impact négatif en ce qu'elle a créé des tensions au travail. 0 - il a noté une certaine "arrogance" chez Amélie Houle, qu'elle ne manifestait pas auparavant; 1 - il a aussi noté une certaine "complicité" entre Laviolette et Houle; 2 - il a perçu que la coopérations de Houle ne lui était pas "entièrement acquise", qu'elle "doutait de ses instructions"; 3 - par exemple, elle aurait changé son horaire de travail sans le prévenir, passant d'une journée de 7 h 00 à 15 h 00 à une journée de 8 h 00 à 16 h 00 et que cela l'a contrarié; 4 - il a aussi été "froissé" par le fait qu'Amélie Houle retirait des "avantages" de sa nouvelle situation : elle était invitée au restaurant par Laviolette, qui mettait aussi de l'essence dans sa voiture ou encore était invitée au cinéma par Laviolette qui payait certaines de ces dépenses au moyen de sa carte de crédit corporative. Prud'homme considère ces éléments comme des "irritants".
41 Bref, Prud'homme n'a jamais accepté le fait que Laviolette et Houle décident de partager leur vie. Il s'est senti trahi. Il a, à compter de ce moment, commencé à douter de son associé, et ce, malgré le fait qu'en 2006 Biffusion a continué à très bien performer, jusqu'à atteindre finalement le seuil de la rentabilité vers le quatrième quart de 2006.
c) La rupture
42 Laviolette explique qu'après plusieurs années de "vaches maigres" ou les deux associés ont travaillé d'arrache-pied sans réelle rémunération, après avoir réussi à rembourser toutes les dettes de la compagnie tant envers Prud'homme qu'envers la banque, les résultats sont tels que lui et Prud'homme envisagent de pouvoir augmenter leurs salaires. Environ trois semaines avant le 28 novembre 2006, Biffusion a effectivement atteint le seuil de la rentabilité.
43 Une semaine avant, le 28 novembre 2006, Prud'homme et Laviolette vont au restaurant pour déjeuner avec Javier Cabrera. Cabrera est programmeur-analyste. C'est lui qui a rédigé le logiciel qui fait fonctionner la plate-forme "Suite Vox". Cabrera est intéressé à se joindre à Biffusion.
44 Lors du déjeuner, il est d'abord question de l'endroit physique où on installera le nouvel infographiste que Biffusion entend engager. Houle travaille à plein régime mais le volume d'affaires en cours est tel qu'elle a besoin d'aide.
45 Il est aussi question de la possibilité d'intégrer Cabrera au sein de l'équipe comme troisième actionnaire, ce qui implique que Prud'homme et Laviolette devraient normalement lui céder des actions. Sans qu'un profond différend naisse entre les trois, certains points ne semblent pas faire l'unanimité, ce qui amène Laviolette à laisser entendre à Cabrera que, de toutes façons, ce genre de décision se prenait toujours à l'unanimité entre lui et Prud'homme et que tant que les deux associés ne seraient pas d'accord, ils continueraient de discuter jusqu'à ce qu'ils le soient...
46 Il s'ensuit, lors de cette discussion, un différend entre Prud'homme et Laviolette où, devant un tiers (Cabrera), Prud'homme sent le besoin d'affirmer qu'avec 60 % des actions et en tant que président, quand le président parle, le vice-président (Laviolette) doit suivre. En d'autres termes, toute décision relative à l'arrivée de Javier Cabrera dans Biffusion sera prise, en dernière analyse, par Prud'homme et Laviolette n'aura qu'à s'y conformer. Cela donnera lieu à l'envoi d'un courriel de Prud'homme à Laviolette (pièce R-51) dans la soirée qui suit, qui se lit ainsi : * Bonjour Jean-François, * Je tiens à répondre à tes propos de ce midi au sujet de la prise de décision chez biffusion.com. * Voici comment cela fonctionne. Les décisions importantes sont discutées par le président et le vice-président et si ceux-ci sont en désaccord, le président tranche. * Je réponds aussi à ta question de cette semaine quant à savoir quel est ton titre chez Biffusion.com. Et bien c'est le même depuis 2001. * J'espère que ces précisions éviterons toute autre confusion ou mauvaise compréhension de ton rôle chez biffusion.com. * À bientôt * François Prud'homme
47 Pendant les quelques jours qui ont suivi, un froid s'installe entre Prud'homme et Laviolette. Prud'homme raconte lui-même que dès le lendemain, Laviolette s'est excusé de l'avoir vexé la veille mais pour Prud'homme... "le mal était fait"...
48 Une semaine passe sans que les deux associés ne se parlent, alors qu'ils avaient l'habitude de communiquer constamment entre eux.
49 Le 28 novembre, Laviolette et Prud'homme vont déjeuner ensemble. Ils se sont à peine parlés depuis l'incident.
50 Prud'homme informe alors Laviolette que, pour lui, leur relation est brisée, qu'il ne voit pas comment ils peuvent continuer à travailler ensemble. Prud'homme parle de séparation, de rachat d'actions, de discussions avec le notaire pour établir les paramètres de la séparation qui pour lui est, semble-t-il chose faite.
51 Prud'homme ajoute que Laviolette lui a alors demandé de tout oublier, de recommencer à zéro, de partir sur de nouvelles bases mais pour lui, la trahison de confiance est complète tant par le fait que Laviolette ait formé un couple avec Amélie Houle que par le fait que son "autorité a été bafouée" le 23 novembre précédent.
52 À la demande de Laviolette de "passer l'éponge", il répond "qu'il n'est pas prêt à cela et qu'il faut établir les paramètres d'une séparation".
53 Après cet échange, Laviolette et Prud'homme rentrent au bureau. Laviolette parle à Amélie Houle de ce qui s'est passé et les deux retrouvent Prud'homme dans son bureau. Il est environ 13 h 30 le 28 novembre 2006.
d) Démission ou congédiement?
54 Jusqu'à date les versions des principaux intéressés concordent, du moins sur les points principaux. Mais la réunion du 28 novembre 2006 en après-midi est perçue par Laviolette comme un congédiement, voire une expulsion caractérisée, de l'entreprise à laquelle il vient de consacrer les cinq dernières années de sa vie et dont il est co-propriétaire à 40 %, alors que pour Prud'homme, il fait face à la démission pure et simple et non justifiée de ses deux employés. 0 i) La version de Prud'homme : celui-ci explique qu'Amélie Houle est entrée dans son bureau et lui a déclaré que "ce n'est pas correct ce que tu fais à Jean-François. Si c'est pour être comme ça on s'en va tous les deux". Prud'homme ajoute que Laviolette lui aurait dit que... "sa motivation n'y était plus"... Prud'homme déclare "être sous le choc"... face à de telles déclarations de ses deux "employés". 0 C'est alors que Laviolette et Houle se sont levés pour quitter les lieux. Prud'homme leur aurait demandé les clés du bureau qu'ils auraient refusé de lui remettre. 0 Il est 14 h 00 lorsque Laviolette et Houle quittent leur bureau sans autres explications. Prud'homme considère que ses deux employés ont démissionné et agira en conséquence dès leur départ. 0 ii) Laviolette de son côté parle avec sa conjointe Amélie Houle et lui dit... "François ne veut plus travailler avec moi"... Il confirme que lui et Amélie Houle rencontrent Prud'homme dans son bureau et qu'il l'informe que si Laviolette part, Houle partira aussi. Selon Laviolette, Prud'homme reste silencieux. Ils quittent à 14 h 00 en disant qu'ils reviennent le lendemain. 1 iii) Amélie Houle décrit la situation ainsi : ... "Jean-François revient du lunch (le 28) l'air défait... Je l'ai suivi dans le bureau de François (Prud'homme) qui leur dit qu'il ne veut plus travailler avec vous autres"" ... je lui dis... "si c'est comme ça on part tous les deux"... François (Prud'homme) fait allusion à un package d'un an de salaire, ce à quoi Jean-François (Laviolette) répond : "Ça ne te donne pas le droit de nous mettre dehors"... 0 ... "En quittant, François (Prud'homme) me demande les clés du bureau. Je refuse et lui dis qu'on s'en va réfléchir et qu'on revient le lendemain"...
55 Après leur départ du bureau, Laviolette et Houle constatent qu'ils sont... "barrés de partout"... En rentrant chez eux, Laviolette tente d'utiliser sa carte de crédit de Biffusion pour mettre de l'essence dans la voiture. Il constate que celle-ci a déjà été annulée. À leur arrivée chez eux, Laviolette constatera que son accès sécurisé au serveur du bureau (par internet) est aussi annulé. Ils constateront, le lendemain à leur retour au bureau, que leurs cartes magnétiques d'accès aux locaux de Biffusion ont aussi été annulées. Leurs effets personnels ont été entassés pêle-mêle dans un chariot près de la porte.
56 Laviolette et Houle témoignent tous deux de leur désir de continuer néanmoins à travailler chez Biffusion. Ils soutiennent qu'ils n'ont jamais démissionné et qu'ils étaient prêts à reprendre le dialogue mais que l'intransigeance de Prud'homme était totale.
57 Laviolette ajoute qu'il n'avait aucune raison logique de démissionner. Il aime travailler chez Biffusion, la compagnie était maintenant rentable, même profitable. Il entrevoyait pouvoir augmenter son salaire à environ 85 000 $ par an pour ensuite partager les profits de Biffusion sur une base de 60 %-40 % selon l'entente qu'il avait toujours eue avec Prud'homme. Au lieu de cela, il se réveille totalement exclu de Biffusion, sans accès à quelque information que ce soit, sans revenu, sans carte de crédit, sans compte de dépenses, sans possibilité de capitaliser sur le travail des cinq dernières années, sans offre formelle de son associé de lui racheter sa part de 40 % dans l'entreprise et, pour couronner le tout, confronté à une demande de remboursement des avances que la compagnie lui a consenties alors qu'il acceptait de travailler sans salaire... espérant un jour de faire assez d'argent pour les rembourser sans difficulté.
58 Laviolette complète son témoignage en précisant que, selon lui, Prud'homme n'a jamais "digéré" le fait que lui et Amélie Houle aient décidé de former un couple et que, depuis ce moment, Prud'homme a planifié la suite des événements. Il a... "attendu d'être en bonne position et quand il a vu que tout allait bien" ... alors, il a décidé de "rompre notre association" ...
59 Lors de son départ, Houle a, dans son sac, une copie du "back-up" informatique contenant toutes les données de l'entreprise y compris le fichier de tous les clients, potentiels ou réels de Biffusion, avec un suivi détaillé, en date du 28 novembre 2006 de toutes les démarches écrites ou téléphoniques. Ce "back-up" ou copie de réserve était fait chaque jour et Houle partait chaque soir avec cette copie, pour des fins évidentes de sécurité.
60 Houle ne remettra pas tout de suite cette copie de réserve à Biffusion. Cependant, elle déclare qu'elle n'a pas les moyens techniques pour accéder à l'information qui y est contenue et déclare sous serment qu'elle n'a jamais accédé à cette information après son départ du 28 novembre 2006. La copie "back up" a été remise ultérieurement, après l'institution du recours de Biffusion.
61 Prud'homme fera grand état du fait que la copie de réserve ne lui a pas été retournée en temps utile. Il prétend que Houle a effectivement accédé à l'information qui y était contenue et qu'il en aurait même tiré un double.
62 Sur l'ensemble de cette question, le Tribunal est d'avis que la version de Houle est plus crédible que celle de Prud'homme. La copie de réserve sera éventuellement retournée à Biffusion mais le Tribunal est convaincu que ni Houle ni Laviolette n'ont accédé au contenu de cette copie et, à plus forte raison, n'ont jamais fait usage de l'information qu'elle contenait.
e) Les faits subséquents
63 Après le 28 novembre 2006, les événements se précipitent.
64 Complètement coupé de Biffusion et sans qu'il n'y ait quelque possibilité de discussion entre Prud'homme et Laviolette, ce dernier se met en recherche d'emploi. Il n'a plus de revenus et son capital est bloqué, vu l'absence d'une offre de rachat de ses actions.
65 Laviolette et Houle sont formels : ils voulaient tous deux continuer à travailler chez Biffusion. Ils ne pouvaient raisonnablement se passer de leurs revenus respectifs et, au lendemain du 28 novembre 2006, ils n'avaient aucune alternative d'emploi devant eux.
66 Laviolette rencontre donc un certain Sylvain Laporte propriétaire d'une petite entreprise de conception et de vente de sites web appelée Boom Communications inc. Leurs discussions portent fruit et Houle et lui sont engagés comme employés quelques jours plus tard, elle comme infographiste et lui, comme vendeur. Leur emploi débute au cours du mois de janvier 2007.
67 Avant son départ de Biffusion, Laviolette admet avoir reçu quelques appels de clients à qui il avait déjà parlé chez Biffusion. Il indique cependant que tous les clients établis de Biffusion c'est-à-dire tous ceux pour qui Biffusion avait déjà effectué un certain travail, ont été redirigés chez Biffusion. Quant aux entreprises qui avaient fait l'objet d'une sollicitation (non invitée) par Biffusion et qui n'avaient signé aucune entente, Laviolette prétend qu'il s'est borné à leur dire qu'il n'était plus chez Biffusion et que s'il pouvait leur être utile, il pourrait alors leur offrir ses services. Ces contacts comprennent des clients potentiels à qui Biffusion avait adressé une soumission non sollicitée mais à laquelle le client potentiel n'avait pas donné suite.
68 Un seul site web a donc été produit dans de telles circonstances par Boom Communications pour le compte de BTL Construction (Voir R-25). Quant aux quatre autres entités qui ont communiqué avec Laviolette3, il n'y a eu aucune suite.
69 La position de Laviolette a donc été la suivante : * a. Il ne s'est livré à aucune sollicitation. * b. Il a refusé de fournir des services à des clients établis de Biffusion. * c. Il a informé certains contacts qui l'ont appelé qu'il n'était plus chez Biffusion mais qu'il pouvait néanmoins répondre à leurs demandes. Ces contacts avaient été sollicités par Biffusion mais sans qu'une entente n'intervienne. * d. Il n'a donc pas violé son obligation de loyauté envers son ancien "employeur" (dont il détient toujours 40 % du capital-actions). * e. Malgré cela, Laviolette, Houle et Boom Communications inc. se voient interpellés par des mises-en-demeure les enjoignant de ne pas intervenir auprès de la clientèle de Biffusion.
70 Laviolette reconnaît avoir eu d'autres contacts avec certains clients de Biffusion (PME Internotaires, APCHQ) mais sans qu'il n'en résulte une quelconque sollicitation de sa part ou un quelconque contrat en faveur de Biffusion.
71 Les contacts effectués par certains clients potentiels de Biffusion auprès de Laviolette n'ont pas été sollicités par ce dernier mais selon Prud'homme, le simple fait que Laviolette ait accepté de leur parler constituerait un manque à son obligation de loyauté.
72 D'après Prud'homme, d'autres entités qui auraient, à un certain moment, été contactées par Biffusion auraient aussi été contactées par Boom Communications après le départ de Laviolette4. Or, aucune de ces entités ne sont venues corroborer la position de Prud'homme sur ce point5.
73 Prud'homme ajoutera que plus tard, après avoir récupéré l'ordinateur de Laviolette (propriété de Biffusion.com inc.), il a pu retracer diverses tentatives de la part de Laviolette de se brancher sur le serveur de Biffusion pour, semble-t-il, y recueillir certaines informations confidentielles. D'une part, la preuve n'est pas concluante sur ce point et aucune preuve d'un quelconque préjudice subi par Biffusion n'a été apportée et, d'autre part ces faits sont vigoureusement niés par Laviolette.
LES RECOURS INTENTÉS * a) Le recours de Laviolette No 50-11-029588-064
74 C'est Laviolette qui, le premier, intente un recours en injonction permanente, ordonnance de sauvegarde et en redressement, basé sur l'article 241 LCSA. Son recours est daté du 27 décembre 2006 et recherche comme conclusions principales : 0 a) la détermination de la valeur marchande de ses actions dans Biffusion; 1 b) une ordonnance de rachat desdites actions à leur juste valeur marchande; 2 c) des dommages-intérêts de 25 000 $.
75 Avant l'audition devant le soussigné, le juge Jean-Yves Lalonde de cette Cour rend une ordonnance de sauvegarde de consentement (laquelle sera prorogée par diverses décisions et demeure en vigueur jusqu'à jugement final) aux termes de laquelle Prud'homme et Biffusion conviennent de garder le statu quo corporatif dans l'entreprise de manière à ne pas préjudicier aux droits éventuels de Laviolette.
76 Le 6 août 2007, le juge Claude Auclair de cette Cour rejette une requête du demandeur Laviolette en modification de l'ordonnance de sauvegarde recherchant : 0 a. la communication de certains renseignements relatifs aux affaires de Biffusion sur une base mensuelle; 1 b. le consentement du demandeur eu égard aux engagements financiers de Biffusion; 2 c. une ordonnance imposant à Biffusion (dans une proportion de 60 %) et à Laviolette (dans une proportion de 40 %) de procéder à une évaluation du capital-actions de Biffusion. * b) Le recours de Biffusion No 500-17-035356-073
77 Ne voulant pas être en reste face au recours de Laviolette, Biffusion institue son propre recours en injonction devant la Chambre civile de la Cour supérieure en date du 21 février 2007.
78 Alléguant les contrats entre Laviolette et certaines entités qu'elle prétend être ses clients6, Biffusion recherche une ordonnance de cessation de communiquer avec les clients et clients potentiels de Biffusion et de remettre à Biffusion tous les biens en la possession de Laviolette et de Amélie Houle.
79 Le 22 février 2007, la juge Christiane Alary de cette Cour rend une ordonnance d'injonction provisoire qui sera éventuellement transformée en ordonnance de sauvegarde en vigueur jusqu'à jugement enjoignant Laviolette, Houle et Boom Communications de :
"Cesser immédiatement, directement ou indirectement, de concurrencer et de communiquer personnellement ou par personne interposée avec les clients de la demanderesse Biffusion en faisant usage des informations confidentielles obtenues par les défendeurs Jean-François Laviolette et Amélie Boule dans le cadre de leur emploi auprès de la demanderesse ou de toute autre information confidentielle concernant ou ayant trait aux services et/ou produits de la demanderesse; (soulignements ajoutés) * Cesser immédiatement, directement ou indirectement de faire usage de l'information confidentielle contenue dans les rapports d'activités obtenue par le défendeur Jean-François Laviolette et Amélie Houle dans le cadre de leur emploi auprès de la demanderesse; * Donne acte aux défendeurs de leur consentement à remettre à la demanderesse les biens suivants d'ici le 26 février 2007 à 17 h 00 : les clés de la suite 514 du 2120 Sherbrooke Est à Montréal, l'ouvre porte, la carte d'accès audit immeuble, la cassette intitulée "2 vendredi" et toute copie de celle-ci contenant les informations sauvegardées, et leur ordonne de s'y conformer; * Ordonne aux défendeurs de remettre à la demanderesse tout bien et information confidentielle appartenant à celle-ci présentement en leur possession, à l'exception de la moto et de la voiture;"
80 La requête en injonction de Biffusion recherche en outre par jugement final : 0 a. une injonction permanente dans les mêmes termes; 1 b. des dommages résultant de la concurrence déloyale de la part de Laviolette et de Houle, en violation de leurs obligations de loyauté.
LES QUESTIONS EN LITIGE
81 Le Tribunal doit donc déterminer : 0 a. le droit de Laviolette au redressement proposé, basé sur l'oppression (art. 241 LCSA) et au remède recherché (rachat de ses actions); 1 b. le droit de Laviolette à des dommages; 2 c. le droit de Biffusion à une injonction permanente; 3 d. le droit de Biffusion à des dommages et au remboursement de certaines sommes encourues par Biffusion et résultant du non-retour en temps utile de certains biens lui appartenant.
82 Certains des faits pertinents au traitement de ces questions seront résumés ci-après.
ANALYSE
L'oppression
83 Dans le contexte du recours en oppression, la véritable question juridique que soulève ce dossier ne se limite pas uniquement au niveau de savoir si Laviolette a démissionné ou a été congédié quoique cette question ait son importance. Ce qui est primordial c'est de déterminer si l'ensemble des circonstances prouvées constitue un cas d'oppression au sens de l'article 241de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA)7.
84 En effet, l'ensemble des faits établis par la preuve doit démontrer une situation telle que les droits et les attentes raisonnables de Laviolette en sa qualité d'actionnaire sont effectivement brimés et affectés par le comportement de la compagnie ou de son actionnaire principal et que ce comportement a comme conséquence de causer une situation qui requiert l'intervention du tribunal pour la redresser.
85 La notion d'oppression codifiée aux articles 241 et suivants de la LCSA ne procède pas uniquement ou nécessairement sur la base de la responsabilité civile traditionnelle (faute, lien de causalité, dommage). Elle se constate plutôt au niveau des effets qu'elle produit.
86 Donc si le comportement, même non fautif (au sens de la notion de faute en responsabilité civile), de la compagnie ou de ses actionnaires majoritaires à l'endroit d'un actionnaire minoritaire, a pour effet d'opprimer celui-ci, de le brimer dans ses droits et dans ses attentes raisonnables, et ce, même si les agissements des majoritaires s'inscrivent dans une relative légalité, le Tribunal poura néanmoins conclure à l'existence d'un comportement oppressif et imposer le ou les redressements qui s'imposent dans les circonstances.
87 Prud'homme fait grand état du fait que Laviolette a démissionné et qu'il avait donc tous les droits de lui fermer l'accès aux livres, registres et dossiers de l'entreprise, de lui couper l'utilisation de sa carte de crédit, d'exiger le retour immédiat des véhicules utilisés par Laviolette, de son ordinateur portable, etc. en plus d'exiger que ce denier respecte son devoir de loyauté et qu'il rembourse toutes les avances corporatives dont il avait bénéficié.
88 Au surplus, Prud'homme prétend que si Laviolette n'a pas démissionné et qu'il a plutôt été congédié, alors le congédiement, même d'un cadre ou d'un dirigeant, ne peut faire l'objet d'un recours en oppression8.
89 Finalement Prud'homme plaide que Laviolette, par son comportement, a miné la confiance qu'il lui avait accordée et qu'il n'était que le seul artisan de son propre malheur.
90 De l'avis du Tribunal, la situation est toute autre.
91 Prud'homme a (peut être sans le vouloir, quoique le Tribunal en doute fort) tout simplement évincé Laviolette de Biffusion à un moment où (peut-être sans l'avoir planifié mais encore, le Tribunal a de sérieux doutes) Prud'homme n'avait plus besoin des services de son associé et n'avait plus besoin de partager avec lui les profits de l'entreprise.
92 Prud'homme s'est comporté non pas comme s'il était actionnaire majoritaire à 60 % mais plutôt comme s'il était le seul actionnaire de Biffusion et comme si Laviolette n'était qu'un simple employé.
93 Dans les faits, Prud'homme a provoqué de toutes pièces la rupture entre Laviolette et lui-même. Si un différend existait vraiment sur qui avait ou devait avoir le dernier mot dans l'administration de la compagnie ou encore, si ce différend est survenu lors du déjeuner avec Javier Cabrera une semaine avant le 28 novembre 2006, ce différend était, somme toute, mineur et Laviolette était, dès le lendemain, prêt à accepter le contenu du courriel où Prud'homme insistait pour avoir le pouvoir décisionnel ultime. Normalement, les choses auraient dû en rester là.
94 Ainsi, un tel événement, plutôt banal, ne peut constituer un motif valable de rupture entre les deux associés surtout lorsque les deux actionnaires/associés détiennent respectivement 60 % et 40 % des actions de l'entreprise.
95 Laviolette n'a jamais voulu mettre fin à cette relation. Prud'homme, de son côté, semble avoir saisi l'occasion d'éliminer Laviolette. La preuve révèle en effet que Laviolette n'a jamais voulu quitter Biffusion et n'a jamais tenté de prendre la place de Prud'homme. Il n'a fait qu'exprimer sa vision des choses lors de discussions avec un associé potentiel où il a, certes, un mot à dire si cet associé doit recevoir des actions des actionnaires de Biffusion et que ces actions doivent nécessairement provenir de lui et de Prud'homme. Son consentement est donc requis.
96 La réaction de Prud'homme, intempestive et très rapide, ne laissant aucune issue à Laviolette et à Houle dans l'après-midi du 28 novembre, est suspecte : alors que les deux quittent en lui disant qu'ils revenaient le lendemain, Prud'homme s'empresse de couper la carte de crédit corporative de Laviolette et de lui couper son accès internet au serveur de l'entreprise. Il leur interdit l'accès aux locaux en changeant les codes de sécurité et en annulant leurs cartes magnétiques. Il empile leurs affaires personnelles dans un chariot sur le pas de la porte.
97 Quelques jours plus tard, Prud'homme enverra même à Laviolette un chèque de cessation d'emploi.
98 Il lui refusera l'accès à toute information corporative et, tel que son avocat le plaidera avec une certaine candeur, Prud'homme prendra l'attitude que Laviolette, en tant qu'actionnaire, n'a droit désormais qu'à une invitation à l'assemblée annuelle des actionnaires et à une copie des états financiers annuels de l'entreprise!
99 Il est évident qu'un tel comportement à l'égard d'un associé actionnaire à 40 % est hautement oppressif, totalement injustifié et injustifiable dans les circonstances et dénote une attitude qui, si elle doit prévaloir, doit obligatoirement passer par le rachat des actions de Laviolette. Or, à ce jour, ce rachat n'est toujours pas proposé et, encore moins, effectué.
100 L'oppression ne résulte donc pas uniquement du congédiement dont Laviolette est victime. S'il ne s'agissait que de cela, Laviolette n'aurait qu'à poursuivre en dommages et récupérer les sommes qu'il perd comme conséquence directe de son congédiement.
101 Mais c'est l'ensemble du comportement de Biffusion et de Prud'homme à son égard qui constitue l'oppression. L'élément congédiement proprement dit n'en est qu'une composante.
102 Dans l'affaire Patrice Bénard et Al. c. Russel Gagnon et Al.9 le juge Jean-Pierre Plouffe cite l'auteur Paul Martel10 : * "Dans quelles circonstances peut-on intenter ce recours? * Les motifs qui peuvent donner ouverture au recours sont énoncés au paragraphe 2 de l'article 241 de la Loi. * En ce qui a trait au sous-paragraphe c), Me Martel le qualifie de la façon suivante : * La façon dont ses administrateurs exercent ou ont exercé leurs pouvoirs, a provoqué une situation qui a l'un ou l'autre des trois effets suivants envers un détenteur de valeurs mobilières, un créancier, un administrateur ou un dirigeant : abuser de ses droits (oppression), porter injustement atteinte à ses intérêts (unfair prejudice), ou ne pas en tenir compte injustement (unfair disregard). * Me Martel ajoute : * Le recours de l'article 241 est ouvert non seulement dans les cas d'abus des droits du plaignant, ce qu implique de éléments dedureté et demanque de probité et traduit l'expression anglaise "oppresssion", mais aussi, et c'est là que la loi fédérale a innové par rapport au droit anglais, dans les cas où, même en l'absence d'illégalité ou de fraude, il est porté atteinte à ces droits ou qu'il n'en est pas tenu compte. La version anglaise de la Loi utilise l'expression "unfairly", c'est-à-dire "injustement" ou "inéquitablement", pour décrire ces deux autres catégories de circonstances... Pour déterminer s'il y a ou non un "préjudice injuste", à réparer, le tribunal doit s'efforcer de respecter un équilibre entre, d'une part, la protection des intérêts du plaignant et, de l'autre, la liberté d'action des dirigeants de l'entreprise, et la latitude qu'ils ont de poser dans son intérêt des gestes qui affectent le plaignant ou ne tiennent pas compte de ses intérêts... Mais il faut également tenir compte d'un facteur dégagé par la jurisprudence... c'est-à-dire les "droits, attentes et obligations" entre individus qui ne doivent pas être submergés par la structure corporative. L'équité demande en effet que pèsent dans la balance les "attentes sous-jacentes" (underlying expectations) des parties dans les petites entreprises. Ces attentes font partie des "intérêts" du plaignant qu'il faut sauvegarder. L'article 241 vise en effet à sauvegarder les "intérêts" du plaignant, et non pas uniquement et strictement ses "droits". * Sur le même sujet, les auteurs Paul et Maurice Martel opinent : * Il n'est pas nécessaire que l'oppression ou le traitement injuste soient causés par un acte délibéré de la société ou de ses administrateurs; il n'est même pas nécessaire que l'injustice émane de la direction de la société. Ce qui importe, c'est le résultat, et non l'intention. Il n'est donc pas requis du plaignant qu'il prouve mauvaise foi de la part des administrateurs ou de la direction de la société pou convaincre la Cour de rendre son ordonnance. * Enfin, Me Paul Martel énonce : * Pour déterminer le caractère injuste ou oppressif des actes de la société, le tribunal les considère non pas séparément, mais dans leur ensemble. Les activités susceptibles d'être scrutées à la lumière du test d'"équité" de l'article 241 ne se limitent pas aux"affaires internes", mais comprennent aussi les activités externes, comme les contrats et les ententes intervenues entre la société et des tiers. * Quant à l'interprétation à donner à ce recours, elle doit l'être de façon large et libérale. * Il va de soi, qu'il incombe au plaignant de prouver l'oppression ou l'injustice dont il se prétend victime. * Quelles ordonnances peut-on obtenir? * C'est le paragraphe 3 de l'article 241 de la Loi qui en traite. A cet égard, Me Paul Martel mentionne : "le principe est très souple : le tribunal peut rendre toutes les ordonnances, provisoires ou définitives, qu'il estime pertinentes. Il a littéralement carte blanche pour rétablir l'équité dans la société". Enfin, "le remède apporté par le tribunal doit être proportionnel au préjudice subi par le plaignant. Il doit viser à redresser la situation en apportant une rectification à l'injustice ou à l'oppression, et non aller au-delà de cela". * (soulignements ajoutés)
103 Dans Boulanger c. GSI Environnement inc.11, le juge Jacques Viens écrit : * Or, le demandeur soumet qu'il a été victime d'un congédiement par induction en ce sens que son employeur, la défenderesse GSI, a apporté des modifications substantielles à ses conditions de travail qui seraient devenues moins avantageuses que celles qui avaient été convenues en 1997. * Dans Farber c. Cie Trust Royal, [1997] 1 R.C.S. 846, Monsieur le juge Gonthier s'exprime comme suit à la page 858 : * Lorsqu'un employeur décide unilatéralement de modifier de façon substantielle les conditions essentielles du contrat de travail de son employé et que celui-ci n'accepte pas ces modifications et quitte son emploi, son départ constitue non pas une démission, mais un congédiement. Vu l'absence de congédiement formel de la part de l'employeur, on qualifie cette situation de "congédiement déguisé". En effet, en voulant de manière unilatérale modifier substantiellement les conditions essentielles du contrat d'emploi, l'employeur cesse de respecter ses obligations; il se trouve donc à dénoncer ce contrat. Il est alors loisible à l'employé d'invoquer la résiliation pour bris de contrat et de quitter L'employé a alors droit à une indemnité qui tient lieu de délai-congé et, s'il y a lieu, à des dommages. * Par contre, l'employeur peut faire toutes les modifications à la situation de son employé qui lui sont permises par le contrat, notamment dans le cadre de son pouvoir de direction. D'ailleurs, ces modifications à la situation de l'employé ne constitueront pas des modifications du contrat de travail, mais bien des applications de ce dernier. Cette marge de manoeuvre sera plus ou moins grande selon ce qui a été entendu entre les parties lors de la formation du contrat... * Pour arriver à la conclusion qu'un employé a fait l'objet d'un congédiement déguisé, le tribunal doit donc déterminer si la modification unilatérale imposée par l'employeur constituait une modification substantielle des conditions essentielles du contrat de travail de l'employé. Pour ce faire, le juge doit se demander si, au moment où l'offre a été faite, une personne raisonnable, se trouvant dans la même situation que l'employé, aurait considéré qu'il s'agissait d'une modification substantielle des conditions essentielles du contrat de travail. Le fait que l'employé ait été prêt à accepter en partie la modification n'est pas déterminant puisque d'autres raisons peuvent inciter l'employé à accepter moins que ce à quoi il a droit. * Par ailleurs, il n'est pas nécessaire que l'employeur ait eu l'intention de forcer son employé à quitter son emploi ou qu'il ait été de mauvaise foi en modifiant de façon substantielle les conditions essentielles du contrat de travail, pour que celui-ci soit résilié. Toutefois, si l'employeur était de mauvaise foi, cela aurait un impact sur les dommages à accorder à l'employé... * (soulignements ajoutés)
104 Il est clair pour le soussigné que lorsqu'un actionnaire majoritaire décide qu'il ne peut plus travailler avec son unique co-actionnaire et qu'il doit donc envisager une séparation, cet actionnaire majoritaire congédie son co-actionnaire, purement et simplement ou encore il le force à démissionner. On parle alors de congédiement par induction ou d'un congédiement déguisé. Si, ce faisant, on prive ce dernier de ses droits d'actionnaire à 40 % et qu'on le prive de ses attentes raisonnables comme actionnaire à 40 % (pertes de gains importants, participation à la croissance de l'entreprise, etc...) alors il est évident que l'actionnaire minoritaire en subira une oppression que le tribunal devra corriger.
105 Le juge Viens ajoute d'ailleurs12 : * En somme, son statut d'actionnaire dans GSI est strictement lié a celui d'employé et découle directement des obligations assumées par la défenderesse GSI à son endroit. Ce statut d'actionnaire est tellement lié à celui d'employé qu'il aurait dû remettre un pourcentage des actions s'il avait quitté l'entreprise avant l'expiration du contrat de 3 ans. * ... * Il estime aussi que la défenderesse lui a imposé unilatéralement des conditions d'emploi, de travail et de rémunération moins avantageuses, a refusé de lui transmettre des informations financières la concernant, l'a écarté volontairement de la gestion de la société, a pris des décisions unilatérales sans le consulter et l'a méprisé devant des tiers. * ... * A notre avis, le simple fait qu'il a quitté son emploi en septembre 1999 sans que tout soit mise en oeuvre pour que ses actions soient rachetées par la compagnie montre qu'on refuse de prendre en considération ses intérêts et qu'en conséquence, on abuse de ses droits comme actionnaire minoritaire de GSI. * (soulignements ajoutés)
106 Plus récemment, dans l'affaire Claisse13, la Cour d'appel, citant le juge de première instance, résume les faits pertinents : * L'ensemble des faits ci-avant explicités, dont la majeure partie s'est produite après que (Mme Simard et M. Dessureault) soient devenus les seuls officiers de C.S.C., comme la mise à l'écart graduelle (de M. Claisse) des postes qu'il contrôlait, au profit d'employés moins expérimentés que lui; les manoeuvres pour l'empêcher d'assister à la conférence de Denver, où il était très bien vu; la propension à mettre de moins en moins l'accent sur son rôle clé dans C.S.C.; la baisse de salaire de 80 %, sans préavis ni discussion préalable, accompagnée du retrait de l'usage du véhicule qu'il utilisait jusque là; le changement des serrures sans lui permettre un double des clé; le retrait, sans préavis ni discussion, de son autorisation de signer les effets bancaires, et on le verra plus loin, le congédiement, sont là des gestes qui, posés par (Mme Simard et M. Dessureault) dans l'exécution de leurs fonctions comme seuls officiers de la C.S.C. et sans l'accord préalable (de M. Claisse) malgré ce que spécifié à ce sujet dans R-12 et R-13, équivalent à de l'oppression contre le requérant, (M. Claisse), de la part de C.S.C., l'intimée à la présente requête.
107 La Cour d'appel décrit ainsi le concept d'abus et d'injustice : * Suivant cette disposition, il faut vérifier s'il y a eu abus ou injustice et si un préjudice a été causé à l'actionnaire. * En ce qui concerne l'abus ou l'injustice, les auteurs Crête et Rousseau, dans leur ouvrage Droit des sociétés par actions, écrivent que ces concepts ont été interprétés de façon large par la jurisprudence, pour favoriser l'équité : * Conscients de la difficulté d'établir une classification étanche entre les comportements abusifs et ceux considérés comme injustes, les tribunaux, de manière générale, envisagent plutôt ces conditions d'ouverture dans leur ensemble pour évaluer les actes reprochés. Bien que certains aient fait ressortir certains éléments de distinction, un consensus a rapidement émergé dans la jurisprudence pour donner à ce recours une interprétation large qui se fonde sur le principe souple et englobant de l'équité. Avant d'analyser plus à fond certains exemples tirés de cette jurisprudence, il convient de prendre un peu de recul pour tenter de définir ce concept flou qui est censé guider les tribunaux dans l'application du recours en cas d'iniquité. (Citations volontairement omises) * A l'instar de ces dispositions, le recours en cas d'iniquité énoncé à l'article 241 de la loi canadiene constitueune manifestation marquante de l'équité, puisqu'il confère aux tribunaux le pouvoir d'apprécier le caractère juste des actes d'une société non seulement en regard des droits explicitement reconnus, mais également en tenant compte des "intérêts" implicites des personnes protégées. En évaluant ces intérêts, dont le contenu est fort variable, les tribunaux peuvent ainsi déroger au droit strict lorsque l'application de celui-ci s'avère inéquitable à l'égard de ces personnes. Ils peuvent également exercer une fonction supplétive en comblant les carences des ententes expresses intervenues entre les parties. Grâce à cette mesure de redressement, les personnes placées dans une position faible ou vulnérable, tels les actionnaires minoritaires qui normalement doivent se plier aux voeux de la majorité, bénéficient ainsi d'un mécanisme de contrôle judiciaire lorsque les actes contestés, bien que conformes aux règles prescrites, portent injustement atteinte à leurs intérêts. * (soulignements ajoutés)
108 L'engagement de Laviolette par Biffusion est concomitant à son investissement dans l'actionnariat de la société. C'est parce qu'il est actionnaire à 40 % de Biffusion qu'il accepte de travailler sans salarie pendant des années et ensuite pour un salaire vraisemblablement inférieur à ce qu'il pourrait exiger pour les efforts qu'il met à bâtir le succès de l'entreprise. C'est aussi parce qu'il est actionnaire à 40 % qu'il accepte de recevoir des avances à un actionnaire, sachant (ou espérant) que son actionnariat lui permettra de retirer de l'entreprise des profits et revenus importants qui effaceront cette dette. Ce processus fait partie de ses attentes raisonnables.
109 En privant Laviolette de sa capacité de recevoir un revenu de Biffusion, Biffusion crée une situation inextricable qui prive Laviolette à la fois de ses attentes raisonnables et légitimes de toucher des revenus importants et de bénéficier de son investissement de 40 % du capital-actions.
110 L'expulsion de Laviolette de Biffusion fera en sorte que la compagnie lui réclamera le solde non-remboursé des avances qu'il a reçues à titre d'actionnaire. Or, ces avances lui ont été consenties parce que les résultats financiers de Biffusion ne permettaient pas, à l'époque, de verser des salaires réguliers à ses deux actionnaires. Tel qu'indiqué ci-haut, Prud'homme recevait alors des remboursements de prêts préalablement consentis alors que Laviolette n'ayant avancé aucune somme d'argent à Biffusion, recevait des avances. La terminaison intempestive de leur relation d'affaires par Prud'homme provoque donc une seconde inéquité qui vient s'ajouter au fait que Prud'homme ne semble pas anxieux de lui racheter ses actions. Cette seconde inéquité, soit l'obligation de rembourser les avances reçues préalablement alors qu'on le prive à la fois de son salaire, de sa part éventuelle des profits et de toutes ses autres attentes raisonnables comme actionnaire d'une compagnie qui a presque décuplé tous ses chiffres de productivité en cinq ans, doit aussi être corrigée. Sinon, Prud'homme force littéralement la main de Laviolette en le forçant à réduire le prix de rachat de ses actions de l'équivalent des avances reçues. Or, Laviolette a accepté de recevoir de telles avances parce que la situation financière de la compagnie ne permettait pas de lui verser un salaire fixe et déterminé.
111 Le congédiement déguisé de Laviolette le place dans une position impossible sur le plan de son actionnariat. Il ne peut vendre ses actions à un tiers, il n'a aucune puissance de négociation à l'encontre de la position dominante et d'entier contrôle de Prud'homme qui détient toutes les ficelles de Biffusion.
112 Le juge Pierre Dalphond, alors qu'il était toujours juge de cette Cour a analysé le caractère oppressif d'un congédiement d'un actionnaire minoritaire dans l'affaire Robert c. Kaine et Al.14. Il écrit d'abord * The termination of an employee who is also a shareholder is not, standing alone, an oppressive act which may trigger the application of the oppression remedy provision of the C.B.C.A. Normally, the employee relationship is a civil law issue to be resolved according to provincial laws. (It is only when the primary motivation of the termination is to trigger certain rights or benefits, such as a forced acquisition of shares, that the oppression remedy may become also available) * (soulignements ajoutés)
113 Après avoir accepté le principe de la coexistence possible d'un recours pour oppression et pour congédiement injustifié combinés dans la même procédure, le juge Dalphond ajoute : * This being said, it should be clear from the onset that the principles governing oppression remedies will not be applied with regard to the conclusions related to the employment contract and its termination. In other words, the Court will deal with the conclusions related to oppression according to the principles established under the C.B.C.A. and with those related to the termination of employment according to the Civil code of Québec
114 Il conclut alors au congédiement injustifié du demandeur et lui accorde des dommages équivalents à sa perte de revenus.
115 Puis, analysant le caractère oppressif de la situation, le juge Dalphond conclut à la nécessité de redresser l'inéquité que subit le demandeur en ordonnant le rachat de ses actions à leur juste valeur marchande.
116 Le juge Dalphond procède aussi à des ajustements à l'égard de certaines sommes apparaissant au bilan de l'entreprise, au montant des dividendes payables au demandeur et dont il a été privé par les agissements de l'actionnaire majoritaire. Pour ce faire, il s'autorise des larges pouvoirs de redressement dont la Cour dispose, pouvoirs qui vont même au-delà de ce que les parties elles-mêmes peuvent recommander ou suggérer.
117 Prud'homme ne peut expulser Laviolette sans racheter ses actions. De plus, il n'y a littéralement pas de marché de la revente de ces actions à moins que Prud'homme n'y consente. Cela veut dire que seul Prud'homme peut décider de l'identité de l'acheteur et du prix de vente des actions de Laviolette.
118 Or Prud'homme n'a fait aucune offre de rachat des actions de Laviolette. N'étant lié par aucune convention d'actionnaires, Laviolette et Prud'homme ne peuvent forcer ni l'achat ni la vente de leurs actions respectives. Autrement dit, Laviolette n'a aucun moyen de rentabiliser ou de liquider son investissement lui ayant permis d'acquérir 40 % du capital-actions de Biffusion. Il est irrémédiablement coincé et la seule façon de remédier à cette inéquité est d'ordonner le rachat de ses actions par Biffusion et/ou par Prud'homme.
119 Martel et Martel, "La Compagnie au Québec", édition 2007, No 31-218, pp. 31-84 et suivantes : * (...) "de simples irrégularités accompagnées d'allusions malveillantes ou le renvoi d'un actionnaire comme employé, dirigeant ou administrateur de la société en l'absence de dispositions dans les statuts ou d'une convention exigeant qu'il demeure, ne donnent pas ouverture au recours de l'article 241. Le congédiement illégal d'un employé ne constitue pas à lui seul une base valable pour les recours. Mais si l'employé est aussi actionnaire, administrateur et dirigeant et que son congédiement s'inscrit dans un plan général de conduite visant à l'exclure de tout rôle actif dans la société ou à le forcer à vendre ses actions, le recours peut être accueilli"15. (soulignements ajoutés)
120 Plus loin, No 31-219, page 31-87 : * "Lorsque l'emploi est indissociable de la position d'actionnaire et d'administrateur, cela peut justifier l'"attente raisonnable" de l'actionnaire de conserver son poste d'employé tant que son rendement est adéquat." * (soulignements ajoutés)
121 Dans O'Neil c. Phillips16, la Chambre des Lords d'Angleterre a jugé que l'expulsion d'un minoritaire comme administrateur ou dirigeant et généralement injuste si elle ne s'accompagne pas d'une "offre raisonnable" d'achat de ses actions, c'est-à-dire la juste valeur telle qu'établie par un expert compétent.
122 En l'instance, il est évident, selon la preuve, que Laviolette n'aurait pas investi 56 000 $ dans Biffusion sans s'attendre raisonnablement d'y demeurer comme l'un des principaux employés dirigeants et administrateurs et sans s'attendre à pouvoir en retirer des revenus, dividendes ou profits intéressants. La preuve révèle aussi que Laviolette a toujours bien effectué son travail et que son commentaire à l'effet que toutes les décisions importantes impliquant l'entreprise étaient prises d'un commun accord entre lui et Prud'homme n'était ni déplacé ni inexact. Cela avait été le cas au cours des cinq dernières années et le comportement antérieur des deux intéressés a été conforme à ce modèle. Laviolette pouvait donc s'attendre à ce que cela continue.
123 D'ailleurs, si les paroles de Laviolette s'inscrivent dans le contexte de l'arrivée d'un nouvel associé dans l'entreprise, Prud'homme ne peut véritablement agir seul. En effet, si Prud'homme est Laviolette doivent faire en sorte que Javier Cabrera devienne actionnaire, il faut que tous deux lui cèdent des actions. Prud'homme risque alors de perdre le contrôle absolu de Biffusion. L'arrivée de Cabrera ne peut donc s'entrevoir sans le consentement de Laviolette, du moins sur le plan pratique sinon juridique. N'oublions pas que Laviolette est actionnaire à 40 % et toute émission d'actions par la compagnie serait fort difficile sinon carrément impossible sans l'accord de Laviolette en tant qu'actionnaire et sans l'accord du conseil d'administration où Laviolette détient 50 % du pouvoir décisionnel.
124 Ainsi, le commentaire de Laviolette devant un tiers qui, semble-t-il a déclenché la rupture, n'était pas, dans la réalité des faits et du droit, aussi "déplacé" que Prud'homme semble l'avoir perçu. Si le commentaire de Laviolette a eu pour effet de "briser le lien de confiance" chez Prud'homme au point où celui-ci annonce à son associé des cinq dernières années dont les efforts ont largement contribué à rentabiliser Biffusion, qu'il ne veut plus travailler avec lui et qu'il faut penser à une séparation, ce lien ne tenait plus à gand-chose et le geste de Prud'homme constitue, selon le Tribunal, une rupture de tous les liens liant les deus associés, y compris le lien d'emploi liant Laviolette à Biffusion et constitue une oppression à son égard que le tribunal doit redresser.
125 L'attitude de Prud'homme est aussi suspecte qu'inattendue. Pourquoi, alors que Biffusion atteint le seuil de la rentabilité et de la profitabilité qu'elle permet de verser des salaires non négligeables à ses deux associés, d'engager un second infographiste, de considérer l'adjonction d'un nouvel associé, etc. et surtout d'entrevoir le futur avec beaucoup d'optimisme, pourquoi Prud'homme voudrait-il cesser de travailler avec Laviolette au point de sauter sur la première occasion, pour concrétiser la rupture? Pourquoi, sinon parce que Prud'homme y voit l'occasion de se débarrasser de Laviolette et de l'évincer de Biffusion sans même avoir à racheter ses actions?
126 Le Tribunal est effectivement d'avis que telle est la vraie raison de la rupture, pour laquelle Prud'homme est entièrement responsable et en conséquence le Tribunal est d'avis que Prud'homme n'a pas agi de bonne foi dans toute cette affaire.
127 Le dessein ou le plan mis en place par un actionnaire majoritaire pour éliminer un actionnaire minoritaire constitue une conduite donnant ouverture à un recours basé sur l'oppression. Voir Arthur c. Signum Communications Ltd. [1991] O.J. No. 86 (Gen. Div.) confirmé en appel [1993] O.J. No. 1928 (Gen Div.); Ford Motor Company of Canada Ltd. c. Ontario Municipal Employees Retirement Board, [2006] O.J. No. 990, 2006 CanLII 15 (Ont. C.A.) paragraphe 92.
128 La position du Tribunal aurait pu être différente si l'expulsion de Laviolette de l'entreprise lui avait néanmoins permis de liquider ses actions à leur juste valeur. Ce n'est pas le cas ici. Laisser Laviolette sans possibilité de liquider ses actions équivaut ni plus ni moins qu'à la confiscation de celles-ci. Cela est à la fois inacceptable et injuste pour Laviolette et indûment profitable à Prud'homme et à Biffusion.
129 Le soussigné, sur la base de ces principes, interviendra donc tant au niveau du rachat des actions de Laviolette qu'au niveau du remboursement des avances reçues précédemment à son congédiement ainsi qu'à l'action d'une indemnité de départ pour congédiement injustifié, selon les règles du droit civil. * a) Les réclamations
130 Ayant conclu que Laviolette est effectivement victime d'oppression, il y a lieu de procéder au redressement de la situation ainsi qu'à la disposition des réclamations monétaires de part et d'autre.
131 Nous avons vu précédemment que l'oppression subie par Laviolette se concrétisait à deux niveaux : d'une part, il est privé de la possibilité de revendre ses actions de Biffusion et, d'autre part, son expulsion de l'entreprise l'oblige à faire face à une demande de remboursement de 20 436,10 $ représentant des avances que Biffusion lui a consenties au cours des années passées.
132 Laviolette demande donc au Tribunal de redresser la situation en ordonnant le rachat de ses actions à la juste valeur marchande et l'annulation des avances réclamées. Sur ce dernier point, il prétend que selon une entente intervenue précédemment, il n'aurait pas à rembourser ces sommes.
133 De plus, Laviolette reconnaît devoir 4 277,16 $ à Biffusion au titre de frais encourus relativement à son utilisation de certains véhicules appartenant à Biffusion après son départ.
134 Finalement, Laviolette réclame la somme de 5 000,00 $ à titre d'indemnité de congédiement.
135 Biffusion réclame de son côté les indemnités suivantes : * a) les avances de 20 436,10 $. * b) 10 000,00 $ pour pertes, troubles inconvénients et dommages exemplaires découlant de la violation intentionnelle des droits de Biffusion et de la violation de l'ordonnance du 22 février 2007 de la juge Christiane Alarie.
LE REDRESSEMENT DE L'OPPRESSION
Le rachat des actions de Laviolette et le report du remboursement des avances * a) Rachat des actions
136 Le Tribunal jouit d'un large pouvoir d'intervention en matière d'oppression, pouvoir qui n'est limité ni par la loi ni par les demandes spécifiques des parties. Pour s'en convaincre, il suffit de lire les dispositions pertinentes de l'article 241 LCSA : * 241 (1) Tout plaignant peut demander au Tribunal de rendre les ordonnances visées au présent article. * (2) Le Tribunal... peut... redresser la situation provoquée par la société... qui, à son avis, abuse des droits des détenteurs de valeurs mobilières... * a) soit en raison de son comportement; * b) soit par la façon dont elle conduit ses affaires tant commerciales qu'internes; * c) soit par la façon dont ses administrateurs exercent ou ont exercé leur pouvoir. * (3) Le Tribunal peut... rendre les ordonnances... qu'il estime pertinentes pour notamment : * ... * f) enjoindre à la société... ou à toute autre personne d'acheter des valeurs mobilières d'un détenteur; * g) enjoindre à la société... ou à toute autre personne de rembourser aux détenteurs une partie des fonds qu'ils ont versés pour leurs valeurs mobilières; * j) indemniser les personnes qui ont subi un préjudice; ... (soulignements ajoutés)
137 Prud'homme et Biffusion sont donc assujettis aux ordonnances que peut rendre le Tribunal pour redresser la situation. D'ailleurs, étant donné que Laviolette a acquis son intérêt de 40 % dans Biffusion, il est donc logique que ce soit Prud'homme, entre autres, qui le rachète, d'autant plus que c'est Prud'homme qui a unilatéralement mis fin aux attentes raisonnables de Laviolette et qui bénéficie directement du départ de ce dernier.
138 Au surplus, Biffusion était, avant l'arrivée de Laviolette, l'alter ego de Prud'homme. Avec la rupture et le rachat des actions de Laviolette, Prud'homme reprendra le contrôle absolu de son entreprise. Il est donc logique pour que l'ordonnance de rachat d'actions le vise expressément.
139 Le rachat des actions de Laviolette apparaît, en fait, être le seul moyen efficace de remédier à la situation d'oppression. Le (ou les) seul(s) acheteurs possibles étant Prud'homme et/ou Biffusion, il en sera donc ainsi.
140 C'est d'ailleurs l'approche retenue dans l'affaire Segal c. Blatt et Al., [2007] Q.J. No. 2747, par le juge Clément Gascon de cette Cour, rapportée à 2007 QCCS 1488 confirmée en appel 2008 QCCA 1094.
141 La difficulté, ici comme dans l'affaire Segal, précitée, est de déterminer la juste valeur marchande des actions de Biffusion détenues par Laviolette, soit 40 % de l'entreprise.
142 La preuve ne permet pas au Tribunal de s'appuyer sur une expertise déterminant de façon rigoureuse, la juste valeur marchande d'un tel bloc d'actions17.
143 Ce bloc d'actions représente presque la moitié de la valeur de toute l'entreprise. Ce bloc aurait vraisemblablement permis à Laviolette de concrétiser ses attentes raisonnables d'un revenu annuel constant (et même grandissant d'année en année) de l'ordre d'environ 60 000,00 $ en 2006. Un tel rendement laisse entrevoir une juste valeur marchande d'un ordre de beaucoup supérieur aux 56 000,00 $ investis par Laviolette en 2002. C'est pourquoi le Tribunal estime que ledit montant constitue un prix de rachat minimum.
144 Pour s'en convaincre, il suffit d'examiner tous les indices de progression de l'entreprise depuis la date d'achat par Laviolette et le 26 novembre 2006 : * a) la réduction puis l'élimination de l'endettement de Biffusion en vers Prud'homme * b) la réduction et l'élimination de la dette de Biffusion envers la banque * c) le passage d'une situation financière ne permettant pas à Biffusion de payer des salaires à ses deux dirigeants et actionnaires à une situation ou chacun reçoit 60 000,00 $ par an et espère en recevoir 80 000,00 $ en 2006 * d) la progression des ventes totales annuelles de 2001 à 2006 (de 50 000,00 $ à près de 400 000,00 $), du nombre de sites web livrés (de 4 à 148), des revenus mensuels récurrents (de 435,00 $ à 9 416,00 $), des soumissions en circulation (147 640,00 $ à 1 150 000,00 $), etc.18 * e) l'engagement, dès le départ de Laviolette, de la femme de Prud'homme à un salaire substantiel, faisant en sorte que tous les profits de l'entreprise vont au paiement des émoluments de Prud'homme et de sa femme, ne laissant aucun espoir de voir un quelconque dividende éventuel payable à Laviolette...
145 Le Tribunal n'a donc aucune hésitation à ordonner le rachat des actions de Laviolette par Biffusion et Prud'homme solidairement.
146 Le prix total du bloc d'actions de Laviolette devra être déterminé par un expert indépendant qui devra en établir la juste valeur marchande au-delà du prix minimum de 56 000,00 $. Cependant, les éléments de preuve déjà produits devant le Tribunal démontrent de façon fort significative que la valeur desdites actions dépassera substantiellement les 56 000,00 $ déjà payés par Laviolette en 2002. Celui-ci a donc le droit de recevoir dès maintenant un premier paiement de 56 000,00 $. Une fois connue, la juste valeur marchande desdites actions à la date à laquelle l'évaluation doit être effectuée, il suffira d'en déduire ce premier paiement et d'en régler la différence.
147 Si, malgré ce qui précède, la juste valeur marchande desdites actions est inférieure à 56 000,00 $, Laviolette ne sera pas tenu de rembourser la différence.
148 Quant à la date à laquelle cette évaluation devra s'effectuer, le Tribunal croît qu'il doit s'agir de la date à laquelle Laviolette et Prud'homme consomment leur rupture, soit le 28 novembre 2006, date que Prud'homme aurait dû proposer à Laviolette de lui racheter ses actions. * b) Le remboursement des avances
149 Biffusion réclame de Laviolette des avances de l'ordre de 20 436,00 $. Ces avances ont, en fait, été versées à Laviolette en lieu et place d'un salaire qu'il ne recevait pas. Ces avances ne sont, semble-t-il, soumises à aucun mode de remboursement quelconque et ne portent aucun intérêt.
150 Laviolette prétend qu'il existait une entente ente lui et Prud'homme à l'effet que ces avances ne devaient jamais être remboursées. Or, Laviolette n'a pas réussi à démontrer avec suffisamment de prépondérance que telle était l'entente entre les deux associés.
151 Même si Prud'homme provoque la rupture qui déclenche l'obligation de rembourser ces avances, ce qui en soi est plutôt frustrant pour Laviolette, cela n'élimine pas pour autant le fait qu'il a effectivement reçu cet argent et qu'il doit donc en rendre compte.
152 Cependant, il était aussi en droit de s'attendre que la progression financière de Biffusion fasse en sorte qu'il les rembourse à un moment où ses revenus auraient été suffisamment importants pour que ce remboursement se fasse sans difficultés.
153 Le Tribunal exercera donc sa discrétion en vertu de l'article 241 LCSA pour faire en sorte que Laviolette rembourse lesdites avances à même l'excédent (s'il y en a) de la valeur de ses actions au-delà des 56 000,00 $ qu'il recevra en premier lieu.
154 En d'autres termes, les avances de 20 436,00 $ ne seront remboursables que si la valeur des actions de Laviolette est supérieure à 56 000,00 $ et seulement à même cet excédent. Si la valeur des action de Laviolette ne dépasse pas les 56 000,00 $ en question, Laviolette ne sera pas tenu de les rembourser.
155 En conclusion, sur la question des redressements à apporter à la situation d'oppression et d'abus de pouvoir de la part de Biffusion et de Prud'homme envers Laviolette : * a) Le Tribunal fixe à la somme de 56 000,00 $ la valeur minimale de rachat des actions de Laviolette * b) Le Tribunal ordonne néanmoins la détermination de la juste valeur marchande desdites actions par un expert à être choisi par les parties et à défaut par le Tribunal et : * i. si la juste valeur marchande desdites actions est inférieure à 56 000,00 $, Laviolette n'est pas tenu de rembourser la différence; * ii. si la juste valeur marchande desdites actions est supérieure à 56 000,00 $, le surplus ira d'abord au remboursement des avances de 20 436,00 $ (sans intérêt) jusqu'à paiement complet; * iii. si la juste valeur marchande desdites actions est supérieure à 76 436,10 $ (56 000,00 $ + 20 436,10 $), le solde sera payable par Biffusion et Prud'homme solidairement à Laviolette dans les 30 jours du dépôt du rapport de l'expert.
156 Les frais de l'expertise devront être assumés par Biffusion car c'était son obligation, lors de la terminaison de l'emploi de Laviolette, de pourvoir à l'établissement de cette juste valeur marchande et de racheter de façon concommitante à cette terminaison, les actions de Laviolette. De plus, comme l'expertise est rendue nécessaire suite à une ordonnance du tribunal, les frais d'expertise font donc partie des déboursés judiciaires taxables. Le recours de Laviolette étant accueilli avec dépens, cela fait en sorte que les frais d'expertise auraient été su;portés de toutes façons par la partie perdante. * c) L'indemnité de départ réclamée par Laviolette suite à son congédiement déguisé
157 Laviolette a le droit de cumuler, dans le même recours, une demande d'indemnisation pour congédiement déguisé et une demande de redressement pour oppression. Même si ces deux recours procèdent de deux régimes juridiques distincts, il ne sont pas incompatibles ni mutuellement exclusifs.
158 La réclamation de Laviolette se limite à un mois de salaire (décembre 2006) représentant la somme de 5 000,00 $ (basée sur un salaire de 60 000,00 $ par an). Le tribunal considère que Laviolette a amplement prouvé cette réclamation et cette somme lui est donc accordée. * d) Les réclamations de Biffusion à l'encontre de Laviolette
159 Outre la réclamation reliée aux avances versées à Laviolette en sa qualité d'actionnaire, traitée dans le cadre du recours en oppression, Biffusion réclame les montants suivants : * a) Le remboursement de certaines dépenses reliées à l'utilisation de deux véhicules par Laviolette après son départ (10 000,00 $) * b) Des dommages résultant de troubles, perte de temps et inconvénients * c) Des dommages-intérêts punitifs * d) Des dommages pour perte de profits résultant de la sollicitation illégale de Laviolette à l'endroit de "clients" de Biffusion
160 Dans ses notes soumises le 23 avril 2008, le procureur de Biffusion évalue à la somme totale de 20 000,00 $ les dommages réclamés aux sous-paragraphes (b), (c) et (d) précités.
161 Quant aux dommages relatifs à l'utilisation des véhicules par Laviolette, ceux-ci sont admis jusqu'à concurrence de 4 277,16 $. Ce chiffre représente en effet les coûts de location mensuels relatifs à la moto et à l'automobile utilisés par Laviolette entre son départ (26 novembre 2006) et la reprise desdits véhicules (par saisie-revendication) par Biffusion ainsi que le coût des assurances et des immatriculations.
162 Les autres items réclamés par Biffusion sont les frais de saisie des véhicules ainsi que le coût de certaines réparations qui ont dû être effectuées à l'un des véhicules en question avant sa remise au locateur.
163 Les frais de saisie des véhicules font ordinairement partie des frais taxables de la cause. Ils ne peuvent faire l'objet d'une réclamation en dommages.
164 Les honoraires extra-judiciaires relatifs à ces saisies ne peuvent être réclamés dans le contexte du présent débat, Biffusion n'ayant pas prouvé qu'elle a droit à un tel remboursement selon les principes de l'arrêt Viel19.
165 Quant aux réparations qui ont dû être effectuées à la voiture (Toyota Echo) avant son retour au locateur, Biffusion n'a pas été en mesure de prouver que ces réparations ont été rendues nécessaires suite à l'utilisation inappropriée dudit véhicule après le départ de Laviolette.
166 Laviolette n'est pas personnellement responsable de ces dommages envers Biffusion (quoique Biffusion puisse l'être envers le locateur de l'automobile) à moins de prouver une utilisation inappropriée du véhicule par Laviolette. Les égratignures résultant d'un usage normal, l'usure des pneus ou la réparation d'une fissure dans le pare-brise ne peuvent être réclamées par un employeur à un employé à moins de prouver que ces dommages proviennent d'une utilisation illégale ou hors normes de l'employé, la mauvaise foi ou encore une négligence crasse de ce dernier à l'égard du bien qui est mis à sa disposition. Dans le présent dossier, la preuve d'une telle négligence n'a pas été faite et, encore moins, la preuve de la mauvaise foi de Laviolette.
167 Plus spécifiquement, quant à la demande de réparation du pare-brise de l'auto, Biffusion prétend que la fissure est apparue après le départ de Laviolette alors que ce dernier prétend le contraire. Ajoutons pour clore ce débat que Biffusion a failli à son obligation de prouver qu'effectivement, la fissure (qui provient vraisemblablement d'un caillou ayant frappé le pare-brise) est apparue après le 28 novembre 2006. Quant à la réclamation résultant de l'usure des pneus, il faut bien malheureusement constater que d'en être rendu là dénote, sinon une mesquinerie peu ordinaire, au moins une animosité peu commune entre les deux actionnaires!
168 Le Tribunal conclut que seul le montant admis par Laviolette de 4 277,16 $ est recouvrable dans les circonstances. * e) Les autres dommages
169 Biffusion réclame 20 000,00 $ pour des pertes de profit, troubles et inconvénients et dommages exemplaires découlant de la violation intentionnelle de ses droits et de la violation de l'ordonnance du 22 février 2007 de l'Honorable Christiane Alarie20.
170 L'ordonnance de la juge Alarie ordonne à Laviolette, Houle et Boom de cesser de concurrencer directement ou indirectement ou de communiquer personnellement avec les clients de Biffusion en faisant usage d'informations confidentielles obtenues par ces dernier.
171 La preuve faite devant le soussigné (qui, en l'occurrence n'était pas de la nature d'une procédure d'outrage au tribunal) s'est bornée à établir qu'après son départ, Laviolette a reçu certains appels téléphoniques de certaines personnes à qui Biffusion avait déjà fait des offres de services non sollicitées et avec qui Biffusion espérait conclure un accord éventuel visant la construction d'un éventuel site web.
172 Laviolette n'a ni contacté directement ces personnes ni utilisé des informations confidentielles dans sa réponse à ces mêmes appels téléphoniques.
173 On peut se demander dans un premier temps si les personnes en question étaient bel et bien des "clients" de Biffusion.
174 Le Petit Robert21 définit comme "client" une "personne qui requiert des services moyennant rétribution" ou encore une "personne qui achète". Or, les personnes en question n'ont ni requis, ni acheté des services de Biffusion. Elles ne sont donc pas, à proprement parler des "clients" au sens donné à ce mot dans l'usage courant.
175 Il ne suffit pas, pour qualifier une personne de "cliente" de lui adresser une offre de services (non sollicitée) qui demeure sans réponse ou sans acceptation formelle. La technique de Biffusion était semble-t-il de transmettre à une très vaste liste de destinataires des offres plus ou moins élaborées avec un canevas de services et de prix en espérant que ces destinataires s'en trouveraient intéressés. Cela faisait de ces personnes, au mieux, des clients potentiels mais non de véritables clients. Il en est toutefois différent de ceux qui demandaient ces services ou qui acceptaient l'offre qui leur était soumise.
176 Aucun véritable client de Biffusion, c'est-à-dire une personne ayant requis des services ou ayant accepté une offre de services de la part de Biffusion, n'a été approché par Laviolette, Houle ou Boom. Aucun véritable client de Biffusion n'est d'ailleurs venu corroborer les prétentions de Prud'homme à cet égard.
177 Le Tribunal est d'avis que la preuve ne permet pas de conclure à une violation quelconque de l'injonction prononcée par la juge Alarie.
178 En conséquence, les faits et gestes de Laviolette, Houle et Boom n'ont causé aucune perte de profits à Biffusion et n'ont entraîné aucun dommage provenant d'une prétendue violation de l'ordonnance précitée. Au surplus, si effectivement il y avait eu non-respect de l'ordonnance de la juge Alarie, cela n'aurait pu avoir d'effet qu'au niveau d'une quelconque perte de profits, perte qui n'a nullement été prouvée.
179 Biffusion a fait grand état du fait que l'une des entreprises qu'elle sollicitait a finalement accepté de faire construire son site web par Boom Communications, ce qui lui a occasionné la perte d'un "client" et, par la même occasion d'un honoraire d'environ 4 000,00 $, duquel Biffusion aurait réalisé un profit net de 2 510,00 $22. Or, tel qu'indiqué ci-haut, la preuve ne permet pas de conclure à l'effet que le '"client" en question n'était autre chose qu'un client potentiel.
180 Biffusion n'a pas été en mesure de démontrer que la conduite de Laviolette, de Houle ou de Boom dans le dossier justifiait une quelconque indemnité à titre de dommages. Il n'y a certainement pas eu de conduite intentionnelle répréhensible ni de conduite inappropriée donnant ouverture à une quelconque compensation * f) Les ordonnances d'injonction et/ou de sauvegarde
181 Des ordonnances d'injonction ont été rendues dans les deux dossiers.
182 Une première, en faveur de Laviolette visant à limiter les actions de Biffusion et de Prud'homme relativement à la conduite des affaires de la compagnie. Cette ordonnance date du 5 janvier 2007 et est signée par le juge Jean-Yves Lalonde de cette Cour. Elle est toujours en vigueur (sauf son paragraphe 7, suspendu par jugement du juge Clément Gascon le 22 février 2007). Cette ordonnance restera en vigueur jusqu'à disposition complète de la présente instance.
183 La seconde ordonnance est celle de la juge Alarie. Biffusion demande que cette injonction soit maintenue en vigueur malgré le fait que tous les biens, documents, ordinateurs, fichiers électroniques, véhicules ou autres actifs appartenant à Biffusion aient été réunis. Néanmoins, Biffusion plaide que cette ordonnance de non-concurrence doit demeurer en vigueur afin d'empêcher Laviolette, Houle et Boom de solliciter sa clientèle ou encore de lui faire concurrence déloyale.
184 Or, il faut comprendre que l'information dont Laviolette, Houle ou Boom pourraient encore disposer date du 28 novembre 2006. Cette information, si elle est encore en la possession des personnes en question, n'a plus, après deux ans, aucune pertinence.
185 Au surplus, l'obligation de loyauté liant Laviolette et Houle à Biffusion en vertu de l'article 2088 C.c.Q. n'est pas éternelle. Elle ne peut, sauf en des circonstances exceptionnelles dépasser 12 mois et se situe ordinairement entre 3 et 9 mois suivant la terminaison d'un contrat d'emploi.
186 En conséquence, ni les faits particuliers du présent dossier ni les normes et barèmes applicables à l'obligation d'un ancien employé résultant de l'article 2088 C.c.Q. ne semblent nécessaires ou appropriés après un délai de plus de 24 mois. La demande de maintien en vigueur de l'ordonnance de la juge Christiane Alarie sera donc rejetée.

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Guide Pratique D'Audit

...Réglementant la profession d'Expert Comptable et instituant un Ordre des Experts Comptables Promulguée par le Dahir n° 1-92-139 du 14 Rajeb 1413 (08 Janvier 1993) ___________________ GUIDE PRATIQUE D' A U D I T AIDE À LA MISE EN ŒUVRE DU RÉFÉRENTIEL DE NORMES ROYAUME DU MAROC __________________ ORDRE DES EXPERTS COMPTABLES _________________________________________________________________________ Régi par la loi n° 15-89 Réglementant la profession d'Expert Comptable et instituant un Ordre des Experts Comptables Promulguée par le Dahir n° 1-92-139 du 14 Rajeb 1413 (08 Janvier 1993) _______________________________________ GUIDE PRATIQUE D´AUDIT Lors de la réunion du 21 décembre 2004, le Conseil National de l’Ordre des Experts Comptables a adopté le présent guide pratique d’audit. Avant propos Ce guide vise à synthétiser les éléments essentiels de la mission d'audit légal ou contractuel et à aider les professionnels à mettre en œuvre le dispositif de normes. Il n'est pas destiné à remplacer le manuel des normes dont tous les principes et commentaires restent fondamentaux dans l'exercice professionnel. Il est directement inspiré des normes internationales d'audit (IFAC). Il n'a pas vocation à répertorier toutes les situations et doit être considéré comme mémo de référence des principales données constituant le cœur de la mission générale. Sont exclues les missions d'audit spéciales, d'examen limité, de compilation d'informations financières et d'examen d'informations...

Words: 39510 - Pages: 159

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Systra Management

...Systra   et   Didier   Bodénan   contrôleur   de   gestion   chez   Systra   S1   (filiale   française   de   Systra)   pour   le   temps   qu’ils  nous  ont  accordé.       I-­‐  Présentation  générale  de  l’entreprise  :  Systra     Systra  est   une   firme   internationale   d’ingénierie   qui   possède   une   quarantaine   de   filiales  dans  le  monde  entier.  Le  groupe  est  l’un  des  leaders  mondiaux  de  l’ingénierie  des   infrastructures  de  transports  publics.         • Gouvernance  et  stratégie     Le  conseil  de  surveillance  :     La  présidence  du  conseil  de  surveillance  est  assurée  tour  à  tour  (roulement  tous  les   deux   ans)   par   les   PDG   de   la   SNCF   et   de   la   RATP.   Le   conseil   de   surveillance   se   réunit   quatre   à   six   fois   par   an.   Lors   de   ses   réunions   le   conseil   de   surveillance   analyse   la   stratégie   du   groupe,   il   conseil   le   groupe   sur   ses...

Words: 4127 - Pages: 17

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Comportement Organisationnel Au Caa Quebec

...dans les domaines de l'automobile, du voyage, de l'habitation et des services financiers[1]. ». Leur vision est d’adhérer le plus grand nombre de conducteurs possible à leur compagnie et de devenir des leaders en matière de service routier d’urgence au Canada voir même en Amérique du Nord. Fondée par Andrew J. Dawes à l’aide d’une dizaine d’autres associés influents, en 1904 les débuts du CAA Québec voient le jour. Portant d’abord le nom de l’association canadienne des automobilistes, elle a commencé en offrant des conseils aux automobilistes pour entretenir leur véhicule. Elle a ensuite progressé en créant un réseau de garages recommandés, en offrant des services routiers automobiles pour ensuite offrir des cours de conduite. À partir de 1995, en faisant l’acquisition de Vacance Famille, CAA commence à offrir des services de réservation voyage. Puis en 1998, l’apparition du CAA Habitation un service de conseils et de références en habitation. La diversification continuelle de l’entreprise ainsi que ses nombreux partenariats avec diverses autres compagnies ont contribués à créé le CAA Québec que nous connaissons aujourd’hui. Pour la rédaction de ce rapport, nous avons interviewé 3 employés du CAA Québec. Plus précisément, un superviseur chef d’équipe et deux agents du service routier d’urgence qui travaillent tous dans le centre d’appel basé au 1180 Drummond à Montréal. Le superviseur, Maxime Gravel, à comme mandat de régir les agents sur le plancher, traiter les plaintes...

Words: 7711 - Pages: 31

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M&a Creation of Value

...AIX-MARSEILLE UNIVERSITÉ INSTITUT D’ETUDES POLITIQUES MEMOIRE Pour l’obtention du Diplôme La création de valeur lors d’une opération d’acquisition Par M. Arthur URIOT Mémoire réalisé sous la direction de M. André CARTAPANIS                                           L’IEP n’entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.     Table des matières Résumé..................................................................................................... 5   Mots-clefs................................................................................................. 5   Introduction ............................................................................................ 7   1   Chapitre: Cadre théorique et définition de la fusion-acquisition . 1   1.1   Section 1 : Définition et motivations d’une opération de croissance externe  ............................  1   1.1.1   Paragraphe 1 : Définition et formes de fusion-acquisition  ..................................................................  1   1.1.1.1   La fusion  ...................................................................................................................................................................

Words: 30385 - Pages: 122

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Entreprise Communicationnelle Et Communication Théâtrale

...ENTREPRISE COMMUNICATIONNELLE ET COMMUNICATION THÉÂTRALE : UNE ALLIANCE LÉGITIME ? LES ENJEUX DU THÉÂTRE D'ENTREPRISE Tania BOROS Mémoire de 4e année Organisations, hommes et management Sous la direction de : Lionel Honoré 2011 - 2012 « Le théâtre, à proprement parler n’a rien à dire, ni personne à informer ou à convaincre. Il se contente de créer les conditions d’une connivence et de révéler le destinateur à luimême » Jacky Martin Remerciements Un grand merci à M. Lionel Honoré, pour la grande autonomie accordée quant au choix du sujet et dans la rédaction du mémoire. Merci à Messieurs Baier, Chabert, Lorgnier, Poissonneau, Sabbagh, Simmonet, Tasik pour leurs conseils et leurs contributions à ce projet de recherche. A Sébastien, Séléna et Fanny, pour leur amitié et leur soutien sans faille tout au long de cette année, décisive sur de nombreux aspects : un gigantesque merci. Merci à toutes ces amitiés outre-atlantique (argentines, chiliennes, colombiennes, équatoriennes...) qui ont si bien su me rappeler que la vie est un merveilleux théâtre et qu'il ne tient qu'à soi de choisir d'interpréter le rôle que l'on souhaite. Merci enfin à Khal Drogo, qui nous a permis de chevaucher avec entrain, cette impressionnante montagne que fut le mémoire de 4e année ! Entreprise communicationnelle et communication théâtrale : une alliance légitime ? Les enjeux du Théâtre d'Entreprise Tania BOROS Table des matières Table des illustrations...........

Words: 26843 - Pages: 108

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La Politique de Diversité Et La Grh

...diversité et la GRH | | | | Avril 2013 INTRODUCTION De nos jours, la diversité est devenue un terme de plus en plus populaire dans le domaine de la GRH. Alors qu’auparavant les discriminations reposaient essentiellement sur les différences économiques (bourgeois et prolétaires, riches et pauvres…), aujourd’hui elles se fondent sur des classifications identitaires telles que la couleur de peau, le sexe, la culture… Le concept de diversité poursuit l’idée d’une organisation sans discriminations ni injustices. Beaucoup clament que la diversité est source de performance pour l’entreprise. D’autres défendent l’idée suivante : alors que la diversité est d’abord implémentée dans une optique de suppression de toute forme de discrimination au sein de l’organisation, elle contribuerait au contraire à la consolidation des différences, incitant même certaines minorités à mettre en avant des attributs non observables (l’appartenance religieuse, par exemple). L’objectif de ce travail est donc d’analyser dans quelle mesure ces deux points de vue peuvent être considérés comme ayant une influence réelle sur l’organisation. Est-ce une réelle philosophie intégrée ou une stratégie commerciale ? Concept de diversité Le mot diversité intègre une dualité : * D’une part, les caractéristiques démographiques (origine, nationalité…) et les particularités sociologiques du personnel (sexe, âge, culture, handicap…). La diversité augmente la complexité de l’organisation de l’entreprise...

Words: 5178 - Pages: 21

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Paper Lupu

...Les nouvelles frontières entre vie professionnelle et vie privée chez les femmes comptables professionnelles Ioana Lupu Chercheur, Conservatoire National des Arts et Métiers, LIRSA (EA4603) ioanalupu.office@ gmail.com Marie-Astrid Le Theule Maître de conférences, Conservatoire National des Arts et Métiers, LIRSA (EA4603) marie.letheule@gmail.com Résumé : Le présent article a comme objectif de contribuer à la compréhension de la conciliation de la vie professionnelle et privée des femmes comptables professionnelles en France. Une des caractéristiques des cabinets comptables est le surinvestissement. Les femmes allient leur vie privée et professionnelle grâce aux aménagements du temps de travail introduisant de la flexibilité dans leur espace temps. Des entretiens ont été réalisés auprès de femmes comptables afin de comprendre comment les nouvelles technologies leurs permettent d’harmoniser vie familiale et vie professionnelle, comment elles les utilisent et quel en est l’impact sur leur vie privée et leur carrière Mots clés : profession comptable française, femmes, flexibilité au travail Abstract: This article aims to contribute to the understanding of the reconciliation of professional and private lives of women professional accountants in France. One of the characteristics of accounting firms is over-investment. Women combine their private and professional life through work arrangements introducing flexibility in their space-time. Interviews were conducted with...

Words: 8500 - Pages: 34

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Le Jeu Vidéo Comme Support D'Une Relation Thérapeutique

...2009 Le jeu vidéo comme support d’une relation thérapeutique Pre print revue Adolescence Les psychothérapeutes utilisent de plus en plus la matière numérique comme support thérapeutique. Le texte rend donne quelques jalons de cette évolution ainsi qu’une utilisation possible du jeu vidéo comme médiation thérapeutique en s’appuyant sur d’un travail psychothérapeutique mené au Centre Médico Psycho Pédagogique de Périgueux avec le jeu vidéo Ico. Yann Leroux Janvier 2009 Le Jeu vidéo comme support d’une relation thérapeutique1 un jeu vidéo être transposés dans un jeu de carte. 2. Ils ont quitté leur territoire d’origine, la console de jeu, pour coloniser les ordinateurs personnels. Puis les dispositifs de jeu ont intégré leur propre écran et se sont faits portables. Enfin, ils ont investit la téléphonie mobile, ouvrant de nouveaux espaces de jeu en profitant des ponts que la téléphonie offre vers l’Internet. Les jeux vidéos ne sont plus un espace de contre culture. Ils ont su rester fidèle à leur public de départ – les adolescents – et conquérir d’autres publics : les filles, les parents, et même les grands-parents jouent aujourd’hui aux jeux vidéo. Introduction Nés dans les années 1950, les jeux vidéo n’ont cessés de se développer, suivant en cela l’augmentation continue de la puissance des machines. Ils sont arrivés a un niveau de complexité et de réalisme qui rendent parfois difficile la différence entre des images provenant d’un jeu vidéo et des images provenant...

Words: 4406 - Pages: 18

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Travail Terminologique

...LE TRAVAIL TERMINOLOGIQUE POUR LA TRADUCTION DE L’HISTOIRE Ana Escartín Arilla Licence en Histoire et en Traduction et Interpretation Professeur et traductrice Université de Saragosse Saragosse – Espagne anaescar@unizar.es Résumé : La traduction précise des termes est un aspect-clé dans la traduction de textes scientifiques. La traduction de textes d’histoire, en tant que traduction spécialisée, requiert l’accès à des matériaux terminographiques adéquats aux problèmes qui lui sont propres et qui sont, par la nature même des sciences humaines, principalement extralinguistiques. On envisage l’élaboration de dictionnaires bilingues de termes d’histoire pour les traducteurs, dont le but principal serait précisément l’explicitation des problèmes procédant de la transmission entre cultures, plutôt qu’entre langues. Mot-clés : histoire, terminographie, langue spécialisée, notions historiographiques. 1. INTRODUCTION Les sciences humaines, et plus particulièrement l’histoire, ont été traditionnellement négligées par la terminologie, plutôt consacrée aux champs de la recherche dont la nature scientifique n’a jamais été mise en question, d’où le manque d’ouvrages monographiques de terminologie historique et même de références systématiques à l’histoire dans des textes généraux portant sur des questions terminologiques. D’autre part, les caractéristiques inhérentes à l’histoire comme discipline en ce qui concerne les méthodes de recherche, les présupposés théoriques, les formes du...

Words: 3831 - Pages: 16